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Où est ma place?

Cela faisait plusieurs jours déjà que je furetais à droite et à gauche dans les cubes d’ambre sans vraiment savoir ce que je cherchais. Sans doute que j’espérais y trouver une nouvelle direction à prendre dans ma vie d’homine.

Ces derniers jours m’avaient fait comprendre que je n’étais pas à ma place au sein des légions fyros. Je n’avais pas la même façon de penser ni les mêmes idéaux qu’eux. Mais qu’elle était ma place ? Défendre Atys mais comment?

Et puis je suis tombée sur des discussions sur les neutres de culte et civilisation. Je trouvais dans celles-ci comme une connivence d’esprit. Je découvrais ce qu’était les gnosts et les tenants. Les gnosts étaient ceux qui ne privilégiaient aucune religion Kami ou Karavan respectant les deux. Les tenants étaient ceux qui ne privilégiaient aucune « civilisation », ils étaient appréciés de la même façon par les peuples trykers, zoraïs, matis et fyros. Je me sentais très proche de ces deux définitions.

Et puis ce passage m’a soudainement frappé :

« La raison d’être des Rangers est de protéger les homins contre la menace kitine. Les Rangers sont animés par un idéal de fraternité. Ils pensent que les homins devraient vivre en paix sans division, estimant que les divisions entre homins ont été l’une des causes de la catastrophe du Grand Essaim, chaque peuple ayant lutté seul. »

Mais oui… c’est çà… J’étais une Ranger dans l’âme… J’avais trouvé ma voie… Je suis restée un instant stupéfaite par cette évidence.

Moi qui me croyais anormale, je découvrais que je n’étais pas seule et que d’autres partageaient les mêmes opinions que moi. Il me restait à les rencontrer.

Mais avant, j’avais quelque chose de difficile à faire : quitter les légions fyros… Je n’avais pas peur d’être seule et de perdre la protection de la guilde mais mon coeur se serrait à l’idée de blesser ou de décevoir ceux qui avaient cru faire de moi une légionnaire : Eeri, Icus, Ywan…

Déménagement

Ma décision était prise : je voulais être ranger. Il me restait à l’appliquer. Mais tout d’abord, j’allais déménager à Fairhaven : vivre dans le désert ardent et croiser des légionnaires m’auraient fait plus de mal que de bien. J’ai vendu tout ce qui ne m’était plus nécessaire et fabriqué tout ce que je pouvais avec les matières premières qu’il me restait. J’ai regardé la vieille armure ranger complètement usée que les Rangers de Silan m’avait offerte. Je l’avais gardé à l’abri dans les sacoches de mon mektoub. Je ne sais pourquoi mais je n’avais jamais réussi à m’en séparer. Et cette fois encore, je n’ai pas pu…

Je suis partie à dos de mektoub pour un long voyage que je n’avais jamais fait seule… Mais, je ne pouvais demander à personne de m’accompagner, tous mes amis faisaient partis de la guilde. Au départ, je voulais juste aller vers Dyron voir comment je me débrouillais. Et puis, j’ai tellement bien réussi ce premier voyage que j’ai pris confiance : j’allais au moins aller jusqu’à Zora. Mais pour çà, il fallait s’enfoncer dans les primes racines en traversant la zone appelée « Sources interdites ». Je savais que c’était la partie la plus difficile du voyage mais il allait falloir que je m’habitue à vivre seule et c’était une expérience que je rencontrerais souvent désormais.

J’ai vérifié que mon mektoub avait tout ce qu’il lui fallait en nourriture pour la traversée et je suis repartie. La partie dangereuse du nord de Dyron a été passée sans soucis. J’avais compris au fil des expéditions avec les légions fyros, que les bords de falaise étaient plus sécurisés et je gardais les yeux grand ouverts. Et enfin, j’ai vu le vortex d’entrée dans les primes racines.

J’ai poussé un soupir de soulagement : « Jusqu’ici tout va bien! ». Je regardais avec angoisse la beauté des sources interdites sachant très bien qu’il s’y cachait des créatures capables de me briser en deux en un seul coup.

J’ai pris deux grandes inspirations et je suis repartie. J’ai réussi à atteindre le milieu des sources interdites en passant inaperçue me faufilant entre les bestioles inamicales me cachant parmi les herbivores. Et puis, un zerx m’a pris en chasse réussissant à me donner un coup. J’ai paniqué fonçant droit devant pour lui échapper. Heureusement, mon mektoub était rapide. J’ai regardé derrière moi tout en continuant à galoper. J’ai souri le zerx avait été distancé.

J’ai recommencé à regarder devant moi pour me rendre compte avec horreur que je fonçais droit devant un groupe de tyranchas… Il était trop tard pour les éviter. Je n’avais pas le choix il ne me restait plus qu’à espérer passer au travers profitant de la vitesse de mon mektoub pour leur échapper…

Mais, je saignais abondamment déjà de la blessure que m’avait infligée le zerx. Il n’a fallu qu’un seul coup pour que je tombe. Je voyais le vortex de sortie quand un voile rouge est tombé sur mes yeux… la sortie était pourtant là tout près…

J’ai demandé une résurrection aux kamis près du vortex si proche, espérant que mon mektoub avait survécu. Mais quand je suis arrivée, je n’ai pu que constater que les tyranchas en avaient fait leur déjeuner. J’ai réussi à m’approcher pour au moins récupérer les affaires qu’il y avait dans les sacoches : la hache à deux mains qu’Eeri venait de m’offrir, le bâton sucre d’orge qu’on m’avait donné pendant les fêtes d’Anlor Winn… Mon sac a rapidement été plein. J’ai regardé longuement l’armure ranger… J’allais devoir la laisser ici. Pourquoi avais je les larmes aux yeux ? Ce n’était qu’une armure… Et puis, je me suis ressaisie. Ce n’est pas parce que je laissais l’armure ici que je ne deviendrais pas ranger! Elle était de toutes façons inutilisable désormais. J’ai enterré l’armure pour que personne ne la trouve. Après tout, c’était une belle fin pour une armure de ranger que de finir dans les primes racines, si proche des kitines.

