Jour 1 Elfist – Fingelien 381
L’Ilharess avait déposé un nouveau parchemin dans notre salle signalant les dernières attaques de Véreux contre Naralik. Apparemment, ce dernier avait décidé de faire de nos terres son lieu de pillage favori. Elle indiquait également que les natifs étaient très mécontents. Nous n’avions plus ni miliciens, ni sentinelles. Et bien sûr avec le départ de Fharath, plus de d’économe et plus de trésorière puisque Rhiordan avait donné sa démission.
La situation de notre peuple devenait critique… Je ne sais pourquoi mais tout cela m’a rendu extrêmement triste. Je me sentais responsable suite à ma réaction de colère envers Fharath. J’avais l’impression d’avoir contribué à l’effondrement de mon peuple! Et même si je ne me sentais aucune affinité avec la plupart de ses membres, et que j’avais décidé de ne plus faire partie d’eux, je n’arrivais pas à regarder en face la mort de celui-ci sans réagir.
Sous le coup de l’émotion, j’en ai parlé à mes compagnons d’armes de la gilde des Patrouilleurs. Je me disais que peut-être je pourrais les inciter à patrouiller de temps à autre à Naralik pour venir en aide à mon peuple. Mais je ne voulais pas le faire sans l’accord du Commandant. C’est alors que Bouh patrouilleur et actuellement représentant des Kultars m’a contacté par télépathie. Il proposait que son peuple vienne en aide à ses voisins les sombres. Je me doutais déjà de la réponse qu’allait me faire l’Ilharess : le peuple sombre était bien trop fier pour accepter l’aide de qui que ce soit…
Mais j’ai tout de même tenté, en demandant une audience privée à l’Ilharess Kharya. Celle-ci a accepté et nous nous sommes parlés par télépathie. J’ai commencé par lui dire que j’avais un peu parlé des difficultés que rencontraient les elfes noirs à mes compagnons Patrouilleurs. Elle semblait contrariée, n’appréciant pas que je divulgue ce genre d’informations en dehors de notre peuple. Je m’en doutait un peu mais j’ai continué en lui transmettant l’offre de Bouh. Elle a réagit telle que je l’imaginais : refusant toute aide extérieur. Elle a ajouté plus doucement que nous avions surtout besoin de « nous reconstruire de l’intérieur » et apparemment, elle avait une idée en tête pour réaliser cela.
J’ai alors demandé comment en tant que sombre dégénérée, je pourrais aider. Elle a paru surprise que j’emploie ce terme en parlant de moi. Je lui ai expliqué alors que j’avais beaucoup trop de sentiments pour une sombre. Elle a balayé cet argument d’une pichenette en disant qu’elle aussi avait des sentiments. Elle a trouvé amusant mon regard surpris. Elle m’a alors expliqué ce qu’elle avait tenté de faire en arrivant ici : se constituer une famille adoptive. Elle a d’abord recueillit une jeune sombre peu assurée nommée Ange Noire. Attendrie, elle l’a recueilli en tant que fille adoptive en la prenant sous son nom. Ange Noire s’est ensuite uni à MageInvok qui est alors ainsi devenu son fils. Elle m’a parlé également d’un frère et d’un fils muet mais qu’elle ne voyait plus… Elle m’a avoué avoir parfois l’impression d’avoir une pierre dans le coeur et quand celle-ci était trop lourde, elle se trouvait un masseur pour dénouer ses tensions ou des ogres à massacrer…
Cela faisait longtemps que je cherchais parmi mon peuple en dehors de Rhiordan, un elfe noir qui avait des sentiments autre que la haine et la colère. La réponse était en fait sous mes yeux. L’Ilharess était celle-là.
Elle a ensuite poursuivi : au sujet du peuple sombre, elle avait une idée en tête et elle allait faire des changements. Je lui ai alors parlé de mon âme soeur Rhiordan, de son malaise et de son envie de quitter les îlots. Elle a voulu savoir pourquoi nous nous appelions âme soeurs. Je lui ai expliqué alors cette espèce de connivence qu’il existait entre elle et moi de nous sentir tellement différentes des autres sombres.
Puis, mise en confiance, j’ai continué à lui confier ce qui était mon quotidien : le partage de mon corps avec l’esprit de ma mère. Me rendant compte que ceci pouvait paraître assez incroyable, je lui ai proposé de parler directement à La Sombre. Mais l’Ilharess ne semblait pas vraiment surprise et elle accepta de lui parler. Ma mère égale à elle même, n’a fait aucune cérémonie, ne respectant pas beaucoup le statut de celle qu’elle avait en face d’elle. Mais la matriarche n’en a pas pris ombrage. Elle lui a demandé qui elle était et ce qu’elle faisait dans mon corps. Elle a même taquiné La Sombre en lui reprochant d’avoir eu peur de rejoindre Lith quand elle a fait le rituel au moment de ma naissance. Ma mère était furieuse mais elle a réussit à lui expliquer qu’à ces yeux c’était la seule solution pour me protéger. Je crois que si cette discussion s’était passée quelques mois plus tôt l’Ilharess aurait subi la violence de La Sombre. Mais ma mère était maintenant plus apaisée depuis qu’elle avait retrouvé l’entièreté de ses souvenirs. Ça ne l’a pas empêchée de menacer l’Ilharess de mort si celle-ci me faisait du mal. La Sombre m’a ensuite laisser reprendre le contrôle. J’étais assez gênée de ce qu’elle avait fait mais la Matriarche ne semblait pas choquée. Elle me parla d’un certain Mirolas qui avait comme moi 2 esprits en lui : un esprit respectueux et doux et un autre plus vénal. Mais semble-t-il ce n’était pas pour les mêmes raisons que moi. Elle me raconta que l’esprit « mauvais » avait était enfoui dans Mirolas suite à un rituel que Polgarath alors encore Haute-prêtresse avait réalisé. Interloquée, j’ai demandé où trouver ses informations. Apparemment, elles étaient dans les archives de notre salle. Alors que mon esprit fonctionnait à toute allure et se demandait si il s’agissait de la solution à mon problème, je sentais l’esprit de ma mère inquiet. J’ai donc laissé tomber cette discussion.
Je ne sais pourquoi, peut-être parce que j’étais en mal de confidences et que je voulais que l’Ilharess comprenne qui j’étais, je lui ai parlé de Kely. Surprise, elle m’a confié qu’elle n’avait jamais essayé les bleus. Soudain inquiète qu’elle veuille me prendre mon mâle, j’ai rétorqué que je n’avais pas l’intention de lui prêter. Amusée, elle m’a dit qu’elle n’était pas voleuse… puis après un instant de réflexion, elle a ajouté : « pas toujours ».
Je crois que ce jour là l’Ilharess a appris énormément de chose sur moi et moi sur elle. J’ai compris que je m’étais trompée sur son compte : elle était bien moins froide et dure et beaucoup plus accessible que je ne l’imaginais.
Depuis cette conversation, j’essaie d’être plus présente sur nos ondes et je fais des patrouilles régulières à Naralik. Après avoir voulu le quitter, l’Ilharess m’a une nouvelle fois rapprochée de mon peuple.