Categorie: Journal d’Eryann


Jour 0

Jour 16 du félinien du fingelien 383

Durant ces quelques mois que j’ai passé dans les Landes, je n’ai jamais trouvé mon aventure ici bas, digne d’un quelconque intérêt.

Les choses changent.

Bref. Je me suis rendu chez Janes et j’y ai acheté un livre vierge. Il me servira de « Journal ».  J’espère avoir le temps d’y raconter ma vie ici, mes découvertes, mes réussites, et mes échecs, pouvoir y décoder l’entrelacs de malheurs et de bonheurs qui se déroulent quotidiennement au sein de ces Landes cruelles.

Jour 1.

Jour 16 du félinien du fingelien 383

Je fais cette première vraie entrée dans mon journal, assis sur les fourrures du jardin du Manoir Haut-Elfe. Cet endroit, déjà magnifique auparavant revet aujourd’hui une couleur encore plus belle.

Dans l’introduction je disais que les choses changent. Voici le moment venu d’expliquer pourquoi et comment les Landes sont devenues plus qu’un lieu de transit pour moi.

C’était il y a presque une semaine maintenant, lors de l’invasion de Naralik et du Marais de Morcraven. Les peaux vertes commençaient à se multiplier de plus en plus dans les domaines Kultar et je pressentais que le dépôt allait se faire attaquer sous peu. Vu mes moyens, je me contentais en fait de me faire le plus menaçant possible espérant faire fuir les gobelin et leurs femmes qui passaient par là, devant à trois reprise tuer les créatures qui s’approchaient de trop. Une de mes cousines (c’est ainsi que les Hauts-Elfes appellent leurs semblables sombres), Khaena que j’avais déjà rencontré à plusieurs reprises (lors d’une réunion du Dispensaire et lors du banquet Galduro-Nain) est arrivée. J’avais beau savoir qu’elle était d’un niveau bien supérieur à moi, je ne pus empercher de m’inquiéter pour elle. Mon inquiétude fût de courte durée puisque bientôt ce furent des hordes de gobelins qui nous assaillirent par vagues successives et il fut décidé d’évacuer Kel-Emen vers Pierre Blanche, à proximité de l’entrée en Morcraven. Je tentai de prendre part à l’évacuation, mais, à moitié du chemin, tombai sur un chef Gobelin, qui m’envoya d’une pichenette en Archéron. De nouveau, je m’inquiétait pour la sombre, bien loin de remarquer que j’avais égaré dans ma descente vers les Enfers mon heaume de cuivre que j’avais acheté après de nombreuses semaines de travail sur des Essences Volcaniques. Khaena semblait contente que je m’inquiète ainsi de son sort. Elle me confia alors qu’elle avait failli me rejoindre de peu sans l’intervention d’un aventurier Kultar menant les miliciens.

Lorsque je revins en Pierre-Blanche, je retrouvai mes compagnons qui avaient procédé à l’évacuation de Kel-Emen, juste sous la Bannière vers les Marais. Agacé par la perte du casque (je m’en étais enfin aperçu) j’en fis part aux autres aventuriers et Khaena m’offrit de lui prêter un de ses heaumes en acier. N’ayant jamais enfilé une telle armure, je lui demandai comment cela m’allait ce à quoi elle répondit « Il te va bien, c’est juste dommage quel ‘on ne voit plus tes beaux cheveux blonds ». Je ne pus m’émécher de rougir et essayai de balbutier quelques mots, ce qui eut pour résultat de sortir une phrase aussi claire que celle d’un chef gobelin commandant ses troupes. Sans doute amusé par ma maladresse, la sombre rit et Atwenas, jamais à court de bons mots, parfois tranchants me lâcha un « Alors Eryann, on se fait draguer par une cousine? »

La journée se termina alors je je passais mon temps à aider les combattants, les soignant (au passage, j’ai appris de nouveau sorts de soin, plus puissants) si besoin, continuant à discuter par télépathie avec Khaena qui se battait de l’autre coté de la bannière. Ce qui m’a le plus étonné c’est quelle aussi s’inquiétait pour moi. Aucun depuis mon arrivée sur les Landes ne s’était inquiété de moi. Peut-être Atwenas avait il raison… Elle revint plus tard. Je lui dis que je l’admirais de pouvoir se battre de la sorte, moi qui ne pouvais qu’à peine tuer les gobelins uns à uns. Elle me proposa avec un sourire que nous nous entraînions tous les deux au combat. Chose que j’acceptai avant de m’endormir dans une méditation sans songes.