Je me suis alors téléportée à ma destination finale : Fairhaven. J’ai racheté un nouveau mektoub. Celui-ci était gris et n’avait pas les couleurs sableuses du désert. J’ai fait quelques tours avec lui, il nageait très bien, normal pour un mektoub des lacs. C’était une brave bête autant que celui que j’avais perdu. J’espère que mes erreurs dans mes futures expéditions ne lui seront pas fatales à lui aussi…

Départ des légions fyros

Pendant plusieurs jours, je n’ai pas réussi à dire à Eeri la décision que j’avais prise de quitter la légion. Les mots me restaient coincés dans la gorge. Et quand elle me proposait d’aller prendre une armure lourde dans le hall de guilde, j’esquivais, déclarant que je le ferais plus tard.

Finalement, c’est Icus qui m’a contactée télépathiquement. Il avait vu les messages de demandes d’informations sur les rangers que j’avais laissé dans le hall réservé aux neutres. J’ai été surprise sur le moment mais j’ai compris ensuite ma bévue. Je pensais être discrète en laissant mon message mais je l’avais mis dans le hall réservé aux neutres de culte et pas de civilisation.Tous les légionnaires étaient pour le moment restés neutres au niveau religieux à la demande d’Icus. Cela avait d’ailleurs fait grincer des dents : ne prendre partie pour aucune religion, c’était se couper l’accès à un certain nombre de téléporteurs. Mais la règle avait été suivie.

Icus m’a alors indiqué le nom de quelques personnes qui avaient des connaissance sur les rangers. Son attention m’a touchée. Je me sentais mal de lui cacher mes intentions de départ. J’ai fini par lui raconter que j’avais participé à la libération des terres matis. Je m’attendais à une colère noire de sa part, à une punition, voir un bannissement… Mais, il n’en a rien été. Icus a émis un son entre un grognement et un toussotement gêné. Ne le voyant pas réagir, plus que çà, j’ai fini par déclarer que j’allais quitter les légions fyros mais que je voulais rendre mon écusson à celle qui l’avait apposé sur mon armure : Eeri. Il a répondu : « C’est mieux oui! ». J’étais inquiète, il semblait si éteint par la nouvelle. Je lui ai alors demandé si il m’en voulait. Il a répondu légèrement agacé que ce n’était pas le cas. La conversation s’est éteinte d’elle même… Je ne voyais plus vraiment quoi lui dire.

Quelques jours plus tard, pourtant, j’ai pu en apprendre un peu plus sur le fond de sa pensée. Pour lui, ma décision n’était qu’une lubie utopique du à mon jeune âge. Peut-être avait il raison… peut-être que je ne serais jamais ranger et que l’idéal de fraternité entre les peuples ne pourrait jamais être atteint… Mais ce dont j’étais sûre c’est que les kitines resteraient mon principal ennemi pour avoir tué mon oncle et avoir été la cause de la disparition de Kyshala. Et, il était également sûr désormais que je n’accepterais plus de faire partie d’une guilde qui attaquent d’autres homins avec comme seule justification qu’ils font partie d’un autre peuple…

C’est le lendemain que j’ai pu parler de mon départ des légions fyros à Eeri. Je me doutais qu’Icus ne tarderait pas à lui rapporter mes paroles. Quand je lui ai dit que je voulais devenir ranger comme les rangers de Silan. J’ai senti son angoisse. Elle a cru un moment, que je voulais retourner là-bas. Je l’ai rassurée, lui affirmant que je restais à la surface mais que je quittais les légions fyros. Elle l’a assez bien pris. Elle ne m’en voulait pas de faire mes propres choix, même si ils pouvaient s’avérer être mauvais. Quand je lui ai parlé de l’étrange réaction d’Icus, déclarant en riant qu’il se ramollissait pour ne pas m’avoir punie d’avoir aider les matis. Elle est restée sérieuse : « il aime bien ses deux chauves… ». Elle m’a demandé si j’allais rejoindre une autre guilde. Mais pour l’instant, je n’avais pris aucune décision. Je savais qu’il y avait le groupe Centor qui m’avait intégrée à leur équipe lors de libération des terres matis et qui semblait rangers dans l’âme. Il y avait aussi cette guilde Hoodo qui se déclarait ouvertement ranger mais dont je n’avais vu aucun membre… Peut-être avaient ils disparu durant le deuxième grand essaim ? Notre discussion a duré jusque tard dans la nuit. Eeri était loin, je n’ai pas eu le courage de me déplacer pour rendre mon écusson ce soir là.

Quelques jours plus tard, Eeri m’a invitée à une chasse avec d’autres légionnaires. Peut-être espérait elle encore me faire rester en me montrant ce qu’il y avait de mieux parmi la guilde : la fraternité des légionnaires entre eux. Il est vrai que durant ces chasses, j’avais toujours apprécié l’esprit de corps qui y régnait. Et cette fois encore, j’ai apprécié cette entraide sans concession que tous donnaient aux autres. Mais ma décision était prise. Pourtant, je sentais que Eeri faisait durer indéfiniment la chasse pour ne pas que je lui rende mon écusson. Quand je lui en ai fait la remarque. Elle m’a souri avec un petit air faussement innocent.

Finalement, la fatigue aidant, j’ai commencé à commettre des erreurs mettant en danger les autres. Il valait mieux que j’aille dormir. Quand, j’ai dit dépitée à Eeri que ce n’était pas encore aujourd’hui que j’allais lui rendre mon écusson. Elle a finalement déclaré que je pouvais le faire maintenant mais qu’elle me laissait l’annoncer aux autres. J’ai pris deux longues inspirations, un peu angoissée à l’idée que mes frères d’armes me rejettent pour la décision que j’avais prise de quitter la guilde.

Puis j’ai commencé : « J’ai une petite annonce à faire… Je vais quitter la guilde… ». Gunbra a reniflé comme si elle retenait des larmes et Zaydan m’a demandé en plaisantant si je quittais la guilde parce que je n’avais pas digéré le dernier bébé matis. J’ai répondu sur le même ton humoristique qu’effectivement, je n’avais pas apprécié le goût. Puis j’ai continué plus séieusement : « J’ai choisi une autre voie… Je voudrais devenir Ranger. Mais je tiens à dire que j’ai beaucoup apprécié faire ce bout de chemin avec vous. ». Il y a quelques questions sur ce qu’étaient les rangers. J’ai eu peur à des réactions négatives quand j’ai affirmé que en tant que ranger je défendrais tous les homins, même les matis. Mais Zaydan a déclaré : « Comme ça nous pourront l’achever nous! ». Et Bjorka a ajouté en crachant par terre : « Je lui attacherai les mains Zaydan que tu puisse faire ton oeuvre ». Ce qui m’a fait plutôt rire.

