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Les légions fyros

Un jour, Oudline m’a fait remarquer qu’il portait désormais le même écusson que Naacre. Il s’agissait de l’écusson d’une guilde : Les légions fyros. Il m’a expliqué qu’il avait obtenu tout récemment la citoyenneté fyros après avoir accomplis une série de missions que les responsables de mon peuple, lui avait demandé de réaliser. En tant que matis, il avait eu bien plus à prouver qu’un simple fyros.

Cette étape était une condition obligatoire pour entrer au sein de la guilde de sa cousine Naacre. Il m’a demandé presque timidement, si j’allais le rejoindre. Les légions fyros étaient une guilde militaire entièrement dévouée à la défense du territoire fyros. J’étais dubitative… Entrer dans une organisation militaire ne me plaisait pas vraiment. Il a insisté, s’inquiétant de ma protection quand il n’était pas là. Son côté protecteur était touchant et j’ai fini par accepter.

C’est là bas que j’ai rencontré pour la première fois Glorf, Dinomir, Morandy et Eeri. Tous trois étaient fyros comme moi. Glorf était le chef de la guilde. Il était du genre bourru. Dans les combats, il préférait je crois « foncer dans le tas » avec sa hache à deux mains. Plus réservé, Dinomir était quand à lui un grand magicien aussi bien dans la magie curative que destructrice. Morandy était quand à lui beaucoup plus discret que les autres mais comme tous les membres de la guilde, il était toujours près à aller au combat. Quand à Eeri, elle était à la fois magicienne et combattante. Nous nous sommes tout de suite entendue. Elle était toujours prête à partir en expédition, au combat ou à la taverne de Pyr. Nous nous entraînions souvent ensemble : moi j’avais besoin de m’améliorer en combat et elle en magie.

Quand Oudline n’était pas là occupé à d’autres activités, je passais la plupart de mon temps avec elle. Est ce que c’est cette affection que j’avais pour Eeri, qui a fait peur à Oudline? Il savait qu’il m’était arrivé d’avoir des liaisons avec des homines. Un soir alors que nous étions à la taverne, nous y avons croisé Eeri. Celle-ci voulait me faire goûter à toutes sortes d’alcool comme de la bière de shooki. Oudline désapprouvait déclarant qu’elle allait me pervertir. J’ai secoué la tête stupéfaite. Celui-ci me connaissait donc bien mal. Comment pouvait il affirmer cela ? Me croyait il si naïve ? Sans doute était ce de ma faute : je ne lui avais jusqu’ici, montré qu’un aspect de ma personnalité : le côté naïf et doux. Pourtant, il m’arrivait d’être aussi agressive qu’un gingo et aussi piquante qu’une slaveni.

Oudline a fini par vouloir aller se coucher mais je ne l’ai pas suivi, je voulais rester encore un peu et puis j’étais agacée par l’impression qu’il ne me voyait que comme une douce zoraï un peu sotte. Comme il s’étonnait que je ne le suive pas, j’ai dit en plaisantant que Eeri et moi, nous allions faire des choses innommables dés qu’il aurait le dos tourné. Et Eeri a bien sûr renchéri pendant que Oudline quittait la taverne en nous souhaitant une bonne nuit. Tout ceci n’était que plaisanterie. J’ai d’ailleurs quitté moi aussi la taverne peu de temps après. Mais, je crois que cet incident l’avait bien plus blessé que je ne l’imaginais.

Quelques jours plus tard, la guilde a organisé une expédition pour Thesos, une ville fyros perdue dans le désert. Quand je suis arrivée, toute la guilde était rassemblée à la taverne de Pyr. Oudline était déjà là. Nous sommes partis très vite. La route était longue et dangereuse. Je savais que la guilde organisait surtout cette expédition pour moi afin que je puisse accéder au téléporteur de Thesos, pour ainsi par la suite, pouvoir me rendre plus facilement dans cette ville. Ils étaient là pour m’escorter et me guider aux travers des dangers qui allaient jalonner la route.

C’est avec pas mal d’appréhension que je les ai suivi. J’étais plutôt maladroite ne sachant pas trop me comporter lors des combats : devais je fuir ? ou devais je tenter d’aider avec mes faibles compétences aux risques de prendre un coup et d’obliger les soigneurs à me relever les détournant des combattants? J’ai préféré la deuxième solution même si je n’étais pas fière quand une créature finissait par se retourner contre moi et me mettait à terre en un coup…

Nous avons fini par arriver à Thesos. Terres très excentrées de tout, entourées de zones peuplées de créatures dangereuses et agressives : varynx et ocyx en tête. Mais, elle avait l’avantage d’avoir une superbe taverne au dessus de l’eau. C’est là que nous avons fait une halte. Oudline a commencé à me faire remarquer que je ne l’avais pas embrassé. Je trouvais la remarque un peu déplacée dans ce contexte d’expédition. Je lui ai répondu que j’étais plutôt réticente en général à exprimer mon affection en public et qu’en l’occurence nous n’avions pas eu le temps de nous retrouver seul avant le départ. C’est là qu’il a commencé à dire qu’il n’aimait pas beaucoup être en groupe et préférait de beaucoup être seul avec moi. Je ne sais pourquoi j’ai ressenti cette petite reflexion comme un étau qui se refermait sur moi. J’avais l’impression qu’il ne me voulait qu’à lui et que çà le dérangeait que j’apprécie d’être avec d’autres personnes que lui…

Glorf a alors proposé de continuer pour rejoindre Zora la capitale Zoraï. Oudline a alors déclaré qu’il allait s’arrêter ici, qu’il était trop fatigué pour continuer. Dinomir s’est arrêté là aussi. J’hésitais : si je poursuivais la route avec la guilde j’avais peur que Oudline ne le prenne comme un rejet mais j’avais vraiment très envie de continuer et découvrir le pays jungle. Je me suis finalement dit qu’il allait bien falloir qu’il s’habitue à mon besoin de liberté et de découverte si il voulait rester avec moi. J’ai annoncé que je continuais la route.

Glorf et Eeri semblaient heureux de me voir continuer avec eux mais j’ai vu Oudline tiquer. Il a commencer à me dire que Eeri était un homin manqué et qu’elle avait parfois des véritables attitudes d’homins… Je ne comprenais pas… et alors? qu’est çà avait à voir avec l’expédition? Il n’a pas vraiment répondu et s’est éloigné en me souhaitant une bonne nuit.

J’ai haussé les épaules et je me suis mise en route avec Eeri et Glorf. Je ne me souviens absolument pas de la route que nous avons prise… Je sais que plus d’une fois, il a fallu sprinter pour passer aux travers de groupes de créatures qui trouvaient la viande d’homins à leur goût. Glorf faisait ce qu’il pouvait pour nous protéger mais il a été plus d’une fois débordé. Mais après bien des résurrections, Zora était en vue.

Drôle de ville… aucune porte, aucune ruelle… une ville complètement ouverte difficile à défendre contre des invasions. Mais, on m’a expliqué que c’était volontaire. Cette façon de construire était du au massacre qu’il y avait eu dans l’ancienne capitale Zoran pendant le Grand Essaim. Des milliers de zoraïs étaient morts piétinés poussés par la panique que provoquait l’arrivée des armées de Kitins et par des portes trop étroites…

Je me suis endormie sur place épuisée et légèrement tracassée par les réactions qui me semblaient étranges d’Oudline.

Rupture

A mon réveil, je repensais à ce qu’il s’était passé la veille. J’avais une impression de malaise. Oudline était il jaloux d’Eeri ? Voulait il m’enchaîner à lui ? Je détestais çà.

Je suis finalement restée plusieurs jours sans chercher à le voir ou à le contacter. C’est finalement lui qui a rompu le silence qu’il y avait entre nous. J’ai répondu à son bonjour sans vraiment d’enthousiasme. Hypersensible comme il est, il l’a tout de suite senti. Il m’a alors reproché de ne pas avoir l’air très heureuse de l’entendre.

