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La colline de Na Djaï’tal

Je me suis réveillée en me frottant les yeux. Na Djaï’tal était déjà éveillé. Il semblait être en train de fabriquer quelque chose avec des fleurs. Il a lâché son ouvrage en me voyant sortir du sommeil pour me caresser doucement la joue. J’ai approché ma main de son masque pour le caresser moi aussi. Il m’a embrassé la main puis il a brandit fièrement son ouvrage : « Une couronne de fleurs! Si moi j’ai des plumes, tu peux avoir des fleurs! ». Il a alors posé tendrement la couronne sur ma tête. Je l’ai remercié en souriant puis j’ai plaisanté : « Les fleurs vont me pousser sur la tête maintenant? ». Il a ri : « Peut-être… ». J’ai ri avec lui : « Bein on ne sait jamais si tu me fais boire une drôle d’infusion… ». Il a eu un sourire facétieux : « Selon la fleur qui pointera, on pourra savoir ce que tu penses… ». J’ai continué de plaisanter : « Ha bon, les fleurs seront le reflet de mon âme? Çà va pas être joli joli! ». Il a protesté : « Si, ça sera très beau, donc ». J’ai rougi sous le compliment.

Il a souri caressant ma joue empourprée. J’ai caressé son masque en retour : « Il est magnifique ton masque… si doux… ». Il a répondu doucement : « Akep… ceux qui me connaissent peuvent y lire mon âme. ». Je l’ai regardé : « Je ne sais pas bien lire les masques zoraïs… mais toi… toi, j’ai parfois l’impression… qu’on se comprend instinctivement. Mais moi je ne sais pas exprimer les choses comme toi. Toi tu mets des mots sur mes émotions et tu me montres la voie… ». Il a souri avec tendresse : « Tes lèvres ont su trouver les miennes, pourtant. ». J’ai pris un air taquin : « A moins que ce ne soit les tiennes? ». Il a souri : « Tu crois ? Je ne sais plus trop, à vrai dire… ». J’ai effleuré ses lèvres de mon doigt et il a fait de même avec les miennes.

Comme la veille nos lèvres se sont trouvées. Ses mains étaient caressantes parcourant mon corps. Je découvrais avec stupéfaction que pour la première fois, depuis les violences que j’avais subies, je ressentais du désir pour un homin. Mais j’osais à peine le toucher comme une vierge effarouchée. Je me sentais gauche et maladroite, me trouvant bien plus douée avec mes amantes. Il a du percevoir mes hésitations : « Tout va bien, Shaakya… ». J’ai avoué : « J’ai l’impression… que je suis à nouveau… comme ma première fois avec un homin… Je ne sais plus les gestes… ». Il avait les yeux émerveillés en entendant çà. Il s’est penché vers moi et m’a murmuré à l’oreille dans un baiser : « Ecoute ta sève… ». J’étais tremblante et un peu apeurée : « J’essaie… ».

Il a souri avec douceur : « Tu veux un massage pour te détendre? ». J’ai acquiescé. Il a posé une peau sur le sol : « Installe-toi alors… ». J’ai retiré mon haut presque timidement, lui cachant mes seins avec mon bras. J’ai relevé la tête avec angoisse pour observer son regard. Mais celui-ci était doux et plein de tendresse. Je me suis installée sur la peau, rassurée par ce regard qui ne me brûlait pas. Il a remonté ses manches et m’a chuchoté à l’oreille : « Guide-moi si tu le souhaites. ». Ses longues mains ont commencé à me masser le cou et les épaules. Petit à petit ses gestes se sont faits plus sensuels. Il a embrassé ma nuque puis mes épaules tandis que ses mains épousaient mes reins.