Deux jours plus tard, lorsque j’émergeai, Khaena me demanda en pensée si j’étais là et si je voulais aller m’entraîner maintenant. Je lui répondit avec plaisir et nous nous donnâmes rendrez-vous à l’arène de Starenlith, la seule que je connaisse en fait. Chemin faisant, je croisai une sentinelle, qui, des étoiles dans les yeux, me suivit, me demandant de lui enseigner comment être aussi fort. Je lui répondit que Loril, notre bailli, ne serai pas content que la garde quitte son poste, et que je n’étais pas du tout apte à lui enseigner quoi que ce soit, vu que c’était moi qui allait prendre des cours aujourd’hui. Il persévéra à me suivre de loin. Pas très discrets ces Sentinelles. Il faudra que j’en parle aux autres Hauts-Elfes. J’arrivai et vis Khaena, ses cheveux blancs flottants dans l’air tiède du désert. Je n’avais jamais vu quiconque de cet angle. Je l’avertis qu’il ne faudrait pas me frapper trop fort, parce que lors d’un précédent entraînement avec mes frères, je fus envoyé par deux fois en Archéron, des mains trop fortes de Voronwe et Louméa. Elle me rassura en souriant doucement en me disant qu’elle ne voulait pas me faire de mal, approchant plus près qu’une simple combattante. Un ange passa et nous nous mîmes au travail. Je voyais bien qu’elle retenais ses coup et frappais dans ma garde, laissant ouvert la sienne afin que je puisse toucher au but moi aussi. Malgré cela, elle me mit tout de même à terre, et lorsque je reviens d’entre les morts, elle semblait être vraiment désolée, ce à quoi je répondis que j’étais habitué. Nous continuâmes encore quelques minutes.

Tous deux fatigué par tant de débauche de forces, sous le soleil cuisant du Désert, nous décidâmes de nous rendre dans une taverne et elle me mena à la cité du Port « Cette taverne est plus petite, on sera plus tranquille » argumenta-elle.

Arrivés là bas, elle commanda deux verre de vin Sinan et nous trinquâmes, à je ne sais quoi, d’ailleurs. Nous discutâmes de tout et de rien, elle me demandant depuis combien de temps j’étais là, moi la fixant de l’autre côté de la table. Je pris ma chaise et me rapprochai d’elle, ne voulant pas que le Tavernier n’écoute notre conversation. Elle me fixa de ses yeux rougeoyant comme des volcaniques et me dis « Je ne veux pas te faire de mal, joli Elfe aux cheveux Blonds ». J’avais du mal à croire ce que j’entendais, mais ces mots étaient des plus délicieux à mes oreilles. Je restai immobile, elle me pris le visage dans ses mains et déposa un baiser sur mes lèvres. La suite se noie dans un mélange d’images et de sensations. Je me rappelle juste de quelques détails : elle me parlant de sa mère que j’avais du croiser au banquet Galduro-nain : elle était en elle, prenant parfois le pouvoir sur la vraie Khaena. Je me revois aussi lui répondre « Ce n’est rien, tant que tu es là pour moi » à sa phrase m’avertissant qu’il était dans les habitudes Sombres d’avoir « plusieurs mâles » comme elle dit. Le dernier souvenir que j’ai est qu’elle me raconte qu’elle a hérité de la couleur de cheveux de sa mère qu’un de ses amants disait « couleur de lune ». Je décidai alors qu’elle serait Isil pour moi, nom donné à la Lune chez les Eldars. Nous nous séparâmes et je retournai à ma récolte de souffre entamée quelques jours plus tôt.