J’ai rendu mon écusson à Eeri et j’ai fait mes adieux même si ce n’en était pas vraiment puisque je restais sur l’écorce. Bjorka a semblé inquiet pour moi : « Attention à toi Shaakya, ta nouvelle mission pourra être dangereuse, beaucoup d’homins prennent des risques. A bientôt Shaakya, hésite pas si tu as besoin de mes soins et même de ma lame ! ». Et Gunbra a ajouté : « Ou de ma retch ». Eeri m’a réaffirmé que je serais toujours la bienvenue parmi eux. Je suis partie avec un brin de nostalgie mais le coeur heureux que mes frères d’armes aient accepté mon choix.

Première réunion de la N’ASA

Avec les explications d’Anyume, j’ai rejoint le bois d’Almati où avait lieu la réunion de la N’ASA (Nouvelle Académie des Sciences d’Atys). Je n’étais pas très rassurée de me retrouver dans cet endroit que je savais occupé par des kitines même si je m’étais déjà rendue sur place lors des fêtes d’Anlor Winn. Mais ce jour-là les abords avaient été sécurisés pour permettre à tous de participer et puis j’étais avec d’autres légionnaires.

Cette fois, j’étais seule… Mais, au final, j’ai traversé tout le bois sans rencontrer une seule kitine pour arriver au milieu du camp ranger… oui ranger!!! La dernière fois, je n’avais pas fait attention… Il y avait des rangers partout avec leurs armures blanches et vertes! Je sautais de joie : les rangers étaient là au bois d’Almati. En discutant avec certains d’entre eux, ils m’ont expliqué leur présence ici : ils surveillaient l’entrée de la kitinière. Je suis restée bouche bée : « la kitinière??? ». Je me souvenais des luciogrammes que Kyshala avait fait dans le nid des kitines. Mais dans son cube d’ambre, elle n’avait jamais parlé de la façon dont elle avait atterrit là bas… Les rangers étaient donc là en première ligne protégeant les homins des invasions kitines.

Alors que je discutais avec quelques rangers, j’ai vu Na Djaï’tal non loin de là. J’ai couru pour le rejoindre. Mais, je suis tombée en plein sur une scène que je n’aurais sans doute pas dû voir. Anyume avait sauté dans les bras du grand zoraï et celui-ci la serrait contre lui : « Woha la belle ! ». Auquel elle a répondu : « Bankun mon beau ! ». Ils se souriaient tendrement. Je trouvais la scène touchante. Et soudain, ils m’ont aperçu. Anyume s’est mise à rougir et la sève de Na Djaï’tal lui ai monté au masque… Du coup, je me sentais très gênée de les avoir dérangés. J’ai proposé de les laisser mais Anyume m’a retenue, elle était heureuse de me voir.

Nous étions en avance pour la réunion. Na Djaï’tal nous a alors raconté qu’il avait fait un tour dans la kitinière. Anyume et moi l’avons regardé comme si il avait perdu la tête. Il a alors sorti un petit sac et l’a ouvert devant nous. Il y avait des espèces de larves grouillantes et peu ragoutantes. Nous avons eu une grimace de dégoût. Que voulait il en faire? Les manger? Grillées çà pouvait être bon… Mais, le grand bleu ne savait pas encore ce qu’il allait en faire. Anyume était inquiète : « Manipuler des machins kitins, ça me parait risqué… Il faut juste les détruire, pas commencer à leur trouver une utilité ! ». Na Djaï’tal s’est moqué gentiment d’elle : « Tu as peur que je devienne un Kirosta ? ». Il a commencé à faire des grimaces en la piquant avec le doigt. Anyume s’est mise à rire. Puis elle a commencé à imiter la démarche d’une kitine. J’ai souri trouvant, une fois de plus, leur tendresse et leur complicité très touchantes. Cela ressemblait à un amour naissant, naïf et tendre comme celui que ne peuvent vivre que ceux qui n’ont pas déjà été brûlés par le feu de la passion… comme celui… non!!!
J’ai refermé violemment la boite de mes souvenirs les plus sombres…

L’heure de la réunion était arrivée. Nous étions tout près de l’entrée de la kitinière ce qui n’était pas très rassurant… Zo’ro Argh était déjà là ainsi que d’autres homins comme Mindae, la fière et belle matis rousse qui nous avait conduit dans les sources cachées. Zo’ro Argh a commencé et nous a rapidement présenté ce qu’était la N’ASA :
« Avant le second essaim, nous avions créé un traité de paix entre nations. En tant que scientifique, j’estimais que les accords politiques étaient insuffisants pour maîtriser les grands dangers : la goo, les kitines… Avec d’autres amis scientifiques nous nous sommes réunis pour trouver de nouvelles solutions. Il fallait un endroit neutre dans tous les sens pour permettre la créativité. Ici, dans l’ASA, nous mettons de côté nos divergences politiques et religieuses.
Notre première règle est de respecter toute intelligence… et donc de ne pas critiquer les idées d’un chercheur. Certaines peuvent être « folles » : par exemple certains espèrent « apprivoiser » les kitins, d’autres espère détruire la goo par fermentation… Et il y a plein d’autre idées de ce style… En plus, parfois nous étudions d’autres choses pour le bien être de tous ou tout simplement pour la science.
Hélas, le second essaim nous frappa avant que l’on ait trouvé comment maîtriser les kitines. Mais, l’ASA devait renaître de ses cendres et réunir encore plus les homins chercheurs: c’est devenu aujourd’hui la Nouvelle… ASA… la N’ASA « .

Zo’ro Argh a proposé ensuite à chacun de se présenter. La zoraï Fey-Lin a commencé : elle était déjà là quand l’ASA existait encore et s’est portée volontaire pour faire partir du groupe d’éthique chargé de surveiller les agissement des scientifique de la N’ASA.

Puis, la tryker Krill s’est présentée sans oublier de boire un longue gorgée à la gourde qu’elle avait emportée. Elle se définissait comme une amie de l’ASA et ne comptait pas être une scientifique sauf si une branche Alcool était montée. Ca m’a fait beaucoup rire.