Que devais je lui répondre? Lui mentir et laisser ce malaise entre nous pour ne pas le blesser ou lui dire la vérité sur ce que je ressentais? J’ai finalement opté pour la deuxième solution. Après tout, il m’avait déclaré dés les premières jours de notre liaison qui ne fallait laisser aucun malentendu entre nous.

J’ai donc commencé à lui avouer que je n’avais pas beaucoup aimé sa « petite crise de jalousie » avec Eeri. Je n’ai pas eu le temps de continuer et d’approfondir, il s’est mis dans une colère violente, déclarant que nous allions arrêter là et que désormais chacun vivrait sa vie de son côté…

J’étais stupéfaite. Lui qui, il y a quelques jours encore, me déclarait que j’étais « l’homine de sa vie », qu’il voulait que nous habitions dans un appartement commun et qui avait même suggéré que nous ayons un petit homin, provoquait soudain notre rupture à notre première dispute… J’avais toujours trouvé bien trop prématuré toutes ses déclarations, moi qui avait été déjà brûlée plusieurs fois par mes différentes liaisons, mais il avait une telle fraîcheur et une telle naïveté dans son amour que j’avais eu envie d’y croire.

Je n’ai pas cherché à le retenir. A quoi bon? Je me rendais compte que sa passion était bien trop violente par rapport à ce que je pouvais supporter. J’aurais tenté de raccrocher les morceaux, ils se seraient brisés à nouveau plus tard. J’étais amère d’avoir encore cru en une histoire déjà morte alors qu’elle venait tout juste de naître. Je savais que les jours qui allaient suivre seraient particulièrement difficiles sans ses conseils et sans la protection de Naacre mais je m’étais longtemps débrouillée seule sur Silan avant de le rencontrer. Il suffisait de recommencer ici. Mais il est vrai que maintenant, je regrettais d’avoir quitter Silan pour lui, laissant Kyam derrière moi.

Je ne sais si cette rupture l’a blessé au point de le rendre agressif mais les jours qui ont suivi, m’ont plutôt conforté dans l’idée que notre rupture n’était finalement pas une si mauvaise chose. Des rumeurs, de plus en plus insistantes, indiquaient que des kitines faisaient leur apparition un peu partout. Oudline s’est mis à crier qu’il fallait fuir, ne plus rester ici que nous allions tous mourir… Glorf a tenté de le convaincre que même si ces rumeurs s’avéraient vraies, il resterait jusqu’au bout quoiqu’il advienne. Quand, j’ai indiqué que j’étais d’accord avec notre chef de guilde, Oudline a eu des paroles amères : « et bien sûr vous avez le même avis… ». Il a finalement déclaré qu’il quittait la guilde préférant ne pas saper l’ambiance trop optimiste qui y régnait. Naacre l’a suivi de peu, approuvant les paroles de son cousin.

Je me demande encore si notre rupture n’a pas provoquée celle qu’il a eu avec les légions fyros… possible… peut-être qu’il préférait ne plus m’y croiser…

Le concours de beauté de Miss et Mister Atys

Eeri m’avait invitée à venir assister au concours de beauté de Miss et Mister Atys. Je dois dire qu’au début je ne voyais pas vraiment l’intérêt mais Eeri m’a convaincue en me disant que le but était de se moquer des matis qui ne manqueraient pas de participer tellement ils étaient obnubilés par leur apparence.

Ça n’a pas manqué. Ils étaient là en nombre. La plupart étaient imbus d’eux mêmes persuadés qu’ils étaient les plus beaux. Nous ne manquions pas de nous moquer allègrement d’eux sur les ondes télépathiques de la guilde. C’était d’ailleurs assez comique de voir ses « aristocrates » incapables d’aligner une phrase sans faire d’énormes fautes de langage. La plus comique a été celle qui se prenait pour je ne sais qui et qui regardait d’un air supérieur les spectateurs, les menaçant si ils osaient se moquer d’elle. Eeri et moi nous avons éclaté de rire sur nos ondes de guilde après avoir feint un bâillement suite à cette intervention.

Il n’y en a eu qu’une seule qui a attiré mon attention, Angeline, je crois qu’elle s’appelait. Contrairement aux autres, elle était douce, presque timide, osant à peine parler. C’est la seule qui semblait ouvertes aux autres. Elle a d’ailleurs salué dans les quatre langues d’Atys tous ceux qui étaient présents avec parfois un accent qui était assez touchant. Je suis finalement partie m’ennuyant de voir ce défilé de bellâtres.

J’aurais sans doute du rester car la suite a été des plus comiques. Eeri et Glorf ayant décidé de défiler ensembles eux aussi. C’est Eeri qui a raconté cela dans notre réfectoire de légion. Ils se sont avancés tous deux en petite tenue portant le slip rouge de la légion. Glorf a commencé par un discours où il affirmait que Eeri et lui avaient décidé de ne pas concourir certains qu’ils étaient de gagner, tellement ils étaient des canons de beauté et d’intelligence rehaussés par leur magnifique « slibard rouge ».

Puis, il a commencé à chanter une chanson accompagné par Eeri à la guitare qui restera je crois à la postérité!!!

« Mon beau slibaaard, roi des slibaaards
que j’aimeuuuh, ta rougeeeeureeeeeuh
Quand par l’été, fyretteuuuh et tryketteuuuuuh
Sont dépouillés de leurs attraiiiiits
Mon beau slibaaaard, roi des slibaaaarrds
Tu deviens tout duuuuuur !

Toi que le désert apporta chez nouuus,
Au saiint anniverssaire,
Jolis slibaaaards, comme ils sont douuux,
Et tes bouboules, et tes joujouuuuuux !
Toi que le déert apporta chez nouuuus,
par ton ancêtre le calbaaaar

Mon beau slibaaard tes rougeuuux piqueeeeets,
Et leur fidèles poiiiiiils
Sur les fyrettes ne mentent jamaiiiis,
De la dureté et de l’amouuuuuur
Mon beau slibaaaaards, tes rougeuux piqueeeets,
m’offrent la force et la beautééééé »

Je crois que les juges en sont restés éberlués, tandis que les spectateurs éclataient de rire.

Je ne sais qui a finalement gagné à ce concours, çà ne m’intéressait pas vraiment mais pour moi Eeri et Glorf auraient mérité de devenir Miss et Mister Atys, rien que pour le spectacle qu’ils avaient donné. Il me reste en tout cas de cette manifestation, des souvenirs de rires partagés avec Eeri et Glorf et surtout les magnifiques feux d’artifices qui ont suivi la dernière journée de présentation.

Les premiers que je voyais… j’en ai encore les yeux émerveillés.

Morandy

J’ai apprécié Morandy, dés la première fois où je l’ai rencontré. J’aimais son caractère doux et mesuré et surtout l’attention et la générosité qu’il avait constamment envers les autres. Je ne pensais pas au début qu’il m’appréciait. Je m’imaginais un peu trop délurée pour quelqu’un d’aussi pondéré que lui. Mais je me trompais.

J’ai commencé à remarquer qu’il faisait constamment attention à moi, restant à mes côtés la plupart du temps lors de nos expéditions. Je pensais qu’avec sa générosité, il ne faisait çà que pour protéger la plus faible de la troupe. C’était d’ailleurs sans doute le cas au début. Mais au fil des jours, une douce amitié est née entre nous.

Je me souviens de ce concours de combat auquel il m’avait gentiment conviée, m’expliquant où il se situait. Je n’ai pas beaucoup de souvenirs des combattants mais c’est ce jour là, je ne sais pourquoi, que j’ai remarqué le beau mâle fyros qu’il était. Sans doute parce que j’étais un peu en retrait derrière lui et que je ne me gênais pas pour observer à loisir sa musculature puissante. J’ai finalement secoué là tête en me disant que je n’étais pas là pour çà mais pour regarder les combats. C’est pendant que j’avais détourné le regard qu’il s’est éclipsé.

Le concours avait fini par l’ennuyer et il était parti en compagnie de Guyzmo pour une expédition vers les primes racines. J’étais un peu déçue qu’il ne m’ait pas invitée mais après tout, je comprenais : j’étais une charge pour des combattants plutôt qu’une aide. Je me suis alors rendue dans le hall de notre guilde. Morandy m’avait demandé de regarder si je trouvais une arme et une armure à ma convenance. Malheureusement, il n’y avait rien qui pouvait m’aller… Dépitée, j’ai fini par annoncer sur les ondes de la guilde que j’allais me saouler à la taverne avant d’aller rouler sous la table.