Je sentais le désir montait en moi. Je me suis retournée doucement pour lui offrir la vue de mes seins nus. Il s’est arrêté un instant semblant m’admirer le masque empli de désir. J’avais le cœur qui battait la chamade mais ma main s’est approchée de son masque. Il a embrassé ma paume tandis que ses mains recommençaient à parcourir mon corps. Il s’est penché pour venir cueillir un baiser sensuel et passionné, bref et intense. J’ai doucement ouvert sa veste pour caresser son torse à la musculature magnifique. Je l’ai regardé un peu éberluée : « Je ne pensais pas que je pourrais… encore une fois trouver un homin désirable… ». Puis, j’ai soudain baissé la tête intimidée par mon aveu. Il l’a relevé puis à embrasser mon front. Je suis venue chercher ses lèvres dans un baiser soudain et passionné auquel il a répondu avec fébrilité. Nous nous sommes enflammés. Il a été un amant attentionné, retenant son désir pour ne jamais m’effaroucher. J’étais maladroite et je le laissais mener les ébats sans oser l’accompagner. Pourtant, un plaisir intense nous a emporté tous les deux.

Nous sommes restés collés l’un à l’autre longtemps après. Il continuait ses caresses douces et tendres. Je me suis mise à trembler. Il a demandé doucement : « Tu as froid? ». J’ai souri timidement en me blottissant contre lui : « C’est l’émotion… je crois… ». Il a souri continuant ses caresses. Je lui ai murmuré : « Je n’ai pas cru Anyume quand elle a dit que tu étais un amant passionné… J’ai eu tord! ». Il a eu un petit rire : « Elle t’a dit ça ? ». J’ai souri : « Oui! Mais c’est parce que je l’ai titillée pour tout savoir de sa relation avec toi! ». Il a souri : « Tu as fait la fouineuse! ». J’ai secoué la tête : « Non! ». Il a rigolé : « Si si, tu as fait la fouineuse, avoue! ». J’ai souri : « En fait, je te trouvais tellement gêné à chaque fois que l’on parlait de caresses ou autres que je me suis demandée si tu étais vraiment son amant! ». Il a soupiré : « C’est que… Je ne veux pas donner l’impression que je m’approprie la personne avec qui je partage une intimité. Alors des fois je peux paraître distant, c’est vrai, mais c’est pour ne pas m’imposer à l’autre en fait, ou à un de ses proches. ». J’ai caressé sa joue en déposant un baiser délicat sur ses lèvres, puis je me suis lovée contre lui.

Il parcourait mon corps de ses longs doigts avec délicatesse, dessinant des courbes, semblant emplir sa mémoire de chaque pli, chaque rondeur. Il a chuchoté : « Tu es une homine vraiment magnifique, Shaakya, et encore plus quand tu exprimes le désir et le plaisir. ». J’ai rougi. Il a souri : « Et aussi quand tu rougis. ». J’ai rougi encore plus en souriant. J’ai commencé à le caresser osant lui offrir ce que je n’avais pas été capable de faire quelques instants auparavant. A nouveau, nous nous sommes unis, nous fondant l’un en l’autre. Cette fois, j’ai tenté de l’accompagner un peu gauchement mais je crois qu’il trouvait çà touchant. Il réagissait à mes attentions en me souriant, en m’embrassant, m’encourageant ainsi à aller plus loin. Une fois de plus, le plaisir nous a emporté.

Il a tiré une peau sur nous en m’enlaçant. J’ai murmuré : « Comment as tu fait pour me donner assez confiance et pour m’offrir ce que je n’espérais plus des homins? ». Il a souri avec tendresse : « Je ne sais pas… Je t’ai vue comme une homine, pas comme une proie, ou une servante, peut-être. Ou c’est peut-être toi qui a changé ton regard? ». J’ai murmuré : « Peut-être les deux! Tellement d’homins regardent les homines comme la future proie à déguster… ». Il a hoché la tête : « En tout cas, je suis heureux d’avoir pu être là pour ce moment à tes côtés. ». J’ai souri : « Et moi je suis heureuse que ce soit toi qui… m’ait offert ma première fois… enfin… ». Il a souri : « Tu m’as fait un magnifique cadeau, Shaakya, un des plus beaux qu’un homin puisse rêver. ». Je me suis blottie contre lui : « J’espère que je n’ai pas été trop maladroite… ». Il a soupiré d’un air amusé : « Maladroite? ». J’ai souri : « Gauche? Empotée? ». Il m’a relevé la tête pour déposer un baiser sur mes lèvres : « Nous étions à l’unisson, c’était… ». Il a écarté les doigts comme une explosion, en mimant le son de ses lèvres. J’ai souri amusé.