Les présentations continuaient alors que je remarquais la matis à côté de moi : une peau d’une pâleur extrême mais surtout elle était chauve enfin… pas vraiment chauve… les cheveux coupés aussi courts que moi… C’était la première fois que je voyais une matis ainsi coiffée. Quand j’en ai fait la remarque à Anyume, elle a dit : « Je trouve ça étrange… Toi aussi en fait. Pourquoi couper aussi court ? ». J’ai bafouillé une vague explication peu convaincante, j’avais copié la coiffure d’Eeri et puis c’était plus facile les cheveux courts quand on était légionnaire… Mais au fond de moi, je savais que je me mentais à moi même. Anyume a fini par déclaré que cela m’allait bien en fait et que çà se mariait bien avec mon tatouage.

La présentation de la matis chauve a été très succincte, elle se nommait Dirae et était venue en curieuse. Elle a déclaré avec un ton légèrement hautin : « Je me demande toujours comment de simples homins peuvent réussir là où la Grande Karavan ne trouve pas de réponse ».

C’était mon tour, je ne me souviens plus de ce que j’ai dit, un discours des plus banals. Puis Anyume a pris la parole. J’ai vu Zo’ro Argh sursauter quand elle a parlé des carnets codés de Laofa. Et son regard et celui de Krill s’assombrir quand Anyume a annoncé sa mort. De toutes évidences, il savait ce qu’il pouvait y avoir dans les carnets. Mais, il préférait en parler après la réunion.

Il a alors demandé à la « voisine zoraï » d’Anyume de se présenter. Nous avons éclaté de rire car la « voisine zoraï » était Na Djaï’tal. Il s’est levé en précisant qu’il était « UN » zoraï. Il n’avait pas beaucoup à dire à part qu’il soutenait le projet.

Mindae a alors pris la parole. Elle aussi était candidate pour faire partie du groupe d’éthique car elle s’était inquiétée des dérives que certains scientifiques pourraient avoir. J’avais cru comprendre lors de notre dernière rencontre qu’elle était assez religieuse. Elle nous avait même précisé qu’elle était Jénaïste. J’avais cru à un moment qu’il s’agissait d’un courant du culte Karavan. Mais Anyume m’avait expliqué que pour les Jénaïstes, « Jena était la déesse et les kamis son expression ». Elle a ajouté : « C’est étrange, hein, ce besoin d’avoir une force supérieure pour justifier le monde ? ». J’ai souri, elle avait la même opinion que moi sur la religion. Ca me rappelait une anecdote avec Kyshala. J’étais encore toute jeune quand je lui avais dit que je pensais que les « dieux » et « déesses » étaient les peluches des adultes. Ça a fait rire Anyume qui a déclaré qu’elle ressortirait ma citation au prochain athée ou croyant qui l’ennuierai.

Et puis, çà été au tour de Rajaaar, un matis. Lui aussi faisait partie à l’époque de l’ASA mais il n’était pas scientifique pourtant il faisait de son mieux pour participer. Il a déclaré avoir tenté des expériences sur la fermentation ce qui a fait ricaner Krill. Par contre, j’ai senti Mindae se raidir quand il a parlé de ces expériences sur l’impact de la Goo sur l’eau…

Et enfin, Zo’ro Argh s’est présenté lui aussi. il a parlé de la guilde Hoodo qui était en sommeil. J’ai été étonné puisqu’il portait l’écusson de la tribu Talodi. Il a expliqué par la suite que la tribu Talodi les avait accepté en leur sein pour les protéger mais que bientôt la guilde Hoodo renaîtrait de ces cendres. La réunion s’est terminé là. La plupart des participants sont partis.

Mais Anyume s’est apporché de Zo’ro Argh et de Fey-Lin. Elle voulait savoir pour son carnet. Cela faisait huit années entières qu’elle le gardait en espérant trouver quelqu’un sachant le décrypter. Je n’osais pas m’approcher, ne sachant pas si j’avais le droit d’entrer dans ce genre de secret. Mais le regard d’Ayume m’a fait comprendre qu’elle voulait que je sois à ses côtés. Zo’ro Argh restait très évasif, tournant autour du pot, ce qui avait le don d’agacer tout le monde. Il a fini par nous conduire vers la kitinière.

Mon coeur s’est mis à battre plus fort, une sourde angoisse me tenaillait. J’ai vu Anyume et Na Djaï’tal se tenir la main pour se donner du courage. Pourquoi ce geste tendre m’a fait monter les larmes aux yeux? Non… je ne voulais pas me souvenir… J’ai planté mes ongles de les paumes de ma main et j’ai avancé vers le vortex d’entrée d’un pas décidé en crispant les mâchoires. L’entrée de la kitinière était fortement gardée par les rangers, ce qui m’a rassurée. Nous ne nous sommes pas éloignée beaucoup de l’entrée. Zo’ro Argh a expliqué que pour décrypter un secret, il fallait deux clés : Anyume et son carnet et les affaires de Laofa qu’il avait entreposé dans une grotte de la kitinière. Il nous a montré l’endroit.

Nous espérions que le code serait décrypté très vite mais Zo’ro Argh a tempéré notre impatience… Cela prendrait des jours avant de réussir à obtenir quelque chose du carnet. Nous sommes ressortis de la kitinière un peu déçus mais nous étions tous épuisés.

Je me suis endormie sur place mais mon sommeil a été peuplé de cauchemars. Je me suis réveillée plusieurs fois en sursaut en train de hurler, tremblante et dégoulinant d’une sueur glacée… J’ai fini par me lever alors que le soleil n’avait même pas encore fait son apparition. Je suis redescendue seule dans la kitinière comme attirée irrésistiblement par la source de la cause de toutes ces morts. La vue d’un énorme kirosta m’a comme éveillée… Qu’est ce que je cherchais à faire? Kyshala n’était pas là… et même si les kitines l’avaient entraînée là, elles avaient du la dévorer depuis longtemps…

Je suis ressortie avec comme un grand vide dans la tête et dans le coeur…

Mon homine, mon amante…

Quand je me suis réveillée le lendemain, elle était là toujours près de moi alors que la journée était déjà bien avancée, attendant mon réveil. Elle me souriait : « Je t’attendais. Je voulais profiter un peu de toi avant la réunion. ». J’ai émergé des brumes du sommeil : j’avais oublié qu’il y avait une réunion de rangers et qu’en tant que membre de la guilde Hoodo, nous nous devions d’y être. Je l’ai caressée tendrement : « Je t’aurais rejoint n’importe où tu sais… n’importe où… ». Elle a souri : « Je sais… Mais j’étais bien là, devant notre arbre. ». J’ai posé ma main sur nos noms qu’avaient gravés Jalindra la veille : « Oui… notre arbre. ». Elle a souri : « Il n’a pas l’air de nous en vouloir… ». J’ai hoché la tête : « Non… il continue à nous protéger de la pluie. ».

