J’ai rencontré Quazar lors de la seconde disparition de Magazran. Je pensais qu’il était un nouvel arrivant mais apparemment il était dans l’ombre et le silence depuis un certains temps déjà. Je me suis intéressée à lui. C’est au cours d’un marché organisé par la Confrérie d’Illumen dans la cité de Pierre Blanche que notre relation a réellement débutée.

Nous faisions le tour des étals, de nombreux aventuriers s’étaient déplacés. Je me suis arrêtée à celui d’un bijoutier. Je crois qu’il s’agissait du pâle Zurin. Il nous montra un médaillon en argent gravé d’une araignée. Quazar, voyant mon intérêt pour cet ouvrage finement travaillé, l’acheta et me l’offrit. Appréciant beaucoup ce présent, je l’ai entraîné à la taverne la plus proche, nous sommes monté dans une chambre et je l’ai remercié à ma manière. Il est rare que je sois aussi directe mais il faut croire que l’absence de Magazran déréglait mes principes.

Nous étions devenus amants depuis ce jour. Il était mon ‘zar’ssin et j’étais sa ‘rya’ssin. Nous passions beaucoup de temps ensemble à discuter de lui, son passé, ce qu’il avait perdu et ce qu’il comptait retrouver. J’avais envie de l’aider à redevenir le grand guerrier qu’il avait été avant d’être dépossédé de ses moyens sur les îlots. Je lui fournissais ce qu’il voulait quand il le demandait. Je le soutenais moralement, l’encourageais.

En retour, il s’est beaucoup investit dans le peuple quelque peu fragilisé par le départ des plus anciens de mes sœurs et frères. Il a impulsé le retour à la réflexion sur la rénovation de Naralik. Pour mener à bien sa mission, il me demanda de lui donner un titre de Lig’Ylith pour avoir suffisamment de légitimité pour conduire le projet. Il traça des plans ambitieux et magnifiques et organisa des séances de travail en commun pour le financement.

Je commençais à peine à me rendre compte de l’ambition dévorante dont il souffrait. Ce sont les réflexions de certains sombres qui me fit réaliser mon erreur, notamment celles acerbes d’Elzeberith. Elle me reprochait de l’avoir promu juste parce qu’il était mon amant. Je m’en défendais mais avec le recul, finalement, j’ai cédé à sa demande alors qu’il n’avait pas encore fait ses preuves comme les autres Lig’Ylith. Et je lui ai laissé trop de marge de manœuvre, j’avais trop confiance en lui.

Mon manque de discernement ne tarda pas à porter ses mauvais fruits. Quazar était un sombre obstiné, voulant toujours avoir raison. Ses plans posaient problème au service d’architectes du Palais mais il ne voulait vraisemblablement pas écouter leurs critiques. Si bien qu’il me fallut l’écarter du projet sous peine de voir réduit à néant nos espoirs de reconstruction.

La fierté du sombre en prit un coup, il n’a jamais supporté d’être écarté comme un déchet. Il est vrai que je n’ai pas pris des pincettes mais j’étais furieuse. Il s’est exilé de lui même disparaissant pendant longtemps. Nul besoin de préciser que notre relation était terminée dès lors que je l’avais dessaisit du projet.

J’ai attendu espérant qu’il se calme et qu’il prenne conscience des risques qu’il nous avait fait prendre. Mais il ne revint que plein de rancœur avec l’envie de me voir tomber en bas de mon trône. De nombreuses rumeurs couraient sur sa volonté de former un groupe de rebelles au sein des Elfes Noirs pour arriver à ses fins et prendre le pouvoir pour lui même. Soit les rumeurs étaient infondées, soit il n’acquit jamais la puissance nécessaire, car je suis toujours en place sans qu’il ne m’aie jamais inquiétée de près ou de loin. Constatant qu’il ne changeait pas de position, je pris la décision de lui ôter tous ses titres et responsabilités au sein du peuple. Il n’a pas été bannit car les rumeurs n’ont pas été avérées par des preuves.

Il me sembla pourtant s’être calmé en entrant dans la Confrérie d’Illumen. Il retrouvait un nouveau groupe pour se plaindre de moi et vanter ses mérites d’antant. Il eut la chance que la Gilde marchande traverse une crise dans ses instances dirigeante. Il accéda au rang de Maître. Il avait enfin du « pouvoir ». En tant que tel, il se permit de m’inviter dans leur bâtiment de Gilde pour demander mon autorisation de prendre des guerriers sombres comme gardes de la Confrérie. Je l’ai fais argumenter encore et encore, juste pour l’agacer et le voir perdre le contrôle devant moi. Il resta courtois malgré tout, comme s’il était un sombre solitaire mais respectueux de sa Matriarche et des traditions.

Quelques mois plus tard, il fut remplacé à la tête de la Gilde par VinceHood et n’arbora plus leur insigne. Je me suis toujours demandée s’il avait été jeté dehors pour ses décisions aberrantes pour une Gilde de marchands ou s’il était parti vexé de se faire encore rabaisser par sa nouvelle famille.

Les quelques mois qui suivirent, il s’engagea chez les Patrouilleurs. Il se fit plus discret. Bien qu’il ne ratait pas une occasion de se mettre en avant lors d’invasions, même s’il ne pouvait y participer car trop faible, ou quand les Natifs demandait de l’aide.

Cela fait maintenant plusieurs mois que je n’entends plus parler de lui. Je ne le regrette pas. Je regrette juste de m’être laissée séduire si facilement, d’avoir eu si peu de recul. J’ai appris une bonne leçon grâce à lui. Ne jamais laisser un amant croire qu’il devient mon second parce qu’il est dans mon lit, ne jamais laisser croire aux sombres que cela peut être le cas. Les enseignements que j’ai reçu dans mon enfance prennent leur sens maintenant. Je regrette de ne pas avoir davantage cru en mes tutrices dans le clan Norhen Dagha. Depuis cette histoire pénible, je ne prends plus d’amants officiels, j’évite d’en prendre chez les sombres, je garde le flou sur mes relations privées. Je n’en reçois pas moins de critiques mais la hiérarchie reste en place.

Du jour où j’ai rencontré Quazar au jour de son départ, il ne redevint jamais le grand guerrier invincible dont il me parla à l’époque. Il n’était même toujours pas aussi fort que moi. Il avait besoin d’être admiré, mais comme il n’était pas capable de ses ambitions, il ne vivait que dans le passé mettant en avant un temps révolu qui ne reviendrai jamais. Les Landes mettent à l’épreuve. Il a échoué.

« »