Il a ensuite proposé de me montrer un nouvel endroit. Il gardait un sourire mystérieux ne voulant pas me dire où. Je l’ai suivi en lui tenant la main. Nous nous sommes d’abord rendus à Min-Cho. Il a acheté de la liqueur de bambou et de la bière de slaveni, ainsi que des biscuits au miel. Je me suis moquée gentiment : « Tu as peur que je meurs de faim? ». Il a acquiescé : « Oui !!! Il faut reprendre des forces! ». J’ai ri : « Je vais finir par devenir obèse avec Anyume, Eeri et toi! ». Nous sommes repartis pour arriver aux Chutes Mystiques. J’ai souri : « C’est beau… C’est là que tu voulais m’emmener quand je me suis endormie à l’assemblée des cercles? ». Il a aquiescé : « Yui. Pai c’est mieux maintenant. ».

Il s’est approché de moi et a commencé à faire glisser lentement mes vêtements de mes épaules : « On va se baigner! ». J’ai poussé un cri de joie. Nous avons plongé sous la cascade jouant comme des gamins à nous éclabousser, à nous faire couler l’un l’autre. Nous avons beaucoup ri. J’ai fini par lui dire en me cassant le cou pour le regarder : « Tu es quand même… sacrément impressionnant vu d’en bas! ». Il m’a soulevé en me serrant contre lui. Je l’ai enlacé de mes cuisses, enveloppant sa tête de mes bras et en posant mon front sur le sien. L’eau glissait sur nous emportant tous nos soucis. J’ai goûté ses lèvres. Il a répondu délicatement à mon baiser. Il a chuchoté : « Tu as encore un peu de forces à ce que je vois… ». Je l’ai regardé un peu inquiète : « Pas toi? ». Il a souri : « Il va te falloir être plus patiente cette fois, avec l’eau froide… ». J’ai éclaté de rire.

Il m’a alors emportée hors de l’eau et s’est assis dans les fougères en me gardant contre lui. Il a enlevé ce qu’il restait de mes vêtements en me caressant déposant des baisers par petites touches. Cette fois, j’ai sentis que quelque chose s’était débloqué en moi. Je me suis faite caressante et sensuelle. Na Djaï’tal m’avait permis de retrouver ce qui faisait de moi une homine. Je me suis enflammée retrouvant les gestes d’une amante pour un homin que j’avais perdus. Me sentant plus sûre de moi, lui aussi s’est laissé aller. L’extase nous a emportée une nouvelle fois, nous laissant stupéfié, le souffle court.

Il m’a ensuite portée jusqu’à l’eau pour de nouveaux jeux de gosses. Nos éclats de rire résonnaient sur les falaises des Chutes Mystiques. Nous sommes ressortis affamés. Nous avons dégusté ce qu’il avait acheté à Min-Cho, tout en plaisantant. Nous avons fini par nous endormir dans les bras l’un de l’autre épuisés par notre journée si riche en émotions et caresses partagées.

La goo

Ça avait commencé par une petite toux puis les cauchemars de Jalindra avaient repris. D’abord de vilains rêves où elle voyait des ombres agressives l’entourer. Je ne me suis pas inquiétée au début. Je pensais que ses cauchemars avaient repris à cause de la peur qu’elle avait eu de me perdre durant le Voyage. Mais ceux-ci devenaient de plus en plus terrifiants au fil des jours. Jalindra m’a alors appris que pendant les quelques heures où nous avions été séparées à cause de la réunion ranger. Elle avait fait une expédition avec d’autres apprentis rangers dans la kitinière et qu’elle était tombée avec d’autres dans de la goo. Sur les conseils de Zo’ro Argh, ils avaient brûlé tous les vêtements et les objets qui avaient été au contact de cette substance pour éviter toute contamination.