J’ai commencé à la caresser en me blottissant dans son cou. Elle m’a serrée contre elle : « C’est utile de dire que tu m’as manquée? ». J’ai souri : « Non… parce que je ressens le même manque… je n’arrive plus à me passer de toi… ». Elle a souri : « Ça tombe bien, parce que je ne compte pas te laisser filer ! ». J’ai ri. Elle a continué pensive : « Si on m’avait dit qu’en postulant je te trouverais… ». Je l’ai prise par la taille pour l’attirer tout contre moi. Elle m’a embrassée tendrement dans le cou. J’ai répondu en déposant un baiser sur ses lèvres : « Si on m’avait dit que je trouverai celle qui me comble chaque jour un peu plus… celle avec qui j’ai envie de passer le reste de ma vie… ». Elle a rougi : « Tu sais parler aux homines toi tu sais… ». J’ai caressé sa joue : « Et qui est si belle quand elle rougit! ». Elle a rougi encore plus. J’ai posé mon front sur le sien : « Je t’aime tellement… ». Elle a plongé ses yeux dans les miens : « Plus que tout… ». Je l’ai serré un peu plus contre moi : « Plus que tout mon amour… ». Elle a soupiré de bonheur.

Je suis venue goûter ses lèvres dans un baiser sensuel et voluptueux pendant que mes mains tremblantes de désir effleuraient les rondeurs de son corps. Je l’ai senti frémir contre moi : « Si tu continues on va louper la réunion… ». J’ai prononcé dans un souffle : « Je ne sais même pas si j’ai envie d’y aller… et çà commence toujours en retard de toutes façons… ». Elle a murmuré : « Moi non plus… mais pour Zo’ro Argh ? ». Je me perdais dans son regard azur en retournant sur ses lèvres, caressant ses épaules. Je descendais mes mains sur la naissance de ses seins. Elle frémissait : « Ça ne me fait … aucun effet ! ». Je commençais à descendre mes lèvres le long de son cou : « Vraiment? ». Elle a eu un soupir tremblant : « Absolument… sûre! ». Je lui ai ouvert son bustier en lui offrant des caresses plus enflammées : « Et là ? ». Elle retenait des soupirs de plaisir : « Je suis… totalement… de marbre! ». Je lui ai enlevé complètement son bustier et le mien et j’ai posé ma peau sur la sienne : « Et maintenant? ». Elle tremblait : « … plus… parler… ». Ma respiration devenait saccadée : « Mon amour… ». Mes mains ont commencé à parcourir son corps : « On va arriver en retard… ». Les siennes parcouraient le mien : « Je sais… ». Nous nous sommes toutes deux enflammées nous offrant une étreinte passionnée qui nous a emporté en même temps dans une tornade de plaisirs. Nous sommes retombées toutes deux encore tremblantes. Elle a murmuré avec un sourire : « Très… très en retard… ». Je tentais de calmer ma respiration saccadée : « Très… ». Je lui ai souri en venant chercher un baiser. Elle m’a murmuré : « Je t’aime… ». Je devais avoir un regard éperdu d’amour tandis qu’une larme glissait le long de ma joue : « Moi aussi mon amour… ». Elle a recueilli la larme de ses lèvres et m’a serrée dans ses bras. Je me suis blottie tout contre elle.

Elle a dit sans bouger : « On y va? ». Je n’ai pas fait un mouvement : « Il faudrait… ». Elle a dit doucement : « En même temps… c’est bientôt fini, non? ». Nous avions déjà presque une heure de retard à la réunion ranger. J’ai répondu : « Je ne crois pas… c’est à rallonge ce genre de réunion en général… ». Elle a soupiré : « Oh… ça donne encore plus envie. ». J’ai éclaté de rire. J’ai proposé en plaisantant : « On peut demander à Zorro de nous faire un résumé en lui disant qu’on est coincé sous un arbre? ». Nous avons éclaté de rire. Je lui ai murmuré en me perdant dans ses yeux : « J’adore ton rire… ». Elle m’a caressée la joue : « Et moi le tiens… ». Elle a repris avec un sourire après un instant de silence : « En tout cas… les homines sont très douées ! ». J’ai rougi : « ha oui? tu trouves? plus douées que les homins? Vraiment? ». Elle a souri : « Vraiment! Toi en tout cas… ». J’avais presque du mal à la croire : « J’avais tellement peur de te décevoir… ». Elle a secoué la tête : « Je ne vois pas comment tu aurais pu! ». J’ai dit doucement exprimant la crainte que j’avais eu depuis le début avec elle : « Parce que je ne suis pas un homin peut-être? ». Elle a murmuré en souriant : « Tu es plus douce. ».

Nous avons fini par nous décider à aller à la réunion. Personne n’a fait allusion à notre retard. Nous nous sommes installées près de Zo’ro Argh qui était heureux de nous voir. Je dois dire que j’ai été assez inattentive à cette réunion qui pourtant jetait les bases pour la formation des futurs rangers. Malgré le monde présent, nous ne pouvions pas nous empêcher de nous offrir des caresses discrètes : nos mains liées, son baiser sur mon épaule, le mien dans son cou. Heureusement que nous étions légèrement en retrait et que personne ne nous a remarqué. La réunion était interminable. Jalindra commençait à piquer du nez. Je l’ai prise tendrement entre mes bras me moquant des éventuels regards qu’il pourrait y avoir sur nous. Je lui ai proposé d’aller nous coucher surtout qu’il y avait la route de l’eau le lendemain. Nous nous sommes donc éclipsées discrètement jusqu’à l’île de Kyshala.