La fin du pourquoi et du comment je suis ici, se passe il y a deux jours. J’étais toujours à mon souffre, dans la Caverne de Thyl-dûr, et je revenais vers le Village des Bleus me décharger. J’étais comme d’habitude couvert de poussières de souffre et j’avertis les autres aventuriers présents au dépot de ne pas utiliser d’essences volcanique sans quoi nous allions exploser et je remarquai Khaena, discutant avec un Bleu à l’air gentil et attentif, qu’elle me présenta comme « son mâle, Kely ». Je ne pus m’empêcher de partir d’un four rire nerveux tant la situation me semblait incongrue. Ils me saluèrent tous deux, et ils s’en allèrent, Khaena me promettant de revenir seule plus tard. Je repris ma récolte. Elle revint quelques heures après. Je lui proposai de visiter le Manoir elfique où je me trouve actuellement,dont elle découvrit le jardin avec ravissement et nous nous assîmes à l’endroit exact où j’écris ces mots. Dans la discussion, elle me demanda si « J’avais connu des femelles ». Je fus un peu étonné de cette question, et je lui répondis que la seule femme que j’avais vraiment touchée était cette humaine dont la tentative de sauvetage m’avait valu l’exil en ces terres (je lui avait déjà raconté l’histoire en détails dans une lettre ). Dans un sourire coquin, elle me demanda si j’étais prêts à prendre des leçons sur certaines choses, ce à quoi je répondis que j’étais prêt à tout pour la connaissance. Elle entreprit alors de me faire réviser ce qu’elle appela la première leçon. Du contenu de celle là ni de prochaines, je ne dirai rien, je préfère garder certaines choses pour nous seuls. Quelque minutes plus tard, dans le plus simple appareil, je lui demandai, intéressé si elle avait eu beaucoup d’autres mâles ce à quoi elle me répondit avec détails. Combien elle avait souffert pour les autres, combien elle avait déjà aimé! J’étais, et je suis toujours, fier qu’elle m’ait choisi. Je ne pus retenir des larmes, larmes qui n’avaient plus coulé depuis cette funeste nuit qui m’avait vu exilé du domaine Sylvain. Enfin, j’avais trouvé une raison autre que le sang pour rester ici : j’avais mon Isil, mon point d’attache dans ces Landes qui tournent parfois trop vite. Elle semblait étonnée de voir un mâle pleurer de la sorte. Elle me pris dans ses bras et, me consolant doucement, me demanda comment on appelait le Soleil. Je lui répondis que le mot le plus courrant était Anar. Elle me fixa dans le blanc des yeux et me dis « Si je suis ton Isil, alors tu seras mon Anar, mon bel elfe aux cheveux du soleil ». Puis elle m’embrassa de plus belle. Elle recommença son enseignement, de ses mains et de sa bouche, me surmontant même à la fin. Je lui promis que la prochaine fois, ce serait à moi d’appliquer ce quelle venait de m’apprendre. Mais notre tendre échange fut interrompu par les pas d’un aventurier. Nous nous rhabillâmes en vitesse, puis sortîmes du Manoir où nous éclatâmes tous deux d’un rire un peu nerveux. Je méditai près de l’entrée et elle alla vaquer à ses occupations.

Je crois que je vais fermer le journal pour l’instant. Je viens d’avoir une idée de surprise pour elle, mais cela va me demander plusieurs jours voire semaines de travail.

Puissent les Tavars veiller sur elle.

Jour 2.

20 félinien 383, Ile de Trépont.

Je suis inquiet. J’ai retrouvé Khaena avec plaisir en début de journée, mais lorsque je la vis, je remarquai que quelque chose n’allait pas. Elle avait un air absent. Nous nous assîmes au bord de l’étang gelé sous le blizzard hivernal, et elle m’expliqua qu’elle s’était fâchée avec Kely, son Homme Bleu.

Apparemment il y a quelques semaines ils étaient allés tous deux voir Bahar, sa femme qui habite sur le continent. Elle voulait avoir un homme et apparemment, le Bleu aurait accepté. Plus tard, Khaena a appris que sa femme était enceinte. Mon Isil en était heureuse et lorsqu’elle en informa Kely, il ne l’entendit pas ce cette oreille, arguant qu’il ne s’en occuperait pas. Khaena, blessée a réagi vivement et l’a giflé. La réponse ne se fait par attendre : l’homme bleu lui rendit sa gifle puis partit. Apparemment il se serait excusé plus tard pour cet accès de violence mais restait sur sa position : il ne s’occuperait pas de l’enfant à naître.

Khaena m’avait raconté cela des sanglots dans la voix, blottie contre mon épaule. Je lui assurai que je trouverais une solution, quelle qu’elle fut. Pour l’instant, je ne me vois pas essayer de raisonner Kely, que je ne connais que de vue. J’ai d’ores et déjà proposé la seule solution que je voyais à Khaena : nous irons visiter le petit autant de fois que nous le pouvons, peut être le fait de me voir comblerait le manque. Je sais que cette solution va sans doute me coûter une partie de cette vie de bohème que je mène au sien des Landes, mais si c’est ce qu’il faut pour que mon Isil retrouve son bel éclat, je le ferai sans hésiter.