Morandy a réagi immédiatement semblant inquiet à ma grande surprise. En fait, il n’était pas encore parti en expédition ayant rencontré une ancienne connaissance. Il m’a déclaré qu’il serait heureux que je les rejoigne si j’en avait envie. Je me suis précipitée ne finissant pas le verre de bière de shooki que j’avais commencé. Heureusement que Eeri n’avait pas vu çà, sinon elle m’aurait copieusement sermonnée pour ce crime!

Elle était là quand je suis arrivée d’ailleurs. Nous sommes partis presque immédiatement. Notre petite troupe cherchait à trouver le nommé des yelks. Mais nous avons été décimés par une patrouille de kitines qui est revenue à la charge à plusieurs reprises. Nous nous en sommes sortis que grâce à l’intervention d’une matis. C’était un peu honteux pour des légionnaires fyros.

Quelques jours plus tard, Morandy m’a demandé si j’avais finalement trouvé mon bonheur dans le hall de la guilde. Je lui ai avoué que ce n’était pas le cas. Il m’a réprimandée pour ne pas lui avoir dit plus tôt. Mais de mon côté, je ne voulais déranger personne. Il a secoué la tête déclarant qu’il allait me faire lui-même une armure. Il a pris mes mesures me faisant essayer différents types pour que je choisisse la forme qui me convenait le mieux. J’ai opté pour une armure moyenne de type fyros sauf pour le pantalon dont la coupe ne me plaisait pas. J’ai choisi le short tryker que j’avais appris à apprécier après que l’instructeur de récolte de Silan m’en ait offert un.

Je pensais que çà allait être tout mais Morandy m’a demandée de choisir la couleur de mon armure. Je l’ai regardé surprise : je pouvais vraiment ? Il m’a souri amusé de ma naïveté. J’ai osé à peine dire que j’aimais le rouge et le bleu, et que l’une des deux couleurs m’iraient très bien. Il m’a demandé de préciser : quelles parties rouges et quelles parties bleus? Je l’ai regardé à nouveau un peu interloquée : çà aussi je pouvais choisir? J’ai alors recommencé quelques essayages sur des armures de bases alternant les teintes même si aucune n’étaient rouges ou bleues. Je me rendais soudain compte que peut-être j’exagérais de profiter de la gentillesse de Morandy : le rouge et le bleu étaient des teintes assez rares, les couleurs les plus courantes étant le vert et le brun. Mais celui-ci attendait ma réponse, j’ai donc choisi du rouge pour le gilet et le short et le reste en bleu. Morandy est alors parti très vite pour récolter ce qu’il lui manquait pour réaliser mon armure. J’ai demandé timidement, si je pouvais aider à quelque chose, sachant très bien que mes faibles compétences ne pourraient lui être d’aucune aide. Il m’a déclaré qu’il allait se débrouiller.

Il est revenu peu de temps après avec mon armure magnifique entre les mains. Elle étaient encore plus belle que ce que je ne m’étais imaginée. Le bleu et le rouge étaient rehaussés par de jolies formes arrondies oranges.

Je ne l’ai plus jamais quitté sauf pour la nettoyer consciencieusement tous les soirs.

Une autre fois Morandy m’a demandé si il y avait des lieux inconnus où je voulais aller mais comme je lui ai fait remarqué, si il s’agissait de lieux inconnus je pouvais difficilement lui dire que je voulais m’y rendre. Il a approuvé ma déclaration en riant. J’ai ensuite ajouté que grâce au pouvoir de l’atrium qui nous donnait accès à tous les téléporteurs, il y avait beaucoup de lieux que je connaissais déjà. Il semblait déçu. J’ai compris que peut-être il souhaitait que nous nous promenions ensembles… Je me suis alors rattrapée en déclarant que beaucoup d’endroits me restaient inconnus parce que tout simplement des créatures agressives m’empêchaient d’aller beaucoup plus loin que l’endroit où j’avais été téléportée. Il a retrouvé le sourire me proposant de découvrir des endroits qu’il appréciait particulièrement.

Je l’ai suivi heureuse pour une fois de n’être qu’avec lui. Il m’a d’abord conduite dans le désert matis. Nous n’étions que tous les deux pour traverser les zones dangereuses non sécurisés et je dois dire que je n’étais pas très rassurée. Je ne voulais pas que par ma faute et mon inexpérience nous nous retrouvions tous les deux morts sans personne pour nous sauver. Mais Morandy était rassurant affirmant que j’étais une bonne soigneuse… La confiance qu’il avait en moi me rassérénait et me donnait envie de me surpasser pour lui. Il s’en est même voulu à un moment de me demander autant d’efforts pour le soigner. Il est vrai qu’il ne lui suffisait que d’un sort pour me remettre d’aplomb alors que j’étais obligée de les multiplier pour faire disparaître ses blessures. Cette fois c’est moi qui l’ai rassuré, affirmant que j’adorais lancer des sorts. Je n’ai pas osé ajouter surtout si c’était lui qui était l’objet de mes soins.

Nous avons fini par arriver dans un endroit magnifique appelé, les sources cachées, où trois cascades se jetaient dans un gouffre rempli d’eau.

J’en suis restée sans voix pendant de longues minutes. Morandy ne disait rien me laissant apprécier. Revenue de mon état semi-rêveur, j’ai pris plusieurs luciogrammes pour qu’il me reste des souvenirs de ce lieu si magique, si jamais je ne pouvais y retourner.

Puis, Morandy m’a proposée de continuer. Il voulait me montrer sa piscine privée. Elle était située dans les nexus, je crois. Apparemment, tout comme moi, il aimait nager et être loin de tout. Là bas, nous nous sommes amusés comme des enfants : faisant la course d’un bout à l’autre de « sa piscine ». Je crois qu’il me laissait gagner volontairement. Je riais.

A un moment, il a glissé sur une pierre un peu plus moussue que les autres et m’a donné un coup en tentant de se rattraper. J’ai fait mine de me défendre et je me suis mise en garde. Nous avons alors commencé une petite bagarre de gosses mal élevés. Je me suis finalement arrêtée quand je me suis rendue compte qu’il ne répondait plus à mes coups. Je lui ai souri. Le temps s’est arrêté un instant pendant que nous nous regardions en silence. J’aurais du sans doute à ce moment là, faire ce qui m’avait traversé l’esprit : me jeter dans ses bras et l’embrasser tendrement sur la joue. Mais une fois de plus, je n’ai pas osé…

Nous sommes rentrés sur Pyr. Il m’a offert un bâton en forme de sucre d’orge que j’ai adoré. Il pouvait même servir d’arme. J’ai failli lui sauter au cou pour le remercier mais une fois de plus quelque chose m’a retenue. Nous sommes ensuite aller voir un feu d’artifice. Étrange scène : toute l’hominité semblait être réunie là comme si il s’agissait des derniers jours heureux avant l’arrivée des kitines.

Nous étions l’un à côté de l’autre. Parfois mon bras effleurait le sien provoquant un frisson le long de mon échine. Je m’imaginais lui prendre la main mais ce n’était qu’un rêve. Trop de fois brûlée par les flammes de l’amour, je n’osais plus faire le premier pas.

Nous sommes ensuite retournés sur Pyr. Il m’a offert des dappers pour que je m’achète un appartement… A quoi bon lui ai je dis? Avec l’invasion kitine en cours, je prenais le risque qu’il soit détruit et puis j’avais toujours préféré dormir au milieu du désert. Il m’a avoué que lui aussi et qu’il dormait rarement dans le sien mais il avait l’avantage de lui permettre de stocker ses biens. J’ai fini par accepter. Il m’a montré son immeuble, c’était également celui d’Eeri que nous avons croisé à ce moment là. J’ai acheté mon appartement et je les ai invités tous les deux à venir « chez moi ».