Arrivée là bas, je l’ai allongée doucement sur des couvertures confortables. Elle m’a attirée tout contre elle : « Mon amour… merci pour ce moment magique! ». Je l’ai taquiné : « La réunion ranger? ». Elle s’est mise à rire : « Oui? C’était exceptionnel ! ». J’ai éclaté de rire puis je l’ai serrée contre moi : « La prochaine fois qu’il me vient l’idée d’aller à une réunion… Tape moi sur le crâne avant. Comme çà tu m’assommes et après tu peux profiter de moi. ». Elle a protesté : « Ah non pas quand tu es assommée, ce n’est pas drôle! ». J’ai rigolé : « Bein tu me réveilles en me jetant un seau d’eau! ». Elle a souri : « Y’a plus agréable comme réveil! ». Je lui ai rendu son sourire : « Comme celui de tout à l’heure? ». Elle a acquiescé : « Par exemple. ». J’ai approuvé : « Oui… merveilleux réveil… ». Elle m’a regardée avec des yeux émus : « Comme tous ceux depuis que tu es là… ». Je me suis plongée dans ses yeux : « Je crois… que je n’ai jamais vécu de tels moments avant de te connaître. ». Elle a paru surprise : « Oh… pourtant… je suis touchée! ». J’ai demandé : « Pourtant quoi? ». Elle a dit doucement : « Tu m’as tellement parlé des autres… ». J’ai essayé de lui faire comprendre à quel point, elle était unique pour moi : « Tu es la seule… qui me fasse autant de bien… et qui est toujours là à mes côtés… qui me donne de l’amour à chaque instant. Les autres… n’ont jamais fait tout çà pour moi… ». Elle m’a caressée la joue : « Merci… ». J’ai goûté ses lèvres tendrement.

Elle a souri : « Je suis heureuse… ». A nouveau, je me perdais dans son regard : « Moi aussi… si tu savais… J’ai le cœur gonflé de joie quand tu es là et pétrifié quand tu n’es plus là. Je t’aime… et c’est bien plus fort que ce que j’ai vécu jusqu’à présent… bien plus… ». Elle m’a serrée très fort dans ses bras : « Moi aussi… Tu me fais oublier tous les autres. ». J’ai embrassé son front : « Il n’y a plus de place pour les autres… ». Elle a semblé inquiète : « Tant que c’est toi qui le choisi… je ne veux pas que tu renonces à quelqu’un pour moi… ». J’ai répondu doucement : « Je n’ai pas l’impression de renoncer à quoique ce soit… ». Elle a souri : « Tant mieux… j’aurais beaucoup de mal à le supporter je pense… ».

J’ai répondu à son sourire en la prenant contre moi : « Il faut qu’on dorme… il y a la route de l’eau demain… ». Elle s’est blottie contre mon cou respirant mon odeur. Je l’ai bercée doucement en caressant sa magnifique chevelure brune : « Dors bien mon amour. ». Elle a murmuré : « Bonne nuit ma belle. ». J’ai embrassé son front tendrement et j’ai fermé les yeux. Elle s’est endormie sereinement contre moi.

La goo

Ça avait commencé par une petite toux puis les cauchemars de Jalindra avaient repris. D’abord de vilains rêves où elle voyait des ombres agressives l’entourer. Je ne me suis pas inquiétée au début. Je pensais que ses cauchemars avaient repris à cause de la peur qu’elle avait eu de me perdre durant le Voyage. Mais ceux-ci devenaient de plus en plus terrifiants au fil des jours. Jalindra m’a alors appris que pendant les quelques heures où nous avions été séparées à cause de la réunion ranger. Elle avait fait une expédition avec d’autres apprentis rangers dans la kitinière et qu’elle était tombée avec d’autres dans de la goo. Sur les conseils de Zo’ro Argh, ils avaient brûlé tous les vêtements et les objets qui avaient été au contact de cette substance pour éviter toute contamination.

Je savais qu’Anyume détenait les carnets de Laofa et de ce qu’elle m’en avait dit, cette dernière avait fait des études sur différentes substances dont la goo. J’ai pris contact avec elle. Elle nous a décrit les symptômes qui pouvaient être liés à une contamination : des vertiges, de la toux, des problèmes de peau, des hallucinations, des changements de comportement, des douleurs… Jalindra avait bien une petite toux mais rien d’autres et ses cauchemars n’étaient pas des hallucinations. Anyume a été rassurante : elle disait que tout ceci pouvait tout à fait s’expliquer par d’autres raisons et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. De plus, les homins étaient en général très résistants à la contamination du fait de leur utilisation régulière des téléporteurs. Et même si sa toux et ses cauchemars étaient les symptômes annonciateurs d’une contamination, celle-ci était récente et pouvait très bien être enrayée. Elle nous a donné alors des conseils de base pour ralentir, voir supprimer l’évolution : se laver abondamment et vider l’eau dans les Landes obscures (un lieu contaminé par la goo) et utiliser régulièrement les téléporteurs. Elle a même indiqué mais avec beaucoup de réticences qu’il était possible qu’une résurrection pouvait suffire à guérir de la maladie. Mais elle ne conseillait pas de le faire volontairement : on était jamais sûr de la volonté des kamis à vouloir accepter notre requête de résurrection. Elle a ensuite préparé une affiche qu’elle a placardé à l’entrée de la kitinière d’Almati pour que tous puissent être prévenus. Je l’avais quittée avec un drôle de sentiment : à la fois rassurée par ses paroles et en même temps avec une boule d’angoisse dans la gorge parce qu’elle n’avait pas dit que les symptômes de Jalindra ne ressemblait pas à ceux d’une contamination par la goo.

Et puis, il y a eu ce jour terrible alors que nous marchions vers frère arbre pour aller dormir, elle a eu des visions : des ombres qui tentaient de l’entraîner. J’ai su qu’elle était contaminée. J’ai complètement paniqué, lui hurlant de revenir près de moi, cherchant du regard les ombres qu’elle semblait voir, leur demandant de laisser Jalindra. Je suppose que c’est ma panique qui l’a fait revenir à la réalité. Elle était là, à nouveau, m’enveloppant de ses bras, m’affirmant que c’était fini. Pourtant, l’une comme l’autre, nous savions qu’il ne s’agissait que du début… Il fallait absolument qu’elle se soigne.

J’ai envoyé des izams d’appels à l’aide à Na Djaï’tal et Anyume. Mon petit arbre bleu a répondu toute de suite, il ne pouvait pas nous rejoindre mais nous a conseillées d’aller trouver l’éveillée zoraï Fey-Lin au plus vite. Nous avons suivi ses conseils et demandé audience à celle-ci. Elle était à Jen-Laï. Quand nous sommes arrivées, elle était en grande discussion avec un fyros Thols. J’essayais d’attendre patiemment la fin de leur discussion mais mon attitude a du interpeller Fey-Lin. Et elle s’est inquiétée de savoir ce que nous voulions.