Je savais qu’Anyume détenait les carnets de Laofa et de ce qu’elle m’en avait dit, cette dernière avait fait des études sur différentes substances dont la goo. J’ai pris contact avec elle. Elle nous a décrit les symptômes qui pouvaient être liés à une contamination : des vertiges, de la toux, des problèmes de peau, des hallucinations, des changements de comportement, des douleurs… Jalindra avait bien une petite toux mais rien d’autres et ses cauchemars n’étaient pas des hallucinations. Anyume a été rassurante : elle disait que tout ceci pouvait tout à fait s’expliquer par d’autres raisons et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. De plus, les homins étaient en général très résistants à la contamination du fait de leur utilisation régulière des téléporteurs. Et même si sa toux et ses cauchemars étaient les symptômes annonciateurs d’une contamination, celle-ci était récente et pouvait très bien être enrayée. Elle nous a donné alors des conseils de base pour ralentir, voir supprimer l’évolution : se laver abondamment et vider l’eau dans les Landes obscures (un lieu contaminé par la goo) et utiliser régulièrement les téléporteurs. Elle a même indiqué mais avec beaucoup de réticences qu’il était possible qu’une résurrection pouvait suffire à guérir de la maladie. Mais elle ne conseillait pas de le faire volontairement : on était jamais sûr de la volonté des kamis à vouloir accepter notre requête de résurrection. Elle a ensuite préparé une affiche qu’elle a placardé à l’entrée de la kitinière d’Almati pour que tous puissent être prévenus. Je l’avais quittée avec un drôle de sentiment : à la fois rassurée par ses paroles et en même temps avec une boule d’angoisse dans la gorge parce qu’elle n’avait pas dit que les symptômes de Jalindra ne ressemblait pas à ceux d’une contamination par la goo.

Et puis, il y a eu ce jour terrible alors que nous marchions vers frère arbre pour aller dormir, elle a eu des visions : des ombres qui tentaient de l’entraîner. J’ai su qu’elle était contaminée. J’ai complètement paniqué, lui hurlant de revenir près de moi, cherchant du regard les ombres qu’elle semblait voir, leur demandant de laisser Jalindra. Je suppose que c’est ma panique qui l’a fait revenir à la réalité. Elle était là, à nouveau, m’enveloppant de ses bras, m’affirmant que c’était fini. Pourtant, l’une comme l’autre, nous savions qu’il ne s’agissait que du début… Il fallait absolument qu’elle se soigne.

J’ai envoyé des izams d’appels à l’aide à Na Djaï’tal et Anyume. Mon petit arbre bleu a répondu toute de suite, il ne pouvait pas nous rejoindre mais nous a conseillées d’aller trouver l’éveillée zoraï Fey-Lin au plus vite. Nous avons suivi ses conseils et demandé audience à celle-ci. Elle était à Jen-Laï. Quand nous sommes arrivées, elle était en grande discussion avec un fyros Thols. J’essayais d’attendre patiemment la fin de leur discussion mais mon attitude a du interpeller Fey-Lin. Et elle s’est inquiétée de savoir ce que nous voulions.

Nous avons expliqué sommairement que nous pensions que certains aspirants rangers avaient dû être contaminés, évitant de dire que Jalindra qui était à côté d’eux devait l’être assurément. Leur réaction nous a glacé. Pour eux, il fallait isoler tous ceux qui étaient contaminés car la contamination pouvait se transmettre par l’intermédiaire de tous les « fluides » que leur corps rejetaient. Nous avons blêmi… Il était évident dans ce cas que j’avais été contaminée. Et quand nous avons demandé comment nous pouvions, les guérir. Ils ont eu des airs dubitatifs. Pour eux, ça n’était pas possible à part peut-être avec une purge totale de leur corps mais tous les fluides qu’ils rejetaient devait être emmagasinés dans un récipient spécial pour être ensuite placé dans un endroit déjà contaminé par la goo. Nous sommes reparties de là effondrées. Jalindra se sentait horriblement coupable de m’avoir sans doute contaminée. Mais moi, à vrai dire, ça ne me dérangeait pas… au moins… je partirais avec elle. Et si il fallait nous isoler à tout jamais, nous le ferions ensembles. Jalindra a bien essayer de résister un instant à ma tendresse sous prétexte de me protéger mais çà nous était impossible d’envisager de ne plus nous embrasser, nous câliner.