Puis, j’ai demandé à Morandy si il voulait nous montrer le sien. Il a accepté. Eeri et moi, nous nous sommes un peu moquées de sa méthode de rangement : presque tous ses bibelots étaient à terre. Il y en a d’ailleurs un qui m’a fait beaucoup rire : c’était un yubo avec de drôles de cornes sur la tête affublé d’un chapeau rouge. Eeri est retournée dans son appartement nous laissant seuls.

J’ai demandé timidement à Morandy si je pouvais dormir chez lui n’ayant encore aucun meuble chez moi. Il a accepté avec un sourire. Nous nous sommes endormis ainsi l’un près de l’autre comme des amis sans nous toucher.

Je me sentais bien et rassurée près de lui. J’ai basculé rapidement dans de doux rêves en me demandant ce que l’avenir nous réserverait : resterions nous à jamais des amis ou est ce que nous passerions le cap un jour qui nous mènerait à la douce chaleur de l’amour?

Exode

Ca y était! Les grands de ce monde l’avaient décidé. L’hominité allait devoir fuir devant la menace de l’invasion de kitines que l’on appelait désormais le deuxième Grand Essaim. Les barrières installées par les Kamis et la Karavane ne suffiraient pas à endiguer le flot des créatures. Les kitines étaient déjà là aux portes de Pyr tentant de percer la défense. Tous les peuples avaient réussi à s’entendre. Seule la faction du clans des maraudeurs avait refusé de fuir préférant lutter contre l’invasion.

Tous les homins devaient se retrouver à Pyr, où le chemin de l’exode, nous mènerait à l’oasis secrète des Kamis. De là, un « arc-en-ciel » devrait nous transporter jusqu’aux anciennes terres. Pour le moment, il fallait participer à l’effort en aidant au rapatriement des mektoubs de ceux qui le souhaitaient vers Pyr.

Sylve avait trois mektoubs à rapatrier de Dyron vers Pyr. Nous allions l’escorter ainsi que tous ceux qui avait laissé leurs montures là bas. Finalement, moi aussi, j’allais un peu faire ma route de l’eau… Même si j’aurais préféré d’autres circonstances. La route s’est assez bien déroulée. J’ai juste été blessée par une goari alors que j’étais en queue de peloton. Heureusement, Eeri et Sylve m’ont vue en difficulté et sont revenues sur leurs pas en appelant les autres à l’aide. Ce petit incident m’a fait comprendre bien malgré moi que la position la plus sécurisée était au milieu de la troupe et non à ses extrémités.

Quelques jours plus tard, c’était l’heure du départ. Glorf nous a fait un discours :
« Légionnaires ! Ce soir nous ne connaîtrons pas la peur !
Légionnaires ! Ce soir nous ne connaîtrons pas la crainte !
Légionnaires ! Ce soir notre bras sera puissant !
Légionnaires ! Ce soir nous ne faillirons pas !
Légionnaires ! Ce soir nous connaîtrons l’espoir !
Légionnaires ! Ce soir nous nous battons pour tout ce que nous avons toujours défendu !
Légionnaires ! Ce soir nous nous battrons comme un seul homin face à ces insectes !
Légionnaires ! Ce soir nous montrerons à l’écorce la puissance du sharük !
Légionnaires ! Notre nom ne sera pas oublié !
Légionnaires ! Que la flamme des Légions brûle à tout jamais dans le désert et que nous ne soyons pas qu’un nom dans un manuel d’histoire
Force et Gloire Légionnaires ! »

Ce discours qui avait galvanisé les autres légionnaires m’a fait froid dans le dos. « Nous ne connaîtrons pas la peur »? j’étais terrifiée. « Notre bras sera puissant! » ? Je savais que j’étais la plus faible du groupe et que j’étais incapable de faire ne serait ce qu’une égratignure à une kitine… Il me restait l’espoir… l’espoir de voir cet arc-en-ciel et que tous mes amis soient là avec moi pour le prendre.

Je me suis laissée entraîner à l’entrée de Pyr. J’étais impressionnée par le si grand nombre d’homins présents… Moi qui détestait la foule j’étais servie. Je cherchais Morandy et Eeri du regard. Ils étaient là non loin de moi. Il fallait que je reste près d’eux coûte que coûte. Nous avons formé des équipes, j’étais dans celle de Morandy et Eeri dans celle de Glorf.

J’ai sorti Ganesh de son étable. Je me sentais perdue dans ce brouhaha incessant. Puis les premiers rangs ont commencé à se mettre en mouvement. J’ai suivi. Je n’avais de toutes façons pas le choix poussée par la foule derrière moi. J’essayais de rester au contact de Morandy et puis je l’ai perdu de vue. J’ai cherché Eeri du regard. Elle non plus n’était plus là. Le convois s’est soudain arrêté.

Puis j’ai entendu Glorf beugler de le rejoindre pour ne pas laisser l’empereur Fyros sans garde rapprochée. J’ai compris que la longue file des exilés avait été séparée en deux. J’étais devant avec la première tandis que Glorf et les autres étaient restés en arrière. Que devais je faire? Les rejoindre au risque de traverser une longue zone sans aucune protection ou rester à les attendre? Ne les voyant pas arriver, j’ai tenté le tout pour le tout en retournant en arrière. Au moins, si je devais mourir, je serais moins loin d’eux…

C’est au détour d’une dune que j’ai failli entrer en collision avec l’Empereur Fyros lui-même : Dexton. Les légionnaires l’entouraient. J’ai poussé un soupire de soulagement : ils étaient tous là. Nous avons rejoint le deuxième convois, le dépassant même pour aller en première ligne sous l’impulsion de l’Empereur. La première partie du voyage dans les dunes s’est déroulé sans vraiment de problème. Les pauvres bestioles qui tentaient de s’attaquer à la marée homine étaient laminées. Mais nous savions que le plus dur rester à venir : la traversée du couloir brûlé.

Nous les avons vu devant nous elles étaient là bloquant le passage vers l’oasis Kami, semblant nous attendre. Un énorme rassemblement de kitines menaçantes. Il n’y a pas eu de réflexion. A quoi bon? C’était le seul passage. Avec un courage désespéré, l’hominité a chargé droit devant, fonçant dans la masse compacte de dards, de pinces et de mandibules acérées. Cette fois, je suis restée au contact des autres légionnaires, leur lançant continuellement des dons de sèves ou de vies. Je faisais de mon mieux pour être leur soutient et non pas une charge. J’essayais de rester non loin de la paroi de la falaise, évitant ainsi de me faire surprendre par l’arrière. Et puis j’ai entendu l’annonce : l’Empereur Dexton était tombé. Il gisait mort. C’était la stupéfaction. Pourquoi n’arrivions nous plus à le ressusciter malgré tous nos essais?

C’est quand j’ai regardé autour de moi que j’ai compris… De l’immense foule du début, il ne restait plus que la moitié. Les corps homins gisaient tout autours de ceux qui étaient encore debout. La terre brûlée se gorgeant de leur sang. L’horrible vue des kitines dévorant les nôtres était insoutenable. Le bruit de leurs mandibules broyant leurs os m’a donné la nausée. Les résurrections n’étaient plus possibles, les kamis avaient été débordés par les si nombreuses morts en si peu de temps… Ils n’arrivaient plus à régénérer la graine de vie des homins.

Et puis Glorf est passé de la stupeur à la rage s’enfonçant dans les troupes ennemies, comme inconscient du danger. Lui qui avait été si proche de son Empereur ne pouvait supporter sa mort. Nous n’avions d’autres choix que de le suivre pour ne pas qu’il succombe lui aussi ouvrant ainsi un chemin aux travers des kitines.

