Je me suis retrouvé seul. Le campement était vide. Mon père je ne sais où, et je ne souhaitais pas le savoir, je préférais rester seul.
J’ai erré dans le campement pendant plusieurs jours. J’étais accroché à la vision du campement dévasté. Je ne savais pas quoi faire.
Où aller ? Je n’avais jamais participé à aucune des caravanes, je n’avais aucune conscience de ce qu’il y avait au-delà du campement et des montagnes proches.
Les seules personnes que je connaissais maintenant c’était les compagnons de jeu sinans de mon père, mais je ne pouvais me résoudre à aller les voir. Je ne savais pas quoi faire.
J’ai dû avoir de la fièvre, le temps a passé sans que je m’en rende compte. J’ai réalisé que je devenais fou à rester ici. J’ai pris quelques affaires, de quoi me nourrir, de l’eau et j’ai pris la route.
Un peu plus loin je me suis retourné, j’ai vu le campement, je ne l’avais jamais vu d’aussi loin. Mon cœur s’est serré, je savais que plus jamais je ne le reverrais, à quoi bon d’ailleurs, il n’y avait plus rien.
En face de moi la route s’étalait, inconnue. J’étais toujours fiévreux, mes nuits étaient de plus en plus agitées. Je me confondais avec mon père. Etaient-ce d’ailleurs bien des cauchemars ? Je n’avais plus conscience de la limite entre le rêve et la réalité.
Je dors peu, réveillé par mes propres hurlements, je décide de reprendre la marche jusqu’à épuisement.
J’ai enfin croisé des gens, les premiers depuis que je suis parti, cela fait maintenant, 18 jours que j’ai quitté le campement. Je ne me suis pas arrêté, je n’avais pas envie de parler. J’ai continué à marcher. Mes réserves s’épuisaient, il était temps que je me mette à chasser, j’avais faim.
Très maladroitement j’ai essayé de me souvenir de la constitution d’un piège, ce fût long mais je réussi à capturer un lapin. Je l’ai dépiauté, puis j’ai fait un feu. Cela m’a fait du bien, j’ai dû m’endormir, enfin je crois, je ne suis pas sûr. Quand j’ai repris en semblant de conscience, la peau de lapin avait disparu, un lapin gambadait autour de moi, les yeux vitreux. Je savais ce que cela voulait dire, mais je ne savais pas comment il était arrivé là, du moins je ne souhaitais pas trop me poser la question.
Je l’ai tué.
Mon père avait-il réussi à faire de moi un monstre ?
Je me rassurais en pensant que la fièvre était la cause de cet acte et que cela disparaitrait avec le temps.
Cela fait maintenant 33 jours que je suis parti, nous sommes le 6 Kamarien 371, c’est mon anniversaire aujourd’hui. Je suis arrivé à un port, un bateau s’apprête à partir. Je me suis renseigné auprès du capitaine, il m’a dit qu’il allait vers Draïa, je ne connaissais pas. Là ou ailleurs …
Je n’ai pas écouté ce qu’il me disait, un pays est un pays. Il accepte de me faire la traversée en échange de service. Il voulait que je chante pendant le trajet, j’ai trouvé cela bizarre, mais je crois qu’il a été plus surpris que moi quand je lui ai dit que je ne savais pas chanter.