Comment raconter ce que je vis avec Jalindra sans en atténuer la portée par des mots qui ne sont pas la hauteur de ce que je ressens ? Le fait est que je suis tellement bien avec elle et elle avec moi, que nous ne nous quittons plus. Je ne passe plus des heures seule avec pour unique compagnon mon journal. C’est elle qui partage ma vie désormais. Alors forcément, je n’écris plus ou peu… Difficile de raconter le bonheur quand on le vit au quotidien : ces paroles tendres échangées, ces petites attentions, ces caresses douces, ces baisers sensuels et ces étreintes passionnées…

Certaines discussions que nous avons eu reste pourtant gravée dans ma mémoire. Comme celle que nous avons eu sur la possibilité d’avoir un petit homin. La discussion était partie à cause de notre notre manque d’envie de bouger de l’endroit où nous étions. Nous étions bien dans les bras l’une de l’autre sous les branches de Frère arbre. J’avais fini par dire que nous allions nous empâter. Jalindra a souri : « Je suis sur que le petit ventre t’irais très bien ! ». J’ai fait ressortir mon bidon : « Tu trouves? ». Elle m’a embrassé tendrement le ventre en guise de réponse.
J’ai plaisanté : « Malheureusement… je ne pourrais pas être enceinte de toi! ». Elle a souri : « Ça va être compliqué en effet! ». Puis, elle m’a regardée plus sérieusement : « Tu aurais voulu un petit homin? ». Je l’ai regardé un instant éberluée par la question : « Je ne sais pas… à vrai dire… je n’y ai jamais vraiment songé. ». J’ai réfléchi un instant puis j’ai repris : « Mais… si c’était possible… avec toi…. je crois… que çà ne me déplairait pas… de voir grandir le fruit de notre amour… ». Elle m’a caressée la joue : « C’est très touchant ce que tu dis! ».
Puis, elle a dit doucement : « Quand j’étais petite, j’en voulais… ». J’ai caressé sa joue attendrie : « Et maintenant? ». Elle a réfléchi un instant avant de répondre : « Je ne sais pas… L’écorce est si dangereuse… ». J’ai vu soudain son regard partir dans ses souvenirs : « J’ai cru une fois que j’étais enceinte… Je ne sais pas si je l’étais… C’était juste avant que Shab disparaisse… Soit le choc… soit une fausse alerte… Au final… avec la suite des événements… heureusement que ce n’est pas arrivé… ».
Je l’ai serrée dans mes bras : « Mon amour… je suis désolée… ». Je lui offrais des caresses tendres et réconfortantes sans savoir quoi dire. J’ai posé ma main sur son ventre : « Si je pouvais… ». Elle a posé sa main sur la mienne : « Ne t’inquiète pas… Surement qu’il n’y avait rien! Et depuis… je n’ai pas repensé à cette possibilité… Je ne pensais déjà pas te trouver… je pensais juste à survivre. ». Je l’ai regardée hésitant à poser la question qui m’était venue : « Tu crois que… ? ». Elle a compris sans même que je finisse ma phrase : « Non, ça ne me manquera pas. Si ça ne s’est pas bien fini, comme avec Shab, c’est que ça ne devait pas arriver! Et j’ai un merveilleux trésor avec moi aujourd’hui! ». Elle a dit ces dernières paroles en me souriant. J’ai rougi sous le compliment. Puis, elle a continué : « Il n’aurait surement pas survécu en plus… C’était mieux comme ça. ».
Je l’ai regardé sérieusement : « Si un jour ce manque de ne pas avoir de petit homin … devenait trop pesant… tu me le dirais? ». Elle a acquiescé : « Oui, mais je ne pense pas que ça arrive un jour. Même si je suis sûre que tu serais très douée pour t’occuper de notre petit! ». Je l’ai regardée un peu rêveuse : « Notre petit homin? ». Elle a ri : « Il faut intégrer ses recherches à la N’ASA! ». J’ai approuvé en riant : « Oui!!! Trouver un moyen pour les homines d’avoir des petits homins sans homins! ».
Puis j’ai repris plus sérieusement en caressant son ventre : « J’adorerais voir ton ventre s’arrondir avec « notre » petit homin. ». Elle a embrassé mon ventre : « Et pourquoi le mien? ». Je l’ai caressée tendrement : « Parce c’est ton rêve de petite fille… ». Elle a secoué la tête amusée : « J’ai beaucoup grandi depuis ! ». J’ai protesté : « Et alors? Il n’est jamais trop tard pour les rêves d’enfant. ». Elle a souri : « Au bout d’un moment… ça devient plus compliqué. D’ici à ce qu’on trouve un moyen… je serais toute sèche ! Et puis… tu suffis à mon bonheur! ». J’étais émue par ses paroles et mes yeux restaient plongés dans les siens.
J’ai soudain vu son regard devenir taquin : « Si tu veux… y’a un yubo qui nous tourne autour depuis un moment… on peux l’adopter! ». J’ai éclaté de rire : « Non!!! Il fait pipi partout… ou alors on lui mettra des couches. ». Elle a ri avec moi. Nous avons fini par nous endormir. Le lendemain, Jalindra m’a raconté en riant qu’elle avait rêvé de moi avec un gros ventre tandis qu’un yubo nous suivait partout, ce qui nous a fait toutes deux éclater de rire.