Puissent les Tavars veiller sur elle, elle qui dort, éreintée par tant de souffrance, sur mon épaule.

Dors, ma belle Sombre Lune, que tes songes soient doux. Je serai là à ton réveil. Pour toujours.

Jour 3

24 félinien 383, Chambre de la Taverne de Starenlith.

Khaena a dormi longtemps sur mon épaule. Elle semblait apaisée et enfin calme. Elle est si belle. J’ai mis ce temps à profit pour préparer la surprise que je voulais lui faire. Au départ, je comptais la fabriquer moi même , mais devant le temps que cela me prendrait, je me suis dit qu’il valait mieux réunir les lumens pour acheter avec une meilleure qualité. Bref. J’ai finalement acquis ces deux anneaux d’argent. J’ai aussi contacté Dame Kharya au sujet de cette histoire d’archives de la Bibliothèque du Palais. Apparemment, le Seigneur Luxin aurait promis que cette erreur sera réparée et les archives Sombres réimplantées au sein de la Bibliothèque. Espérons qu’il dise vrai. Tout peuple a droit à son histoire. Détail amusant, dans la conversation, elle me fit part de son intention de convoquer les membres du Dispensaire à une réunion « nous ne sommes plus aussi soudés qu’avant » avait -elle dit. Je ne pus m’empêcher de rire à cette phrase. Je me demande comment les membres prendront notre nouvelle proximité avec Khaena. Ce sera sans doute amusant…

A son réveil, j’ai offert la bague à me Sombre. Elle a semblé émue, balbutiant (pour une fois que ce n’est pas moi qui perds mes moyens devant elle…) que chez les humain cela voulait dire beaucoup. J’ai répondu qu’elle valait beaucoup pour moi.

Plus tard, je l’ai conduite ici, dans la chambre que j’avais loué chez Roua il y a quelques semaines. Nous avons repris les leçons. Deux. Comme la première fois. Encore plus délectable. J’ai toujours peur de lui faire mal, mais ça n’a pas l’air. Je suis subjugué par elle. Elle est tellement sensuelle quand elle se meut sur ou sous moi. À côté je dois avoir la grâce d’un troll obèse… J’ai sentie sa peau sous toutes les coutures, goûté son plaisir.

Retombant peu à peu, elle m’attribua le note de 9,5, ce qui nous fit rire tous les deux. Je lui ai demandé pourquoi elle m’aimait. Elle m’a répondu en riant encore que c’est parce que j’étais un très bon élève, puis plus sérieusement, parce que je suis là quand elle a besoin de moi, parce que je l’écoute et parce que je la fais rire. Cela me laisse songeur. J’ai l’impression qu’elle n’a que trop rarement croisé quelqu’un qui l’accepte comme elle est, qui ne la juge pas, qui l’aime pour ce qu’elle est à l’intérieur et pas que à l’extérieur. Elle mérite du Bonheur et j’en ai à donner mes milliers d’essences…

Mais… J’ai peur de la perdre. Ici, la mort est partout et me si nous nous mourons pas ici, nombre d’entre nous disparaissent du jour au lendemain, sans laisser aucun trace. Je ne veux pas que cela nous arrive. Pensant à cela, entre ses doux bras, je me surpris à verser à nouveau une larme, qu’elle essuya d’un baiser.

Elle a du partir plus précipitamment que je ne l’aurais voulu, abrégeant notre étreinte, sa mère voulant rejoindre sa femelle à elle. Je lui dis que j’aimerais rencontrer sa mère un jour. Elle m’avertit qu’elle était très différente d’elle. Mais peut m’importe. Elle fait partie de sa vie, je veux tout connaître d’elle. Je l’ai laissée partir, elle me promettant qu’elle reviendrait se glisser dans le lit une fois que sa mère aurait assouvi ses envies. Puissent-elles être rapidement comblés.

Isil, toi qui brille cette nuit, veille sur celle à qui j’ai donné ton nom.

Jour 4

26 félinien 383, Jardins du Divin Fringel, Taarsengaard.

Encore une fois, elle dort sur mon épaule, encore une fois, elle semble en paix.

J’ai enfin fait connaissance de sa mère. Je l’ai appelé Isil et c’est une autre voix qui m’a répondu « C’est le blondinet de la petite ? ». Charmante présentation…. Elle me proposa de boire une verre à Illumen, ce que j’acceptai.