Le lendemain nous avons retrouvé Anyume en lui expliquant ce que nous avait dit Fey-Lin et Thols. Elle était furieuse contre eux. Elle disait que les homins et en particulier les zoraïs avaient tellement peur de la goo qu’ils ne cherchaient même pas à l’étudier et disaient des énormités à son sujet. D’après les carnets de Laofa, les risques de contamination inter-homins étaient faibles voir nuls. Mais, elle était inquiète des symptômes de Jalindra. Aussi, elle nous a proposé une expédition au point du milieu pour nous purifier avec de la sève pure. Nous sommes retrouvées dans cette étrange endroit des Terres Abandonnées.

Jalindra et moi, nous étions arrivées en premières et en l’attendant, nous nous sommes plongées dans le lac de sève pour nous amuser un peu. C’est alors que nous avons reçu un izam d’Anyume : « Sautez pas dans la mare ! On prend la sève et on se frotte avec ! Et après on ira faire trempette! ». Jalindra et moi, nous nous sommes regardées avant d’éclater de rire : nous étions au milieu du lac de sève. Nous avons couru jusqu’au bord pour essayer de faire ce que nous dictait Anyume. C’est alors que nous avons vu quelqu’un arriver devant nous qui nous a salué d’une voix grave : « Bankun jeunes fyrettes! C’est 150 000 dappers la taxe dans la zone ! ». Puis, nous avons entendu un grand éclat de rire sous le casque. C’était Anyume qui avait tenté de nous faire peur. Nous avons toutes les trois éclatées de rire.

Anyume est redevenue sérieuse : « Bien, à présent il ne faut pas faire n’importe quoi. La goo et la sève ont une relation étrange. Elles se combattent et se nourrissent en même temps. Nous sommes ici sur une des artères de sève d’Atys. Si elle se faisait contaminer par la goo, ce serait comme réveiller le Dragon. L’apocalypse des karavaniers… ». Nous n’étions pas très rassurées par ses paroles. Je sentais Jalindra tendue et j’ai caressé tendrement son dos. Elle a demandé inquiète : « Et comment on fait? pour ne pas contaminer? ». Anyume s’est mise à rougir : « Je… heu, vous avez eu l’occasion déjà de vous examiner en détail mutuellement ? Il faudrait… vérifier s’il n’y a pas de lésions cutanées. ». Jalindra a dit doucement : « Heu.. non je n’ai rien remarqué. ». Anyume m’a regardée : « Tu l’as bien examiné ? Partout ? ». Je n’ai pas pu m’empêcher de pouffer à cette question : « Oui, oui… partout… partout… ». Anyume est devenue rouge pivoine.

Elle a commencé à fouiller dans son sac pour se redonner une contenance : « J’ai mis du temps à venir, je devais me procurer quelques trucs… ». Elle a sorti un fiole avec un liquide vert très pale. Elle m’a demandé : « Est-ce que Jalindra s’énerve facilement ces temps-ci ? ». J’ai secoué la tête : « Non… elle a surtout peur de m’avoir contaminée à cause du mélange de nos… « fuildes » comme à dit Fey-Lin ». Elle m’a rassuré : « Ne t’inquiète pas Shaakya. Visiblement il n’y a quasi pas de risque. C’était une des grandes craintes de Laofa. Elle était très amoureuse… et craignait de contaminer son amant. Pendant longtemps elle s’est forcée à la chasteté à cause de ça. Et puis ses études ont fini par la rassurer et aussi son amant… ». J’ai fait une moue dubitative : « Oui mais nous la chasteté… ce n’est pas notre truc hein… ». Elle a ri : « Je me doute que vous n’êtes pas chastes, dur de résister au charme de Shaakya ! ». Je me suis mise à rougir craignant un peu la réaction de Jalindra mais celle-ci a souri : « Je confirme ». Puis, elle a dit sur un ton plus inquiet : « Je m’inquiète de la contaminer, je m’inquiète de m’en prendre à elle, je m’inquiète de perdre la raison… ». Anyume a acquiescé : « Tu as raison de craindre la folie Jalindra. C’est le pire, avec la douleur. ».