Nous étions presque en vue de l’oasis quand une masse jaunâtre s’est précipitée sur moi. Un troupeau de shalahs sans doute paniqués avait foncé droit devant, piétinant tout sur leur passage, pour échapper aux combats que se livraient les homins et les kitines. Mes os se sont brisés sous leur masse. J’ai senti mon esprit s’échapper de mon corps… Je le voyais comme si mon esprit était suspendu au-dessus de lui. Est ce que j’allais mourir moi aussi comme l’Empereur Dexton et tous les autres? j’ai été envahie par la panique, attendant que quelqu’un m’offre un peu de sa vie…

Et puis Morandy est arrivé. Il m’a relevée. Je l’ai remercié par un sourire et j’ai regardé autour de moi. Je n’étais pas la seule à être tombée sous la charge des shalahs. Eeri se relevait elle aussi difficilement. Et puis, j’ai vu Ganesh… Il avait été piétiné, le mektoub de Eeri également. Nous les regardions toutes deux un peu abasourdies. Je me souviens qu’Eeri a demandé si il était possible de redonner vie à son mektoub. La réponse était négative. Je m’en voulais. Pourquoi l’avais je pris avec moi, alors que ce voyage était si dangereux. J’aurais du lui rendre sa liberté à Pyr… Au moins, il serait encore en vie.

Mais, il fallait continuer, le passage au travers des kitines se refermaient. Nous devions soutenir les combattants encore et encore. L’épuisement faisait ressentir ses effets. Je n’arrivais plus à suivre ne sachant plus à qui je devais offrir ma séve ou ma vie. Alors, je me suis concentrée sur les deux seules personnes que je ne voulais pas perdre : Eeri et Morandy.

Et puis, j’ai entendu Sylve crier « à l’oasis, à l’oasis!!! ». L’entrée était là à quelques pas. J’ai vu Eeri passer la barrière de pierres. J’ai souri un peu tristement, elle au moins était sauve. J’ai cherché Morandy. J’avais cru qu’il me suivait. Il n’était pas là… Je suis revenue sur mes pas en courant en l’appelant d’une voix angoissée : « Morandy! ». Il a crié lui aussi mon nom me permettant de le distinguer dans la masse des kitines qui l’entourait. Il était sur le point de défaillir. Mais il était loin, il a fallu que je m’approche au plus près des monstrueux insectes pour offrir de ma vie encore et encore…

J’entendais les cris d’appels à la retraite mais il était hors de question que je laisse Morandy. Quel sens aurait ma vie ensuite si je l’abandonnais au milieu des kitines? J’offrais ma vie et ma sève pour lui sans penser à autre chose que le sauver. Et puis, il est apparu réussissant à sortir de la masse. Je lui ai souri rassurée. Il m’a rendu mon sourire. Et puis son expression s’est soudain changée en peur et il a couru vers moi. De quoi avait il peur? Puis, j’ai compris qu’il regardait derrière moi. Je n’ai pas eu le temps de me retourner. Morandy m’avait poussée sur le côté mais j’ai senti le dard de la créature me transpercer le flanc, laissant une partie de son poison. Je suis tombée à genoux. Morandy avait lancé sa lance en avant prenant tous les risques transperçant lui aussi la kitine de part en part mais la bête avait déjà ressorti son dard de mon corps pour le lancer vers celui de son attaquant, l’enfonçant profondément dans son ventre avant de s’effondrer.

Morandy est tombé en arrière près de moi. Je me suis traînée près de lui. Tout n’était que brouillard, le poison envahissait mon sang. Mais, je voulais être à ses côtés. Est ce que quelqu’un était encore là pour nous sauver? Les kitines s’étaient détournées de nous poursuivant les derniers homins qui s’enfuyaient vers l’oasis. Je savais que Eeri était sauvée, Sylve également… Mais tous les autres? Où étaient Glorf, Dinomir, Rizel et Reen? Où était Lurtz qui était sorti de sa retraite pour combattre? Il n’y avait plus que nous ici, d’autres blessés qui gémissaient de douleur et tous ses morts. Je ne voulais pas entendre encore une fois l’horrible son que faisait les mandibules qui broyaient les os des homins, ni entendre les hurlements de ceux qui étaient dévorés vivants…

J’ai capté le regard de Morandy m’enfermant dans une bulle où il n’y avait plus que nous deux. Nous nous sommes pris la main matérialisant ainsi pour la première fois physiquement le lien qui nous unissait. Sa main était si douce et si chaude… Pourquoi n’avais je pas osé la prendre dans la mienne avant? Nous nous sommes souris. Nous savions tous les deux que nous allions mourir, le poison nous envahissait irrésistiblement. Sa blessure était bien plus profonde que la mienne… il allait mourir avant moi… Je serrais sa main, je ne voulais pas qu’il me laisse. Il semblait comprendre mon angoisse même si aucun mot n’avait été échangé. Il a embrassé ma main et m’a dit dans un murmure qu’il m’aimait. Je n’arrivais pas à répondre : ma gorge était bien trop nouée pour çà. Je n’ai réussi qu’à lui offrir un sourire retenant mes larmes de douleurs. Je ne voulais pas que la dernière image qu’il voit soit celle d’une homine en pleurs.

Ses yeux se sont fermés, sa main s’est faite flasque dans la mienne, mes larmes ont commencé à couler le long de mes joues. Je me suis allongée près de lui, me blottissant contre son cou. J’espère juste que je serais morte quand les kitines reviendront…

Shaakya

Je me nomme Shaakya. Je suis une fyros.

J’ai été élevée par les parents de ma cousine Kyshala quand les miens sont morts dans un accident. Ils étaient mineurs comme ceux à qui on a reproché d’avoir déclenché le Grand Essaim. Le travail était dangereux, ils le savaient. Mais les risques pris étaient compensés par la qualité de l’ambre découvert. Mais cette fois là, la racine qu’ils tentaient de retenir a cédé, les tuant sur le coup. Mon oncle, mineur lui aussi, m’a ramené dans sa famille.

Au début, j’étais une petite enfant sauvage, rebelle et douloureuse. Kyshala plus âgée que moi a su m’apaiser et m’apprivoiser. Je lui en ai voulu quand elle est partie à la surface. Mais, je savais que la vie dans les profondeurs lui pesait. Elle avait besoin de sortir de ce sentiment d’enfermement et de découvrir autre chose.

Les années se sont écoulées. Elle m’envoyait régulièrement des messages. Et puis, des incidents ont commencé à se produire. De plus en plus souvent, même dans les profondeurs, il arrivait de croiser des Kitines. Le père de Kyshala s’est fait tué par un de ces éclaireurs isolés. Et puis, il y a huit ans maintenant, les aventuriers sont revenus délaissant les nouvelles terres à la voracité des kitines… Du moins ce qu’il en restait. Ils avaient dû fuir empruntant un arc-en-ciel, la plupart était horriblement mutilés, très peu étaient indemnes.

La mère de Kyshala était une soigneuse. Elle soignait continuellement les nouveaux arrivants jusqu’à la limite de l’épuisement. Je passais mon temps à surveiller l’arrivée de Kyshala mais comme tant d’autres, elle n’est jamais revenue. Le flot des arrivants s’est tari plus personne ne venait. L’arc-en-ciel s’est refermé. Kyshala n’était pas là…

Sa mère a fini par retrouver une rescapée des légions Fyros : Eeri. Celle-ci était dans un état terrible. Quand on lui a demandé si elle connaissait Kyshala, elle a eu une expression douloureuse. Elle nous a expliqué que quand elle s’était rendue compte que son amie ne l’avait pas suivie dans l’abri de l’oasis secrète des Kamis, elle était retournée au delà de la barrière de protection. Elle n’a pas retrouvé son corps sans doute dévoré par les kitines. Il ne restait d’elle que son cube d’ambre.

Adolescente en rebellion continuelle, j’étais furieuse et pleine de rage, j’ai du traiter Eeri de tous les noms, lui reprochant de ne pas avoir sauvé ma cousine. La mère de Kyshala m’a giflé, me faisant taire. Je l’ai regardé stupéfaite. C’était la première fois qu’elle le faisait. J’ai vu la douleur sur son visage qui ressemblait tellement à la mienne. Mais, je n’ai pas voulu pleurer devant Eeri et je me suis enfuie.

J’ai fugué pendant des semaines, refusant de retourner auprès de celle qui m’avait élevée comme sa propre fille. Quand je me suis décidée, à revenir. C’était trop tard… Ma mère adoptive était morte d’épuisement d’avoir tant soigner les siens et sans doute, parce qu’elle n’avait plus envie de lutter. J’ai vu son corps qu’on emmenait au bûcher. Je crispais les mâchoires refusant de me laisser aller.