Comme prévu, elle portait ce cuir Sinan donc Khaena m’avait parlé. Il met admirablement bien les formes de Khaena en valeur par ailleurs. J’avoue que j’ai du me retenir de la serrer contre moi, avant de me rappeler que ce n’était pas mon Isil mais sa mère.

Je savais que la discussion n’allait pas être une partie de plaisirs, mais finalement je pense que j’ai réussi ce premier test avec brio. Elle a un caractère bien plus sombre et plus « sauvage » que Khaena mais sous cette carapace, j’ai pu ressentir les mêmes blessures, les mêmes cicatrices. Nous bûmes deux bouteilles d’outranque à même le goulot tout en discutant. Enfin, moi essayant de discuter, elle me rabaissant sans cesse « T’es un intello », « On ne peux même pas jouer avec un puceau ». Malgré cela, elle a semblé troublée lorsque je lui ai parlé des blessures qui ne se soignent pas avec de la magie. Elle m’a répondu que ça l’étonnerait que je puisse aider une folle, ce à quoi j’ai répliqué que le fou ne l’était que dans le regard des autres. Un ange est passé, puis elle m’a demandé si je voulais « voir la petite ». Je crois que j’ai marqué un point. Nous verrons bien.

Khaena est revenue. Nous nous sommes étreints puis avons un peu discuté de tout et de rien. Coïncidence ou non, c’est à ce moment que Kelly me contacta par télépathie. « Que ressens tu pour Khaena ? » me demanda-il. Je lui répondis que je voulais prendre soin d’elle, de ses proches, que je ne voulais pas qu’elle soufre dusses-je faire l’impossible. Il a semblé soulagé et a dit « Tant mieux, je peux partir tranquille » J’ai essayé de le retenir autant que j’ai pu, lui disant que s’il partait nous en souffririons Khaena et moi. Il me rassura « Je ne pas pas pour de bon. J’ai besoin de m’isoler, et peut-être que quand je reviendrai, je pourrai à nouveau donner ». Je lui souhaitai bonne route et lui promis de prendre soin de notre belle Sombre.

Un événement des plus bizarres se produit en plus. Je me fie au témoignage de Khaena parce que je n’en ai aucun souvenir. D’après elle, j’aurais dit une phrase ressemblant à « Des nuages arrivent par l’Est. Mais Anar veillera sur Isil pour que sa lumière resplendisse toujours et quand les nuages partiront, le bleu du ciel reviendra ». J’ai peut-être une idée sur ce qu’il s’est passé, il faudra que je regarde dans la Bibliothèque du Manoir elfique.

Nous sommes partis aux jardins du Palais du Divin Fingel, non sans que Khaena ait payé pour les bouteilles, une peu dépitée. Je m’étais déjà rendu là à plusieurs reprises, lors de mes explorations (c’est plus joli que égarements) dans le Palais et avais visité ce magnifique endroit, mais à l’époque , je n’avais que mon ombre comme compagne… Khaena me fit visiter le temple de Lith, déesse araignée dont les Sombres sont les fervents admirateurs. Nous avons marché dans un grotte ou des centaines d’araignées géantes (bien plus encore que nulle part ailleurs) vivent et se reproduisent sous l’œil attentif de leur mère. C’est un bel endroit. Il invite à la réflexion, je trouve. Que sont des araignées ? Sont-ce des monstres ou sont-ce des êtres qui naissent, vivent et meurent, comme nous tous ?

Nous remontâmes puis Isil me proposa un bain dans une vasque que je n’avais jamais vu avant. Nous nous assîmes puis elle me savonna et entrepris ce qu’elle appela un massage. Jamais je n’avais ressenti un si grand relâchement depuis mon arrivée sur les îlots. Ses mains parcouraient mon dos et mes épaules, chassant toutes les tensions que s’étaient accumulé depuis les mois que j’étais arrivé ici. J’essayai de faire de même avec elle, elle eut l’air d’apprécier. Le message fini, je descendis les mains plus bas. Elle fis de même, nous donnant mutuellement du plaisir. Elle se retourna et vint sur moi. C’était délectable, comme chaque fois. Nous sortîmes du bain et nous étendîmes tous deux nus, laissant le Soleil chauffer notre peau. Elle s’endormit, blottie contre moi, moi lui caressant les cheveux.

Puissions-nous ne jamais nous perdre.

Jour 5

2 mundia 383, Taverne de Aeth Aelfan.

Encore une magnifique journée passée avec Isil.

