Jour 4 Nuona – Fingelien 384
Le lendemain, Shaael m’a appris qu’elle devait repartir. Une mission, lui avait été confiée par la guilde des voleurs. Elle devait se rendre à Solitude, une ville éloignée dans le nord-ouest de Bordeciel. Elle voulait y aller seule. Elle ne connaissait absolument pas la ville ni le chemin pour y parvenir. Je me suis mise en colère. Elle comptait donc me laisser là dans cette maison à chaque fois qu’elle partirait en mission ? Et je devrais attendre seule son retour? C’est comme çà qu’elle envisageait notre vie à deux? une femelle qui l’attend sagement à la maison, lui préparant des petits plats et faisant le ménage ? Mes yeux rouges devaient lancer des éclairs.
Shaael a eu un moment de surprise. Puis, elle s’est mise à rire. J’avais raison : elle ne voulait pas d’une femelle de ce genre mais elle était inquiète. Elle avait peur de m’entraîner dans des aventures dangereuses. Je l’ai regardé avec un petit air de défi. Qu’est ce qu’elle croyait? Draïa n’avait rien d’une contrée tranquille. J’avais croisé assez de créatures dangereuses pour savoir me défendre et seule si il le fallait. Elle m’a souri. J’ai compris que je l’avais convaincue et j’ai commencé à préparer mon sac en lui lançant : « Bon alors, on y va? ». Une nouvelle fois, elle a éclaté de rire devant mon empressement. Elle et moi nous aimions l’aventure et si nous pouvions la vivre ensemble c’était encore mieux.
Nous nous sommes donc mises en route. Shaael avait tendance à éviter le plus possible les routes souvent dangereuses à cause des embuscades de bandits. Elle aimait passer à travers les bois, les steppes et les montagnes, loin de tout. Ça lui permettait de récolter des plantes de toutes sortes qui lui serviraient pour confectionner ses propres potions. Elle pouvait aussi chasser pour la viande et le cuir. Je dois dire que moi aussi, j’aimais assez être en pleine nature ainsi.
Pour arriver à Solitude, il nous fallait d’abord passer un col. Nous comptions faire une petite halte ensuite dans une petite ville appelée Morthal. Mais, ni Shaael, ni moi ne connaissions la route exacte. Nous avons décidé de piquer droit sur le nord-ouest. Mais, la montagne dont on nous avait parlé, nous a barré la route. Il fallait trouver le col où nous pourrions passer. Il n’a pas été très difficile à trouver mais le chemin était rendu difficile par la neige et le vent qui soufflait.
Alors que je m’apprêtais à passer de l’autre côté pour m’approcher des ruines qui étaient apparues, Shaael m’a retenue d’un geste en me faisant signe de me taire. Ses yeux de chat avaient repérés un mouvement dans la neige. J’ai suivi la direction de son regard. Une forme simiesque était devant nous : un yéti ou plutôt comme on les appelle ici un troll des glaces. Heureusement, il ne nous avait pas vu. Il a fini par nous tourner le dos. Nous avons profité pour ne précipiter en avant pour nous cacher derrière un pilier. Le troll s’est tourné brusquement s’avançant vers le pilier où nous étions caché. Nous n’en menions pas large. Il est passé d’un côté du pilier pendant que nous passions de l’autre. Il a continué à avancer, nous en avons profité pour poursuivre la descente trouvant une nouvelle cachette plus loin.
Shaael grimaçait : elle craignait les trolls des glaces depuis qu’elle avait monté les 7000 marches pour rejoindre les Grises Barbes. La créature avait failli la tuer. Elle n’avait du son salut qu’après avoir glissé accidentellement sur un promontoire inaccessible pour le troll. Mais elle avait eu beau vider son carquois de flèches sur lui, il résistait. Bloquée et désespérée, elle ne voyait plus comment s’en sortir. Jusqu’à ce qu’elle se dise que peut-être une créature des neiges telle que lui, pourrait ne pas apprécier d’être brûlée. Elle avait quelques notions de magie et lui avait envoyé une série de boules de feu. Le troll a enfin montré des signes de faiblesses. Elle a continué ainsi en prenant des potions de magie pour envoyer à nouveau des boules de feu. Il a fini par tomber, enfin mort.
Toujours dans notre cachette, nous avons repéré un deuxième troll des glaces. Shaael secouait la tête : elle s’en voulait de m’avoir attirée là. Elle me regardait, je voyais la peur dans ses yeux. Elle ne s’inquiétait pas pour elle mais pour moi. Je lui ai souri en lui caressant le visage : « On va y arriver! ». Elle m’a rendu un sourire un peu angoissé et m’a pris la main. Elle a jeté un oeil dehors. Le deuxième troll nous tournait le dos. Nous nous sommes précipitées, de cachettes en cachettes. Nous arrivions à la sortie quand un grognement s’est fait entendre. Shaael nous a entraîné dans une petite hutte en pierre. Nous regardions le troisième troll dévaler les escaliers que nous avions emprunté quelques secondes auparavant. Nous avons sortie nos armes prêtes à nous défendre. Mais, dans sa rage de nous rejoindre, il nous avait perdu de vue. Il a regardé autour de lui essayant de distinguer où nous étions cachées.
Il y avait une autre sortie mais qui semblait bloquée au premier abord. J’ai quand même jeté un oeil : il y avait un passage, étroit mais nous pouvions passer. J’ai entraîné Shaael alors que le troll se rapprochait. Puis nous avons couru, empruntant les crêtes de montagne plutôt que les escaliers où nous étions trop visibles. Après plusieurs minutes de course effrénée, nous nous sommes écroulées épuisées, essayant de reprendre notre respiration. Puis, nous avons éclaté de rire, laissant échapper la tension accumulée.
Nous avons repris notre marche. Morthal n’était pas loin : nous avions rejoint la route. Mais une nouvelle fois, il a fallu nous cacher. Des bandits nous tournant le dos étaient en train d’attendre semblant près à tendre une embuscade. Une nouvelle fois, nous sommes passées à travers les bois pour les éviter.
Morthal était une toute petite ville avec une réputation assez effrayante. Apparemment, des phénomènes étranges se déroulaient la nuit. Nous avons préféré éviter d’y passer la nuit continuant notre route. Shaael était heureuse, elle avait enfin trouvé des grelots de la mort : des plantes que lui avait demandé de ramener l’apprentie de l’alchimiste de Faillaise.
Épuisées, nous avons fini par nous trouver un coin tranquille pour dormir à la belle étoile.