Et puis j’ai senti qu’on m’observait. C’était Eeri. Je lui ai lancé un regard haineux. Elle m’a fait signe de la rejoindre. Je me suis enfuie refusant la main qu’elle me tendait. Connaissant parfaitement, les recoins secrets des racines, je n’ai eu aucun mal à lui échapper malgrè ses tentatives pour m’attraper.

J’ai erré pendant plusieurs mois avec les gamins des rues : des orphelins comme moi dont on ne savait plus quoi faire. Ils étaient si nombreux, il y avait eu tellement de pertes homines. L’adolescente que j’étais, était heureuse d’être libre sans contrainte même si la faim me tenaillait parfois. Pourtant le soir, il m’arrivait de pleurer : le manque de chaleur homine, l’indifférence de certains, la violence et la cruauté des autres étaient une souffrance quotidienne.

Je regardais certains de mes compagnons d’infortune tentés par l’appel de la Goo… Les yeux émerveillés qu’ils avaient… Tout semblait plus facile avec cette substance. J’ai voulu essayer moi aussi. J’avais ma première boulette de Shooki gavée de Goo entre les mains. Je la regardais en me demandant si j’allais y goûter ou pas… Je savais qu’elle rendait dépendant mais je voulais juste ressentir un peu de bonheur même artificiel…

Une gifle monumentale m’a sortie de mon indécision, balançant au loin la boulette mauve. Eeri était là devant moi, pleine de rage contenue : « Kyshala ne serait pas fière de toi! ». Qu’est ce qu’elle en savait d’abord? Je me suis jetée sur elle pour la frapper. Mais que peut faire une adolescente face à une légionnaire aussi expérimentée. Elle m’a pris par le col me traînant jusqu’à une taverne, me jetant presque sur un tabouret et me mettant une choppe de bière de Shooki sous le nez : « Bois! ». Je l’ai regardé avec défi et j’ai bu d’un trait la choppe. Elle m’en a resservi une… ou plusieurs… je ne sais plus…

Je ne me souviens plus grand chose de cette soirée. Je suppose que j’ai du déverser toute ma rancoeur contre elle et tous ses légionnaires qui m’avaient pris ma cousine. Je crois aussi que j’ai beaucoup pleuré : la douleur de toutes les pertes que j’avais subi s’exprimant enfin. Le lendemain, un seau d’eau glacée m’a réveillée en sursaut : « Debout! ». J’ai regardé Eeri, éberluée par ce traitement qu’elle m’infligeait : « J’ai besoin d’une partenaire d’entrainement, et tu feras l’affaire, à défaut d’autres… ». Je la fixais incapable de comprendre, la tête dans un étau et la bouche pâteuse. Nous avons couru longtemps, jusqu’à mon épuisement complet. Je pensais que ce serait tout mais après çà a été l’entrainement au combat. Je suis retombée sur ma couche le soir exténuée sans même avoir mangé.

Le lendemain, çà a recommencé encore et encore. Je ne cherchais plus à lutter. J’encaissais ce qu’elle me faisait subir. Je savais qu’elle le faisait uniquement pour me sortir de mon état dépressif : la douleur du corps faisant oublier la douleur de l’âme. Mais, je suppose que cela lui faisait du bien à elle aussi qui avait perdu la plupart de ses amis légionnaires.

Les années ont passé. J’étais devenu adulte et bien plus apaisée que je n’avais été durant mon adolescence tourmentée. Eeri et moi étions devenues des amies. J’avais même adopté sa coiffure : les cheveux coupés au ras du crâne. Mais j’avais opté pour un tatouage couleur sang comme une marque des souffrances que j’avais subies.

Eeri ne m’avait jamais cachée qu’elle souhaitait faire renaître la Légion Fyros et reconquérir les terres perdues. Elle allait retourner à la surface. Elle m’a observée : « tu veux venir? ». Evidemment que je voulais venir : Eeri était devenue ma seule famille et je voulais suivre les pas de Kyshala. Et si je pouvais tuer quelques Kitines pour la venger, ce serait encore mieux. Eeri a eu un petit sourire.

Nous avons fait notre paquetage contenant nos maigres richesses et nous nous sommes mises en route.

Silan

Nous sommes arrivées à Silan qui était toujours le premier point d’ancrage des aventuriers à la surface. Eeri trépignait d’impatience de retourner à Pyr. Certains des légionnaires recrutés y étaient déjà. Après m’avoir entièrement équipé, elle a apposé un écusson des Légions Fyros sur l’armure qu’elle m’avait offerte sans vraiment me demander mon avis. J’aurais pu refuser mais je ne l’ai pas fait. Elle m’avait formée durant toutes ces années pour çà et je n’avais pas l’intention de la laisser réaliser son rêve de renaissance des légions fyros et de reconquêtes des territoires perdus d’Atys sans moi.

Elle m’a présentée à un nouveau légionnaire, un mâle fyros magnifique aux cheveux blonds roux : Ywan. Je suis tombé sous le charme tout de suite. Il était souriant, aimable et toujours prêt à rire. Eeri est partie pour Pyr nous laissant seuls avec un petit sourire en coin. Se doutait elle qu’Ywan me plaisait déjà ? En tout cas, j’étais heureuse de ne pas être seule pour mon apprentissage de la vie à la surface d’Atys.

Avec Ywan, nous avons découvert avec surprise que ma cousine Kyshala et son oncle Morandy se connaissaient. Ayant lu le cube d’ambre de Kyshala, je savais qu’ils avaient entretenu une relation d’une grande complicité. Peut-être aurait elle dérivée jusqu’à de l’amour si les kitines leurs en avaient laissé le temps ? Mais je n’ai pas osé en parler à Ywan. Nous nous sommes rendus aussi compte que nous faisions les mêmes rêves à leur propos : ils étaient enfermés dans une pièce sombre et appelaient quelqu’un. Pour Ywan, le nom que semblait appeler Morandy était celui de Kyshala. Tout ceci nous paraissait tellement étrange, mais que pouvions nous faire?

Nous avons commencé notre apprentissage auprès des instructeurs mais à vrai dire sans grande assiduité. Libérés de la pression des officiers légionnaires tous partis à Pyr, nous en profitions souvent pour paresser sous un champignon en parlant de choses et d’autres. Parfois, nous nous promenions montant sur les promontoires les plus hauts pour profiter de la vue. J’étais assez fière quand je lui ai fait découvrir la jungle de Silan qu’il ne connaissait pas. Il est vrai que le passage pour s’y rendre était difficilement visible et qu’il fallait savoir nager. C’est là que nous avons découvert nos premières kitines. Nous les avons massacrées avec beaucoup de plaisir comme une vengeance que nous offrions à Kyshala et Morandy.

Les jours ont passé. Nous passions tout notre temps ensemble. Ils nous arrivaient même parfois de nous endormir dans les bras l’un de l’autre comme deux enfants en manque d’affection. Pourtant, j’avais parfois l’impression d’imposer ma présence à Ywan. Je le laissais parfois seul pour ne pas qu’il me trouve trop envahissante ou collante mais il finissait toujours pas me réclamer pour ma plus grande joie. Ayant pris un peu d’avance sur lui en artisanat, je lui ai demandé un jour qu’elle était son arme préférée. Il m’a déclaré aimer combattre avec une pique. Je me suis alors empressée de trouver le plan de fabrication de cette arme auprès de l’instructeur et les meilleurs matériaux sur le marché. J’ai fabriqué pour lui ma première pique. Elle n’était pas très jolie, un peu cabossée par endroit mais elle était assez efficace pour taquiner des créatures. Quand je l’ai offerte à Ywan, il a paru très heureux. Il a même montré sa pique fièrement à un homin avec lequel il avait sympathisé.