Les endroits qu’elle me fait découvrir à chaque fois que nous nous retrouvons sont toujours surprenants. Cette fois-ci c’était en Irilion. Je ne suis jamais très à l’aise quand je vais jamais là bas, tant le danger peut être derrière chaque arbre, au détour de chaque chemin. Qu’à cela ne tienne, je l’ai retrouvée dans une caverne enneigée dont le nom m’échappe, elle était  entrain de creuser pour du minerai d’argent. C’est bon à savoir. Elle m’a ensuite pris la main puis nous sommes allés à Aeth Aelfan et sa taverne des plus confortables. Couchée sur les coussins, elle était comme un bijou dans un écrin de velours. Je crois que cette image restera gravée dans ma mémoire.

Les jours qui viennent risquent d’être longs. Nous avons  tous deux des choses à faire. Espérons que nous tenions le coup.

Puissent Isil et Anar veiller sur nous.

Jour 6

7 archeno 383, Dépot , Pierre-Blanche.

Voilà presque deux semaines que je n’ai plus ouvert ce journal. Deux semaines qui passèrent à diverses choses bien banales à côté de ce qui se passe sur les Ilôts : récolter, fonde, récolter et encore fondre. Je ne sais pas où est Isil. Je devrais savoir que nous ne pouvons pas être tout le temps ensemble, mi même en contact télépathique : j’ai du travail, elle en a aussi et elle doit s’occuper des autres, de surcroît.

Mais quelle est cette sensation? Comme si mon âme s’était soudain trouée en sa part la plus profonde, la plus intime. Je crois que j’ai besoin d’action, de me vider la tête. Un peu d’entrainement me fera du bien.

Je l’espère.

Jour 7

18 mundia 383,  Arbre, Val d’Alganiel.

Dormir. Encore quelque chose que je découvre. Cela est étrange. Mais l’heure n’est plus au sommeil.

Comme dit lors de mon dernier Billet, j’avais décidé de m’entraîner pour faire passer cette étrange sensation. J’étais allé au Kasteel d’Altania. Je me réveillai affaibli, dans la neige de Pierre-Blanche, non loin de Raven, Khaena me regardant avec inquiétude. Je repris mes esprits puis elle m’emmena dans une des ces arbres maisons du Val d’Alganiel. Apparemment, je me serais attaqué aux gargouilles éveillées et au Valet d’Altania , dans la seconde salle du Kasteel. Je n’ai aucun souvenir de cela. Juste une sensation, comme si voir les dépouilles de mes ennemis était la seule satisfaction, le seul but que j’aie. Nous avons beaucoup parlé avec Isil, elle prenant soin de moi. Elle semblait inquiète et voulait que Kharya m’examine, elle saurait quoi faire, disait-elle, mais elle était endormie et ne vint donc pas.

Dans le même temps, une discussion avait lieu sur les ondes télépathiques elfique. Elle avait éclaté suite à l’affaire de la Rénovation de Nargraw-Nord. Selon les Hauts-Elfes, Kharya avait outre passé ses droits en ne demandant pas leur avis aux officiels présents lors de la négociation. J’étais d’avis qu’elle avait certes agi précipitamment, mais dans l’intérêt de tout Séridia et c’est pourquoi je pensais que nous devrions fournir exactement un septième du devis. Les autres n’étaient pas de cet avis, ne voulant octroyer que le don du Palais. Pire encore, Darca, notre Échevin, était d’avis que le Chambellan avait avant tout agi avant tout en tant que Sombre plutôt que comme Chambellan. Notre discussion tourna vite en dispute; moi avançant que la Sagesse proverbiale des Elfes avait du quitter les Îlots si de tels arguments étaient avancé, lui me demandant à plusieurs reprise quelle était la définition de « Sagesse ». La discussion n’étant pas possible, je me coupai de mes frères pour réfléchir.

Plus tard, j’affichai cette lettre dans nos salles :