Et puis, il y avait eu cette discussion sur la mort. Nous avions dormi dans les primes racines cette nuit là et notre réveil avait été ponctuée par des étreintes qui nous avaient laissée toutes deux bouleversées par l’émotion. J’avais prononcé avec un petit air amusé le mot que nous avions eu après notre premier baiser : « Wahou! ». Je l’ai prise dans mes bras avec des gestes caressants, cherchant ses lèvres et lui offrant un baiser enflammé. Puis, j’ai eu un regard un peu perdu me rendant compte soudain de l’attachement profond qui me liait à elle : « Je ne pourrais plus jamais te quitter… si un jour tu disparaissais… je crois que je disparaîtrai avec toi ma Bek-i-Bemaï. ». Elle a posé un doigt sur mes lèvres : « Ne dis pas de bêtises mon amour, déjà, je n’ai pas l’intention de disparaître… et si par malheur… je voudrais juste que tu retrouves le bonheur, même si ça doit être dans d’autres bras que les miens. Tu mérites tellement d’amour… et je suis sûre que d’autres homines seront capables de voir le bijoux que tu es… ».
Je l’ai regardé, essayant de m’imaginer une vie sans elle mais je ne voyais vraiment pas comment cela pourrait être possible. Je me suis blottie contre elle en restant silencieuse. J’ai fini par lui murmurer : « C’est ce que tu devras faire oui… si un jour je disparais. Trouver le bonheur dans des bras qui te méritent… ». J’ai pris de longues inspirations essayant de contenir l’émotion qui me submergeait mais des larmes de peur et d’angoisse de la perdre ont fini par couler silencieusement le long de mes joues. J’ai murmuré la gorge nouée : « Je ne veux pas te perdre… ».
Elle m’a bercé dans ses bras : « Tu sais, seule la mort pourrait nous séparer, et encore… si je retournais à la sève, je coulerais sous tes pas pour te protéger… Si un jour je devais ne plus te prendre dans mes bras, je resterais toujours à tes côtés… ». J’ai répondu doucement : « La mort ne nous séparera pas… ma sève se mêlera à la tienne… nous serons à jamais réunies mon amour… ». Je me suis redressée pour la regarder et j’ai pris son visage entre mes mains. Mes larmes ont cessé de couler et mon regard était plein d’une certitude nouvelle quand j’ai répété : « A jamais réunies mon amour… ». Je lui ai offert un baiser plein d’amour et de passion. Elle a tremblé d’émotion et m’a dit avec un sourire vacillant : « J’ai plus qu’à faire très attention à mes fesses alors… Je ne voudrais pas priver l’écorce d’une homine magnifique comme toi! ».
Je me suis mise à rire : « Oui tu as intérêt!!! Surtout si tu veux me voir avec un dentier comme le tien! ». Je me suis alors sauvée en éclatant de rire avant de recevoir des coups sur la tête. Elle a grogné, prenant un air faussement énervée : « Saletée! ». Puis, elle m’a couru après. Elle a fini par me rattraper après avoir failli percuter un bodoc. Elle m’a plaquée doucement au sol avant de commencer à me chatouiller. Tandis que je me tortillais sous la torture, elle m’a dit, amusée : « Je cours encore vite pour une vieille! ». Puis, elle a soudain arrêté ses chatouilles pour m’embrasser passionnément avant de dire avec un petit air taquin : « Tu seras magnifique avec un dentier. Je t’en ferais un si tu veux! ». J’ai répondu à son baiser avec avidité en passant doucement au-dessus d’elle, renversant la situation. J’ai attrapé ses mains pour les plaquer au dessus de sa tête. Je l’ai regardée en souriant pour reprendre ensuite notre baiser enfiévré. Je me suis écartée légèrement, en la fixant avec désir. J’ai soudain pris conscience d’où nous nous trouvions et de la proximité des varynx. Je lui ai susurré à l’oreille : « Il ne vaut peut-être mieux pas rester là… sinon, on va se retrouver avec un dentier planté dans nos jolies fesses! ». Nous avons éclaté de rire avant de nous enfuir la main dans la main pour rejoindre un lieu plus reculé pour nous étreindre passionnément.

Ces discussions, sur la vie, sur la mort, je ne les avais eu avec personne d’autres. Plus les jours passaient, plus je sentais que ce que je vivais avec elle était unique. Est ce que d’autres personnes avaient vécu ou vivaient ce que nous étions en train de vivre? Je ne sais pas… J’ai plutôt l’impression que non mais sans doute que je ne suis pas objective…

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