Eeri a fini par nous contacter pour nous demander quand nous allions venir à Pyr. Nous lui manquions disait-elle. A vrai dire, elle me manquait à moi aussi. Mais il nous restait une dernière chose à faire sur Silan : vaincre le kirosta qui se terrait au fond de la jungle. C’était comme un rite de passage. Ceux qui avaient terrassé le kirosta étaient près à quitter Silan. Nous savions qu’à deux nous aurions un peu de mal à y parvenir. Aussi, nous nous sommes alliés à d’autres homins, empressés comme nous de vaincre la Bête. Nous y sommes parvenu sans vraiment trop de mal même si j’ai eu une frayeur quand j’ai vu Ywan s’effondrer. J’ai repensé à Kyshala qui n’avait plus eu de sève pour sauver Morandy quand ils ont été transpercés par cette kitine… J’ai chassé ces idées noires de ma tête et je l’ai soigné en espérant que jamais je ne vivrais ce qu’elle avait vécu lors de ce jour funeste. Le kirosta a fini par s’effondrer sous les coups.

Ywan et moi, nous nous sommes souris : nous étions prêt à partir pour Pyr.

Réveil brutal

Nous étions tout joyeux d’arriver à Pyr. Malgré notre épuisement, nous n’avons pas pu nous empêcher d’aller taquiner quelques Shookis devant les portes de la ville. Mais tellement empressés, nous faisions un peu n’importe quoi attaquant chacun une créature sans faire attention de prendre soin de l’autre. Nous avons alors failli succomber sous leur riposte collective. Ça nous a bien fait rire. Nous avons fini par nous trouver un coin pour la nuit. Ywan a basculé très vite dans le sommeil à mes côtés.

Mais, moi, je n’arrivais pas à m’endormir. Alors, je suis montée en haut d’une dune. Je respirais enfin l’air chaud du désert Fyros et plus cette odeur de moisissure des champignons de Silan. Je regardais l’immensité désertique en me disant que j’étais enfin chez moi. Je suis retournée me coucher près d’Ywan avec un sourire aux lèvres.

Le réveil a été brutal. Un « cal i selak » tonitruant a retenti près de moi, le chef de notre guilde Icus me saluait avec la salutation des légionnaires : le fameux « Force et gloire » en fyros. Ywan n’était plus là. Les yeux encore embués de sommeil, j’ai regardé éberluée les légionnaires entourer notre chef. Et c’était parti : la légion se mettait en ordre de bataille!

Les jours qui ont suivi, n’ont été que entraînements intensifs à n’en plus finir et de longues expéditions… encore et encore… Je croisais Ywan que pendant de brefs instants de répits. Eeri n’était pas souvent là, elle non plus. De nouveaux arrivants venaient tous les jours gonfler les rangs de la légion. Je me sentais perdue, ne sachant pas où était ma place. Moi qui avait pourtant déjà eu droit à l’entrainement des légionnaires avec Eeri dans les profondeurs, je me sentais complètement abrutie par ce traitement de choc. J’avais rêvé d’aventures, de découvertes et de grands espaces mais je me retrouvais comme oppressée par la pression que m’infligeait l’entrainement de la légion.

Toutefois, les moments que je préférais étaient les expéditions mais Ywan n’était pas là pour les partager avec moi. J’étais pourtant tellement heureuse de découvrir la taverne de Thesos où Kyshala était venue… Mais, nous nous sommes à peine arrêter. Il fallait déjà repartir cette fois pour Yrkanis la capitale des matis. Tout c’est fait au pas de course comme toujours… Un jeune fyros nous a suivi profitant de la force de frappe des légionnaires en mouvements. J’ai à peine vu les primes racines…Nous étions déjà dans les forêts pleines de champignons du pays matis. A un moment, quelqu’un a crié que le dernier arrivé à la taverne était un bébé matis: insulte suprême pour un fyros. La troupe s’est disloquée chacun courant le plus vite possible pour ne pas arriver dernier. Pour ma part, ne sachant absolument pas où se situait cette taverne, j’ai suivi Eeri. La connaissant, je savais qu’elle pouvait sentir l’odeur d’une taverne à dix kilomètre à la ronde. Mais au final, personne n’est allé là bas. La troupe s’est retrouvée devant l’intendante matis. Le but était de l’agacer le plus possible en refusant la citoyenneté matis. Au début, je trouvais le jeu amusant mais à force, je n’aimais pas ce manque de respect même envers une matis. Et quel était l’intérêt pour la guilde de se mettre déjà à dos les matis, je ne comprenais pas… Je me sentais une fois de plus en total décalage avec ce que j’avais pensé vivre ici. Heureusement, Eeri m’a déclaré par télépathie qu’elle trouvait elle aussi que tout ceci était exagéré. Elle considérait qu’elle avait bien l’intention de se servir de matis pour au moins leur pomper leurs dappers. Elle préférait donc garder des relations neutres avec eux. Au final, je suis retournée par téléporteur à Pyr complètement dépitée, oubliant de prendre un pacte pour pouvoir retourner à Yrkanis…

Les jours passaient. Ywan était toujours aussi absent. Eeri, en tant qu’officier, avait bien d’autres choses à s’occuper que de moi. Je me sentais très seule… Heureusement, j’ai rencontré une petite tryker Lyouna qui était venue s’installer à Pyr. Elle était enthousiaste et je l’ai aidé du mieux que j’ai pu. Elle a fini par vouloir intégrer les légions fyros, elle aussi… Je n’étais pas très enthousiaste pour qu’elle le fasse mais elle semblait tellement y tenir que j’ai donné un avis favorable à sa candidature. Elle m’a sautée au cou pour me remercier après que notre chef Icus lui ait remis son écusson de la légion.

Et puis, j’ai revu Ywan. Il semblait déprimé. Il n’avait plus envie de rien. Je crois qu’il pensait que tout serait facile, qu’il suivrait les traces de son oncle Morandy et qu’il deviendrait un grand magicien et un grand foreur comme lui. Mais la réalité était tout autre. Il était un jeune légionnaire débutant et même si il apprenait bien plus vite que moi, Atys ne faisait aucun cadeau à qui tentait de la défier… Il s’est endormi près du téléporteur kami de l’oasis d’Oflovak. Je l’ai quitté avec la gorge serrée… Allait il repartir et retourner dans les profondeurs?

Première réunion des légions fyros

Une nouvelle fois, j’ai été réveillée en sursaut d’un sommeil sans rêve. Icus appelait les légionnaires à la première réunion des nouvelles légions fyros.

C’est encore à moitié endormie que je me suis rendue dans notre hall de guilde. J’étais une des dernières à arriver et pourtant je savais où se situait notre immeuble contrairement à ceux arrivés après moi. Comme disait Icus, ce n’était pas difficile : c’était l’immeuble de guilde le plus proche de la taverne. Je me suis assise près de la porte en oubliant de saluer les présents. Eeri m’a fait un petit signe de la main auquel j’ai répondu avec un vague sourire. Si j’avais pu, je me serais assise près d’elle mais Kralis et Guyzion, l’entourait déjà. J’ai regardé un peu tristement l’assemblée : Ywan n’était pas là…

La réunion a commencé rapidement sous la direction d’Icus. Il allait nous falloir des uniformes. Depuis toujours, la légion arborait fièrement une armure fyros lourde rouge. Seuls certains anciens légionnaires, parmi ceux qui avait survécu au deuxième grand essaim avaient encore leur uniforme. Mais pour fabriquer des armures, il fallait des ingrédients. Un rendez-vous a été pris à Thesos pour organiser une récolte.

Puis, des expéditions allaient être à nouveau organisées pour Yrkanis, Zora et Fairhaven. Ceci afin de permettre à tous les légionnaires d’avoir accès aux télé-porteurs des capitales.

Depuis toujours la guilde avait été plutôt kamiste, mais cette fois, Icus semblait dubitatif sur cette orientation « religieuse ». Il semblait préférer une position plus neutre. Mais, l’avantage d’être dans les bonnes grâces des kamis, permettait d’avoir accès à leurs télé-porteurs. Toutefois, on entendait de plus en plus de rumeurs concernant la future apparition de télé-porteurs qui n’appartiendraient ni aux kamis, ni à la Karavane. La guilde allait restait neutre en attendant de plus amples informations.