Andili,
Suite à une discussion animée sur nos ondes il y a quelques jours et suite au parchemin déposé ici (parchemin d’atwenas disant qu’il se coupait lui aussi des ondes), j’ai beaucoup rélféchi. Rassurez-vous, mon avis sur le dossier Nargraw-Nord n’a pas changé d’un poil de chimérien. Mais je suis venu à la conclusion que peut-être je n’avais pas fait preuve d’assez de retenue dans mes propos, ni même expliqué ceux-ci.
Que cela soit dit : je ne suis du côté de personne. Ni du Chambellan, ni de la Matriarche Sombre, ni du chef du Dispensaire et pas même des Haut-Elfes. Juste celui que me dicte mon esprit, qui, je espère guidé par le Chant. Si un fait quelque part me déplaît, je le dis, quoi que cela m’en coûte. La réaction de notre Représentant ne m’étonne pas, lui qui doit se voir en rêve à la place de Dame Kharya. Mais que d’autres frères le suivent, cela m’attriste. Le suivront-ils aussi lorsqu’il ira en zone de non-droit? Avons nous perdu l’oreille pour le Chant? Certains, je le crains.
Comme vous le savez peut-être, j’ai récemment fait une rencontre. Une rencontre qui m’a fait prendre conscience qu’il n’y a ni Hauts-Elfes, ni Elfes-noirs, ni aucun autre peuple. Nous avons toutes et tous les même blessures, les même peurs, les même tristesses et surtout le même ennemi. Considérer celui dont la peau est plus sombre que la sienne, dont les mœurs sont différentes relève pour moi d’une erreur de jugement. Lorsqu’il gît, blessé par les créatures des féaux, le corps ensanglanté, son sang n’est-il pas rouge lui aussi? Ne doit-il pas passer aux Enfers lui aussi? Nous avons tous à apporter à l’autre et tous à apprendre des autres, voilà pour moi la Sagesse elfique. Encore faut-il le vouloir.
Sachez enfin que si je voyais cette situation perdurer malgré les efforts des gens de bien, je n’aurai aucun scrupule à vous laisser. J’ai déjà été renié par les miens une fois, une seconde ne m’effraie pas.
Puisse le Chant d’Ull’Tuvar rythmer les pas de ceux qui peuvent encore l’entendre.

J’espère qu’ils entendront raison.
Isil et moi nous sommes endormis tous les deux dans les bras l’un de l’autre.
Puissent Isil et Anar Veiller sur nous.

Jour 8

25 mundia 383, Arbre, Val d’Alganiel.

C’est la seconde fois que j’écris dans cet arbre. Il est confortable. Bien plus que la chambre à l’auberge de Starenlith. Pourquoi n’y ais-je pas pensé plutôt. Soit. Je suis resté ici, car, fatigué par ce qui s’est passé il y a deux jours,  j’ai dormi jusque maintenant.

Khaena était en conseil matriarcal et nous discutions par télépathie. Heureusement, il n’ pas duré et nous nous retrouvâmes rapidement près de Raven. Elle m’appris que Kharya avait accepté de venir me voir. Elle me glissa aussi, un peu anxieuse que c’était avec elle qu’elle avait passé la nuit il y a quelques jours. Elle avait l’air inquiète de ma réaction. Je lui répondis que c’était bien, que cela ne me dérangeait pas. A dire vrai, je préfère qu’elle passe du temps avec elle qu’avec un ou une illustre inconnue. Elle a paru soulagée. La Matriarche est arrivée et nous nous sommes rendus tous trois dans cet arbre. Nous avons un peu parlé puis Kharya a préparé une de ses potions et me l’a injecté avec une aiguille. C’était angoissant. Heureusement que Isil était là. Cette potion était censé me refaire plonger dans l’état dans lequel j’étais pendant que je m’attaquais aux gargouilles du Kastel. Apparemment ça a plutôt marché puisque à mon réveil, Khaena me regardait avec inquiétude.

Selon la Matriarche, j’aurais découvert en une fois les sentiments liés à l’amour suite à ma rencontre avec Khaena. Aussi bien les heureux que les moins heureux. Je dois, m’a dit Kharya, tâcher de me rappeler ces sentiments pendant ma méditation et les partager avec Isil. Ma Sombre Lune a paru troublée, doutant qu’elle soit la bonne personne à qui me confier. La Matriarche lui a assuré que c’était elle la seule qui pourrait m’aider. Je me suis endormi sur le lit, bercé par le bruit de la sève qui remontait dans le tronc de l’Arbre. Juste avant de sombrer dans les songes, j’ai entendu Kharya appeler Isil « Ma louve » et les voir partir toutes deux. Je souris en me disant qu’elle serait en sécurité.