Nous avons expliqué sommairement que nous pensions que certains aspirants rangers avaient dû être contaminés, évitant de dire que Jalindra qui était à côté d’eux devait l’être assurément. Leur réaction nous a glacé. Pour eux, il fallait isoler tous ceux qui étaient contaminés car la contamination pouvait se transmettre par l’intermédiaire de tous les « fluides » que leur corps rejetaient. Nous avons blêmi… Il était évident dans ce cas que j’avais été contaminée. Et quand nous avons demandé comment nous pouvions, les guérir. Ils ont eu des airs dubitatifs. Pour eux, ça n’était pas possible à part peut-être avec une purge totale de leur corps mais tous les fluides qu’ils rejetaient devait être emmagasinés dans un récipient spécial pour être ensuite placé dans un endroit déjà contaminé par la goo. Nous sommes reparties de là effondrées. Jalindra se sentait horriblement coupable de m’avoir sans doute contaminée. Mais moi, à vrai dire, ça ne me dérangeait pas… au moins… je partirais avec elle. Et si il fallait nous isoler à tout jamais, nous le ferions ensembles. Jalindra a bien essayer de résister un instant à ma tendresse sous prétexte de me protéger mais çà nous était impossible d’envisager de ne plus nous embrasser, nous câliner.

Le lendemain nous avons retrouvé Anyume en lui expliquant ce que nous avait dit Fey-Lin et Thols. Elle était furieuse contre eux. Elle disait que les homins et en particulier les zoraïs avaient tellement peur de la goo qu’ils ne cherchaient même pas à l’étudier et disaient des énormités à son sujet. D’après les carnets de Laofa, les risques de contamination inter-homins étaient faibles voir nuls. Mais, elle était inquiète des symptômes de Jalindra. Aussi, elle nous a proposé une expédition au point du milieu pour nous purifier avec de la sève pure. Nous sommes retrouvées dans cette étrange endroit des Terres Abandonnées.

Jalindra et moi, nous étions arrivées en premières et en l’attendant, nous nous sommes plongées dans le lac de sève pour nous amuser un peu. C’est alors que nous avons reçu un izam d’Anyume : « Sautez pas dans la mare ! On prend la sève et on se frotte avec ! Et après on ira faire trempette! ». Jalindra et moi, nous nous sommes regardées avant d’éclater de rire : nous étions au milieu du lac de sève. Nous avons couru jusqu’au bord pour essayer de faire ce que nous dictait Anyume. C’est alors que nous avons vu quelqu’un arriver devant nous qui nous a salué d’une voix grave : « Bankun jeunes fyrettes! C’est 150 000 dappers la taxe dans la zone ! ». Puis, nous avons entendu un grand éclat de rire sous le casque. C’était Anyume qui avait tenté de nous faire peur. Nous avons toutes les trois éclatées de rire.

Anyume est redevenue sérieuse : « Bien, à présent il ne faut pas faire n’importe quoi. La goo et la sève ont une relation étrange. Elles se combattent et se nourrissent en même temps. Nous sommes ici sur une des artères de sève d’Atys. Si elle se faisait contaminer par la goo, ce serait comme réveiller le Dragon. L’apocalypse des karavaniers… ». Nous n’étions pas très rassurées par ses paroles. Je sentais Jalindra tendue et j’ai caressé tendrement son dos. Elle a demandé inquiète : « Et comment on fait? pour ne pas contaminer? ». Anyume s’est mise à rougir : « Je… heu, vous avez eu l’occasion déjà de vous examiner en détail mutuellement ? Il faudrait… vérifier s’il n’y a pas de lésions cutanées. ». Jalindra a dit doucement : « Heu.. non je n’ai rien remarqué. ». Anyume m’a regardée : « Tu l’as bien examiné ? Partout ? ». Je n’ai pas pu m’empêcher de pouffer à cette question : « Oui, oui… partout… partout… ». Anyume est devenue rouge pivoine.

Elle a commencé à fouiller dans son sac pour se redonner une contenance : « J’ai mis du temps à venir, je devais me procurer quelques trucs… ». Elle a sorti un fiole avec un liquide vert très pale. Elle m’a demandé : « Est-ce que Jalindra s’énerve facilement ces temps-ci ? ». J’ai secoué la tête : « Non… elle a surtout peur de m’avoir contaminée à cause du mélange de nos… « fuildes » comme à dit Fey-Lin ». Elle m’a rassuré : « Ne t’inquiète pas Shaakya. Visiblement il n’y a quasi pas de risque. C’était une des grandes craintes de Laofa. Elle était très amoureuse… et craignait de contaminer son amant. Pendant longtemps elle s’est forcée à la chasteté à cause de ça. Et puis ses études ont fini par la rassurer et aussi son amant… ». J’ai fait une moue dubitative : « Oui mais nous la chasteté… ce n’est pas notre truc hein… ». Elle a ri : « Je me doute que vous n’êtes pas chastes, dur de résister au charme de Shaakya ! ». Je me suis mise à rougir craignant un peu la réaction de Jalindra mais celle-ci a souri : « Je confirme ». Puis, elle a dit sur un ton plus inquiet : « Je m’inquiète de la contaminer, je m’inquiète de m’en prendre à elle, je m’inquiète de perdre la raison… ». Anyume a acquiescé : « Tu as raison de craindre la folie Jalindra. C’est le pire, avec la douleur. ».

Elle a hésité puis a finalement tendu la fiole à Jalindra : « Bois-en la moitié, même si c’est ignoble ». Jalindra s’est bouchée le nez pour avaler la mixture. Elle a pâli essayant visiblement de ne pas tout revomir. Je me suis sentie mal quand Anyume a dit : « Shaakya, bois ce qui reste. ». J’ai essayé de protester : « Mais je croyais que je n’étais pas censée être contaminée? ». Mais, elle a dit : « On ne sait jamais! ». J’ai pris la bouteille et j’ai commencé à boire. C’était répugnant : « BOUARKKKKK!!! ». Mon cri de dégoût a du s’entendre sur tout Atys. Anyume et Jalindra ont éclaté de rire.

Puis Anyume a lancé : « Bien, maintenant, en petite tenue, on va nager un peu ! ». Je n’étais pas sûre d’avoir compris : « Tu veux dire… toutes nues ? ». Elle a acquiescé avant de se déshabiller et se jeter dans le lac de sève. Nous nous sommes jetées dans la sève à sa suite en nous tenant la main. Nous sommes restées quelques minutes ainsi nageant dans le lac. Anyume a fini par dire : « Si on reste trop longtemps, ça décape. Là, ça devrait agir en partie avec ce que vous avez avalé… vous allez vous mettre en phase avec Atys et expulser ce qui reste de goo, si tout va bien… ».