Elle a hésité puis a finalement tendu la fiole à Jalindra : « Bois-en la moitié, même si c’est ignoble ». Jalindra s’est bouchée le nez pour avaler la mixture. Elle a pâli essayant visiblement de ne pas tout revomir. Je me suis sentie mal quand Anyume a dit : « Shaakya, bois ce qui reste. ». J’ai essayé de protester : « Mais je croyais que je n’étais pas censée être contaminée? ». Mais, elle a dit : « On ne sait jamais! ». J’ai pris la bouteille et j’ai commencé à boire. C’était répugnant : « BOUARKKKKK!!! ». Mon cri de dégoût a du s’entendre sur tout Atys. Anyume et Jalindra ont éclaté de rire.

Puis Anyume a lancé : « Bien, maintenant, en petite tenue, on va nager un peu ! ». Je n’étais pas sûre d’avoir compris : « Tu veux dire… toutes nues ? ». Elle a acquiescé avant de se déshabiller et se jeter dans le lac de sève. Nous nous sommes jetées dans la sève à sa suite en nous tenant la main. Nous sommes restées quelques minutes ainsi nageant dans le lac. Anyume a fini par dire : « Si on reste trop longtemps, ça décape. Là, ça devrait agir en partie avec ce que vous avez avalé… vous allez vous mettre en phase avec Atys et expulser ce qui reste de goo, si tout va bien… ».

Nous sommes alors sorties de la sève pour nous présenter devant le Maître Kami du Point du milieu. Anyume l’a salué : « Ari’kami. Nous venons combattre le Fléau. Je vous demande votre soutien pour lutter contre lui. ». Nous sommes assises en cercle devant lui en nous tenant la main. La situation était plutôt comique : nous étions à moitié nue devant un Maître Kami. Anyume s’est mise à rire : « Si un foreur ou un croyant passe, on aura l’air malignes! Mais tant pis! Sans Na Djaï’tal physiquement ici, je ne vois pas comment me débrouiller autrement… On ne va pas plonger dans le Chant d’Atys. Je ne suis pas assez experte pour ça. On va juste tenter une purification. Elle est déjà bien entamée… La goo est désordre, néant, destruction et chaos, à la fois dans les corps et les esprits. Pour la combattre, il faut donc laisser la paix venir et nous habiter. C’est un des meilleurs lieux pour ça… Ici, on peut entendre battre le cœur d’Atys… ».

Elle a fermé les yeux en expirant profondément, semblant rayonner d’énergie. Jalindra restait sérieuse semblant tenter de faire le vide dans son esprit. Et moi, j’avais une envie folle de rigoler. Anyume a dit d’une voix douce : « Pensez à des choses agréables et sereines. Essayez d’être en harmonie avec le monde… d’entendre le Chant et de joindre votre voix à sa mélodie. ». Elle m’a regardée en souriant. J’essayais désespérément de me retenir de rire. Elle a dit doucement : « Ne te retiens pas! Le rire est un des rythmes du Chant, un des meilleurs. ». J’ai éclaté de rire incapable de me retenir plus. Jalindra a été prise d’un fou rire communicatif et finalement Anyume s’est mise à rire elle aussi. Nous avons fini par pleurer de rire.

Puis, nous avons repris petit à petit notre calme, essuyant nos larmes. Nous étions sur le point de nous rhabiller pour nous rendre vers les chutes mystiques du pays zoraï quand un vorax agressif s’est jeté sur nous. Les gardes kamis ont riposté pour nous défendre pendant que nous nous jetions dans le lac de sève pour nous mettre à l’abri. Je regardais cet étrange ballet des sorts jetés sur le vorax et celui-ci qui répliquait à coups de dents. Anyume a commenté ce combat : « C’est une allégorie de la lutte contre le chaos ! ».