Je me réveillai en sursaut. J’avais mon épée de bronze en main. J’étais assis sur le lit. Il me fallut quelques instants pour réaliser où j’étais. Je me rappelle maintenant ce que j’ai rêvé : j’ai revécu ma transe avec les deux sombres. J’en tendu la voix de Kharya me demander si je l’entendais. Je me levai vivement, je devais « les » détruire. Tous. « Ils » voulaient sa mort. Je sens l’air frais du dehors puis une poigne ferme mais douce qui m’attrape le poignet. Loin, j’entends la voix de la Matriarche qui me demande de me calmer, elle me demande où je suis, je répond que c’est un Château avec des Gargouilles. Je veux partir, je dois « les » tuer. Mais elle me dit que Isil est là. Ce nom me dit quelque chose. Puis j’entends cette voix, bien plus forte et bien plus présente que celle de la Matriarche. C’est comme si cette voix, parlait directement à mon âme, comme si elle arrivait à parler à ce qui me touche le plus. Cette voix me dit « Je suis là Anar ». Soudain, alors que j’étais dans l’obscurité totale, une lumière se fit. Une lumière blanche comme une nuit de pleine Lune. C’était tellement reposant.  Kharya me demanda de me souvenir des sensations. Je devais tuer, tuer pour protéger Isil, la protéger des Landes car elles voulaient la tuer, me la retirer. Je devais la protéger, coûte que coûte. Je voulus me dégager  pour partir combattre, mais encore, une fois Isil me parla de sa voix si douce. Je revins à moi face à Khaena, juste devant l’arbre-maison. Mon rêve se finit à cet instant.

Il faudra que j’en parle à Khaena, comme l’a dit la Matriarche.

J’espère que tout va bien pour elle.

Jour 9

16 kamarien 383, Arbre, Val d’Alganiel.

Il y a beaucoup de choses nouvelles, mais je n’ai pas eu le temps de les relater ici. J’espère que les brumes du souvenir n’effaceront pas une partie de ma mémoire.

Après avoir dormi longtemps, assommé par la médecine de Kharya (selon elle, le mélange était sans doute trop fort pour moi), je me suis réveillé dans l’arbre d’où j’écris ces lignes. J’étais en forme comme jamais et me décidai à fondre des essences curatives (c’est toujours utile, surtout pour quelqu’un comme moi…). J’avais décidé de rester près de Raven, mais le Soleil brillait particulièrement fort, et je sentais ses rayons brûler atrocement ma peau, si bien que je décidai de me rendre au frais, au dépôt de Starenlith. Là, je croisai le nain Balek, son visage me disait quelque chose mais je ne me rappelais plus d’où. Il me rafraîchit la mémoire en me parlant du banquet Galduro-Nain et de la soirée arrosée qui avait suivi dans la taverne de Nord-Thyl. J’avais oublié ce passage… Curieux effet de la bière naine sans doute.

Plus tard, je retrouvai Isil et nous partîmes faire la visite de la Nouvelle Naralik. Les Architectes ont fait un travail extraordinaire. Les Sombres ont maintenant une vraie terre et non plus un terrain vague parsemé de ruines. Tout est placé sous le signe de Lith, un pétroglyphe représentant une araignée orne même le centre du village. La taverne est un peu sombre et ornée de crânes, mais cela n’est pas laid. Les chambres sont confortables, nous nous sommes d’ailleurs endormis dans les bras l’un de l’autre.

Je me réveillai seul. Isil avait du partir, je ne sais où. Je décidai alors de reprendre mon activité d’alchimie près de Raven. C’est alors qu’un coursier vint me trouver. Il me portait une lettre d’Isil, me disant qu’elle partait sur le continent pour quelques jours, auprès de Bahar. Je lui répondis, espérant qu’elle ait le message avant son retour sur les Îlots, qu’elle remettre mon Salut à Bahar et qu’elle prenne soin d’elles deux. Je rentrai au Val, le travail m’avait fatigué.

Durant mon sommeil, je me retrouvai le jour avant mon exil. J’étais là dans l’arbre, toujours commandant des Sylvains du Sanctuaire. J’entendis ce chant, cet étrangère qui se promenait entre les troncs. Je revis la flèche lui percer le cœur et je descendis, comme je l’avais fait en réalité. Lorsque je retournai la victime, pour voir son visage, je ne vis pas le visage de l’humaine, mais bien celle d’une Elfe Sombre. Lorsque je lui demandai son nom, elle me répondit dans un souffle « Isil », avant de périr entre mes bras. Je levai le yeux vers l’arbre et vis que c’était l’Arbre de la Sagesse qui se trouve actuellement au sommet du mont Kilaran. Je me réveillai en sursaut. Mon visage était trempé de larmes. Je me levai,  me passai un peu d’eau sur le visage et pris mon journal.

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