Nous sommes alors sorties de la sève pour nous présenter devant le Maître Kami du Point du milieu. Anyume l’a salué : « Ari’kami. Nous venons combattre le Fléau. Je vous demande votre soutien pour lutter contre lui. ». Nous sommes assises en cercle devant lui en nous tenant la main. La situation était plutôt comique : nous étions à moitié nue devant un Maître Kami. Anyume s’est mise à rire : « Si un foreur ou un croyant passe, on aura l’air malignes! Mais tant pis! Sans Na Djaï’tal physiquement ici, je ne vois pas comment me débrouiller autrement… On ne va pas plonger dans le Chant d’Atys. Je ne suis pas assez experte pour ça. On va juste tenter une purification. Elle est déjà bien entamée… La goo est désordre, néant, destruction et chaos, à la fois dans les corps et les esprits. Pour la combattre, il faut donc laisser la paix venir et nous habiter. C’est un des meilleurs lieux pour ça… Ici, on peut entendre battre le cœur d’Atys… ».

Elle a fermé les yeux en expirant profondément, semblant rayonner d’énergie. Jalindra restait sérieuse semblant tenter de faire le vide dans son esprit. Et moi, j’avais une envie folle de rigoler. Anyume a dit d’une voix douce : « Pensez à des choses agréables et sereines. Essayez d’être en harmonie avec le monde… d’entendre le Chant et de joindre votre voix à sa mélodie. ». Elle m’a regardée en souriant. J’essayais désespérément de me retenir de rire. Elle a dit doucement : « Ne te retiens pas! Le rire est un des rythmes du Chant, un des meilleurs. ». J’ai éclaté de rire incapable de me retenir plus. Jalindra a été prise d’un fou rire communicatif et finalement Anyume s’est mise à rire elle aussi. Nous avons fini par pleurer de rire.

Puis, nous avons repris petit à petit notre calme, essuyant nos larmes. Nous étions sur le point de nous rhabiller pour nous rendre vers les chutes mystiques du pays zoraï quand un vorax agressif s’est jeté sur nous. Les gardes kamis ont riposté pour nous défendre pendant que nous nous jetions dans le lac de sève pour nous mettre à l’abri. Je regardais cet étrange ballet des sorts jetés sur le vorax et celui-ci qui répliquait à coups de dents. Anyume a commenté ce combat : « C’est une allégorie de la lutte contre le chaos ! ».

Nous nous sommes rhabillées ensuite pour nous rendre aux Chutes mystiques. Arrivées là bas, Anyume a regardé la cascade avec une expression indéfinissable. Quand à moi, j’ai rougi en reconnaissant l’endroit. C’était là que Na Djaï’tal m’avait emmenée après que nous soyons devenus amants, là où j’avais osé pour la première fois avoir les gestes d’une amante envers un homin après ce que j’avais vécu. Anyume nous a dit de nous rincer et nous frotter pour enlever la sève qui était restée sur nous. Elle avait un regard mélancolique quand on a essayé de savoir ce qu’elle avait, elle a juste répondu : « Je n’étais pas revenue depuis… Très longtemps… ».

Elle restait pensive puis elle a dit soudain : « Je vais peut-être vous laisser là… c’est un endroit apprécié des amoureux ! En théorie, ce qu’on a fait devrait suffire. Si ce n’est pas le cas… alors ce sera très mauvais. Si jamais il y a de nouveaux des symptômes cela voudra dire qu’il n’y a plus rien à faire, à part prier… et même là… Et si c’est le cas, la NASA a des protocoles pour aider à lutter contre la démence et la douleur. Mais une chose très importante : si l’une de vous se révèle contaminée, sans espoir de retour, elle devra garder le secret. Je veux dire : sa compagne peut savoir, la NASA aussi, du moins la branche goo mais évitez que ça s’ébruite. Vous l’avez vu avec Fey-lin : la goo est mal comprise, mal acceptée… Elle met des gens biens à l’écart de tout. Laofa pensait que cette ostracisation faisait partie de la progression de la démence… Il est important de protéger les gens atteints de ces préjugés absurdes. ». Elle a pris un visage plus souriant : « Mais ça devrait bien se passer à présent ! L’Écorce chantait avec nous tout à l’heure, elle riait de la blague… il n’y a pas de raison que ça évolue mal. Par contre, tu vas peut-être tousser plus ces jours-ci, et avoir un peu faim ! Prenez soin de vous deux… Je file ! dormez bien ! ». Elle a remis ses bottes. Je l’ai remerciée avant d’embrasser son front. Elle a déchiré un pacte avant de disparaitre.

J’ai proposé à Jalindra de dormir ici. Elle a accepté trouvant le lieu magnifique avec ses fleurs de printemps. Nous avons parlé des souvenirs que j’avais de Na Djaï’tal à cet endroit, juste avant que je m’enfuie dans la kitinière pour la première fois. Puis, Jalindra a reparlé de ce que nous venions de vivre : « Je me suis sentie comme une paria avec Fey-lin… j’avais juste peur d’avoir une vision au mauvais moment! Et là, Anyume m’a offert une vie de bonheur à tes côtés. ». J’ai souri : « J’aurais vécu une vie de paria avec toi tu sais! ». Elle a hoché la tête : « Je sais mon amour… et ça rendait les choses encore plus difficiles, quelques part… ». Je l’ai caressée tendrement : « Finalement on va devenir vieilles ensemble! ». Elle a murmuré : « La vie est tellement plus belle ici. ». J’ai murmuré en la serrant contre moi : « La vie est tellement plus belle avec toi… ». Nous nous sommes câlinées tendrement avant de nous endormir.

Les jours suivants, il n’y avait plus aucun symptôme. Anyume avait guéri Jalindra et peut-être moi également. Je pensais à cette mystérieuse zoraï, Laofa que j’avais cherchée et qui m’avait fait découvrir Anyume. Ses carnets avaient sans doute sauvé la vie de Jalindra. Je ne sais pas si elle m’a entendue mais j’ai laissé le vent d’Atys emporter mes remerciements en espérant qu’elle les reçoive de là où elle était.

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