Nous nous sommes rhabillées ensuite pour nous rendre aux Chutes mystiques. Arrivées là bas, Anyume a regardé la cascade avec une expression indéfinissable. Quand à moi, j’ai rougi en reconnaissant l’endroit. C’était là que Na Djaï’tal m’avait emmenée après que nous soyons devenus amants, là où j’avais osé pour la première fois avoir les gestes d’une amante envers un homin après ce que j’avais vécu. Anyume nous a dit de nous rincer et nous frotter pour enlever la sève qui était restée sur nous. Elle avait un regard mélancolique quand on a essayé de savoir ce qu’elle avait, elle a juste répondu : « Je n’étais pas revenue depuis… Très longtemps… ».

Elle restait pensive puis elle a dit soudain : « Je vais peut-être vous laisser là… c’est un endroit apprécié des amoureux ! En théorie, ce qu’on a fait devrait suffire. Si ce n’est pas le cas… alors ce sera très mauvais. Si jamais il y a de nouveaux des symptômes cela voudra dire qu’il n’y a plus rien à faire, à part prier… et même là… Et si c’est le cas, la NASA a des protocoles pour aider à lutter contre la démence et la douleur. Mais une chose très importante : si l’une de vous se révèle contaminée, sans espoir de retour, elle devra garder le secret. Je veux dire : sa compagne peut savoir, la NASA aussi, du moins la branche goo mais évitez que ça s’ébruite. Vous l’avez vu avec Fey-lin : la goo est mal comprise, mal acceptée… Elle met des gens biens à l’écart de tout. Laofa pensait que cette ostracisation faisait partie de la progression de la démence… Il est important de protéger les gens atteints de ces préjugés absurdes. ». Elle a pris un visage plus souriant : « Mais ça devrait bien se passer à présent ! L’Écorce chantait avec nous tout à l’heure, elle riait de la blague… il n’y a pas de raison que ça évolue mal. Par contre, tu vas peut-être tousser plus ces jours-ci, et avoir un peu faim ! Prenez soin de vous deux… Je file ! dormez bien ! ». Elle a remis ses bottes. Je l’ai remerciée avant d’embrasser son front. Elle a déchiré un pacte avant de disparaitre.

J’ai proposé à Jalindra de dormir ici. Elle a accepté trouvant le lieu magnifique avec ses fleurs de printemps. Nous avons parlé des souvenirs que j’avais de Na Djaï’tal à cet endroit, juste avant que je m’enfuie dans la kitinière pour la première fois. Puis, Jalindra a reparlé de ce que nous venions de vivre : « Je me suis sentie comme une paria avec Fey-lin… j’avais juste peur d’avoir une vision au mauvais moment! Et là, Anyume m’a offert une vie de bonheur à tes côtés. ». J’ai souri : « J’aurais vécu une vie de paria avec toi tu sais! ». Elle a hoché la tête : « Je sais mon amour… et ça rendait les choses encore plus difficiles, quelques part… ». Je l’ai caressée tendrement : « Finalement on va devenir vieilles ensemble! ». Elle a murmuré : « La vie est tellement plus belle ici. ». J’ai murmuré en la serrant contre moi : « La vie est tellement plus belle avec toi… ». Nous nous sommes câlinées tendrement avant de nous endormir.

Les jours suivants, il n’y avait plus aucun symptôme. Anyume avait guéri Jalindra et peut-être moi également. Je pensais à cette mystérieuse zoraï, Laofa que j’avais cherchée et qui m’avait fait découvrir Anyume. Ses carnets avaient sans doute sauvé la vie de Jalindra. Je ne sais pas si elle m’a entendue mais j’ai laissé le vent d’Atys emporter mes remerciements en espérant qu’elle les reçoive de là où elle était.

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