Puis, les artisans de la guilde ont été choisis chacun avec une spécialité. Pour finir, les trois postes à responsabilité ont été distribués : Icus a conservé son rôle de chef, Maltor est devenu l’intendant et Eeri a été désignée diplomate. Ça m’a fait sourire : elle qui traînait dans les tavernes allait devoir apprendre à être sérieuse. Quoique comme elle le disait, la diplomatie pouvait commencer à la taverne!

La réunion s’est terminée. Je n’avais pas vraiment participé à part pour répondre aux questions qui étaient posées à tous. Je me sentais trop débutante parmi tous ses habitués de la surface. J’allais m’en aller quand Eeri m’a rattrapée pour me demander si je voulais quelque chose dans le hall de guilde. J’ai parlé de mes amplificateurs qui étaient devenus trop faibles pour les sorts que j’arrivais désormais à lancer. Elle m’a alors sorti un amplificateur correspondant à mon niveau de mage.

Après l’avoir remerciée, j’allais partir quand elle m’a demandé si je voulais faire quelque chose. J’étais heureuse : Eeri avait enfin un peu de temps pour moi. Nous sommes alors parties à la chasse aux bandits et aux créatures dangereuses pour sécuriser les alentours de Pyr à la demande d’un sergent de la garde. A vrai dire, c’était aussi pour gagner un peu de dappers qui étaient désormais si difficiles à gagner.

Ce soir là, je me suis endormie un peu rassérénée par la présence souriante et joyeuse de celle qui avait pris soin de moi après la mort de Kyshala.

La légion à la taverne

Je commençais à m’habituer à l’absence d’Ywan. Mais ce jour là, il est apparu. Et il semblait un peu plus motivé que la dernière fois où je l’avais croisé. Nous commencions à nous organiser pour trouver une activité quand Icus a demandé à tous les présents de se rendre à la fontaine de Pyr pour parler « recrutement ».

Ne sachant pas très bien ce qu’il voulait dire par là, nous nous sommes rendus sur place avec curiosité. Y avait il de nouveaux légionnaires à recruter? Voulait il nous parler d’une méthode de recrutement? Arrivés sur place, il n’y avait aucun nouveau légionnaire… J’ai commencé à soupçonner un coup fourré : Icus, allait-il nous demander de nettoyer les latrines de la guilde? Ywan s’est gentiment moqué de moi : Icus ne pouvait pas nous demander çà puisque nous étions des officiers. Je l’ai regardé un peu dubitative. J’étais un officier, moi ? Mais, il avait raison Icus avait nommé officier tous les actuels membres de la guilde. Pour moi, cela ne signifiait donc pas grand chose puisque si tout le monde était officier, Icus pouvait très bien nous demander de nettoyer les latrines. Ywan a finalement approuvé mes paroles en souriant.

Un fyros brun est alors apparu. Il avait fait sa demande d’intégration récemment et se nommait Acheran. J’ai poussé un soupir de soulagement, rassurée d’échapper à une corvée rébarbative. Icus a apposé solennellement l’écusson de la guilde sur l’armure d’Acheran après que celui-ci est juré fidélité à l’empire Fyros. Tout le monde l’a alors salué d’un « cal i selak » tonitruant. Puis quelqu’un a déclaré que les nouveaux devaient payer un verre à la taverne aux anciens. J’ai soupçonné Eeri d’être à l’origine de cette demande… Acheran a regardé son porte dappers avec angoisse, alors que tous l’entraînaient comme un seul homin dans la taverne de Lydix.

La fête a alors débuté. Mais alors qu’on en était encore à distribuer les verres, Icus a fait venir une deuxième candidate : Sifydia. Elle aussi a été intégrée officiellement à notre guilde. Deux recrutement dans la même journée, c’était beaucoup. J’ai regardé autour de moi et je me rendais compte que je ne connaissais pas tous les légionnaires présents. La guilde était en train de grandir très vite.

Pendant qu’Icus continuait son discours d’intégration, j’ai eu envie d’embêter un peu Eeri. Je me suis dirigée le plus discrètement possible vers le bar avec l’intention de lui subtiliser son verre. Mais, elle me connaissait bien. J’ai à peine eu le temps de faire la moitié du chemin qu’elle a couru jusqu’au bar pour récupérer son verre et le boire d’un trait. Je me suis moquée d’elle en affirmant qu’elle avait eu peur que je lui prenne.

Puis, j’ai pris deux verres et je me suis dirigée vers Ywan. Il m’avait avoué il y a peu qu’il n’avait jamais mis les pieds dans une taverne… J’étais restée stupéfaite. J’en avais même parlé à Eeri par télépathie ce jour là. Elle avait trouvé çà assez amusant je crois que moi qui finissait souvent mes soirées dans les tavernes puisse être amie avec un sage fyros qui ne buvait pas. J’ai offert un des deux verres à Ywan. Il l’a pris en le regardant avec appréhension. Il l’a même senti, légèrement angoissé. Et puis soudain, il l’a bu d’un trait. Je l’ai regardé ébahie. Sachant qu’il n’était pas habitué à l’alcool, j’avais peur que cela lui tourne la tête. Icus est alors arrivée derrière moi en me donnant une grande claque dans le dos manquant de me faire écrouler par terre : « C’est comme çà que les légionnaires boivent! ». J’étais assez d’accord en temps normal mais je m’inquiétais de l’effet que çà pourrait avoir sur Ywan lui qui n’en avait pas l’habitude. Mais à vrai dire, il a semblé assez bien supporter.

Dans le fond de la taverne, j’ai soudain aperçu Archlongine, la grande zoraï bleue de notre guilde partageant un calumet rempli d’une substance inconnue mais que j’avais très envie d’essayer. J’ai rejoint le cercle qui avait commencé à se former.

Le calumet passait de main en main. Ça a été à mon tour de goûter à cette drôle de substance dont les zoraïs avait le secret. Ils s’en servait la plupart du temps pour entrer en transe dans une sorte de rite religieux. Dans notre cas, il s’agissait surtout d’un moyen artificiel de s’évader. Au début, je n’ai rien ressenti de particulier. Puis, j’ai vu Ywan tomber de sommeil comme une masse. Le mélange alcool et fumée hallucinogène avait eu raison de lui. J’avais une sensation d’apesanteur assez agréable, comme si je flottais dans l’air.

Eeri s’est levée proposant une chasse à Zora. J’ai du la regarder avec un air stupide, ne comprenant pas tout ce qu’elle disait sur l’instant. Beaucoup ont alors quitté la taverne pour la suivre. Je n’avais de toutes façons pas de pacte pour Zora. Je suis restée pour profiter un peu plus du calumet. Soudain, j’ai entendu une voix derrière moi : c’était Eeri qui était revenue pour m’offrir des catalyseurs. J’ai souri stupidement l’esprit embrumée mais heureuse qu’elle prenne encore soin de sa petite Shaakya. J’ai voulu lui sauter dans les bras pour l’embrasser mais elle a disparu… Du coup, je ne sais si elle était une hallucination ou non. Puis, j’ai soudain vu une immense fyros toute bleue passer devant moi… J’ai crié ce que j’avais vu sur le canal de guilde. J’avais les yeux écarquillés mais la fyros bleue a disparu… Après coup, je crois que j’avais en fait juste vu Archlongine quitter la taverne.

Je sentais que mon état était anormal. Je me suis alors dirigée péniblement en me cognant partout vers la fontaine de la place. J’ai plongé ma tête dedans, risquant de me noyer et me relevant de justesse pour ensuite m’écrouler à côté de la fontaine incapable de bouger. Je crois que j’ai du reparler à Eeri qui devait me trouver très drôle. Je l’ai traitée de « vilaine » pour ne pas avoir voulu « mon bisou » et pour m’avoir trop fait boire, surtout que le bruit de l’eau de la fontaine qui coulait avait tendance à me donner envie de « faire pipi »… Elle a éclaté de rire. J’ai compris alors que je racontais n’importe quoi même si j’aimais assez l’entendre rire de mes bêtises. Je me suis finalement écroulée de sommeil dans la rue juste en face de la taverne.

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