Jour 8 Elouenien – Fingelien 384
Cela fait des jours que j’ai quitté les îlots de Draïa après avoir reçu trois lettres. Les deux premières venaient de Kharya.
« Ss’Fenyillya,
J’ai enfin pu atteindre le village Galdur que je cherchais. Le trajet a été long et éprouvant. Les prédateurs dans cette région sont tenaces. J’ai eu la surprise d’être reconnue par quelques uns de habitants. L’accueil a été assez cordial. Cela m’a apaisé un peu.
J’ai bien vite appris qu’Oscarhamel avait fait une halte au village un mois plus tôt, mal en point. Arahda était indemne. Ils ne restèrent que quelques jours le temps que mon sombre reprenne des forces. Oscarhamel n’a pas donné de raison à ce nouveau départ. J’ai été rassurée bien que l’inquiétude soit rapidement revenue.
Je vais rester quelques jours prendre du repos. Une sensation indéfinissable m’étreint depuis mon arrivée. C’est quelque chose de familier mais je n’arrive pas encore à déterminer ce que c’est. Comme si mon instinct était à l’affût. J’en saurais sûrement plus après m’être suffisamment reposée pour méditer.
Puisse le Loup te guider.
Je t’embrasse,
Kharya. »
« Ss’Fenyillya,
Je n’ai pas trouvé de coursier pour ma précédente letttre, je te la joins avec celle-ci. J’ai trouvé ce que je ressentais depuis mon arrivée. Lorsque je portais Arahda en mon sein, je percevais de lui un pouvoir particulier. Il était capable d’influer sur mes sentiments. D’en susciter certains et d’en apaiser d’autres. Ce que j’ai senti était en fait une sorte d’appel qu’il me faisait. Cela m’a fait immédiatement penser que son père et lui ne devaient pas être si éloignés du village.
Je me suis laissé guider. Je me suis enfoncée dans les montagnes jusqu’à l’entrée d’une grotte bien dissimulée. Je suis entrée et j’ai découvert une paire d’yeux améthyste me fixant avec intensité comme pour sonder mon âme. Je me suis accroupie à sa hauteur lui rendant un regard identique. J’ai sentit une vague de peur et de soulagement m’envahir. Il n’en fallut pas d’avantage pour que je sache qu’Arahda me demandait de l’aide pour son père.
Os’ était allongé dans une cavité un peu plus profonde. Il est faible et fièvreux. Une vilaine entaille lui barre le flanc. Une lame empoisonnée, assurément. Il a essayé de se faire un antidote mais visiblement il n’a pas réussit à se guérir. Il n’arrive pas à parler. Je ne suis pas sure qu’il ait compris que je suis là, je crois qu’il pense qu’il délire.
Je vais rester auprès d’eux quelques temps. Demain, j’irai au village pour trouver de quoi le soigner et aussi envoyer ces lettres.
Tiens bon, si la Déesse le veut, je serai bientôt de retour.
Je t’embrasse.
Kharya. »
J’étais heureuse pour elle et je me réjouissais déjà à l’accueillir bientôt et la serrer dans mes bras. Mais la troisième lettre a glacé toute la joie qui m’avait envahie. La lettre venait de Lydia, une humaine qui avait été affectée au service de Shaael par le Jarl de Blancherive. Celle-ci m’indiquait que Shaael avait disparue depuis mon départ de Bordeciel.
Je suis partie en catastrophe des îlots laissant la « gérance » du conseil à Polgarath sous les reproches de Mulvaar qui n’appréciait pas que je décide de choisir seule celle qui aller devoir me remplacer.
Cela fait des jours que je cherche Shaael dans les contrées glacées de Bordeciel. Je suis terrifiée à l’idée de découvrir son corps quelques part. Je dors à peine… mes rares heures de sommeil sont ponctuées de cauchemars, où Shaael sous une forme éthérée s’éloigne de plus en plus de moi…
J’ai fini par arrêter mes recherches quelques instants pour écrire une lettre à Kharya.
« Ma Shaa’enySs,
J’ai reçu tes deux lettres, elles sont arrivées en même temps qu’une troisième.
Je suis heureuse que tu ais retrouvée ton mâle et ton fils. J’imagine que celui-ci doit être magnifique avec une mère aussi belle que toi. Et si il a tes superbes yeux améthystes, aucune femelle ne lui résistera. Que comptes tu faire d’eux? Vas tu les ramener sur les îlots?
Quand à moi, j’ai du partir précipitamment… La troisième lettre était celle d’une humaine Lydia qui avait été affectée au service de Shaael quand elle devenue Thann de la ville de Blancherive. Elle me faisait savoir que Shaael n’était pas réapparue depuis mon départ de Bordeciel et elle se demandait si elle était venue me rejoindre… Mais comment le pourrait elle? Je l’avait toujours prévenue qu’il ne fallait jamais qu’elle y mette les pieds : les Landes pourraient la transformer en démon d’jhi.
Morte d’inquiétude, j’ai fait savoir sur nos ondes que je devais partir et que je laissais la gérance du conseil à Polgarath en attendant ton retour que j’espérais proche. Mulvaar m’a reprochée de prendre cette décision seule sans en avertir le conseil mais je ne pouvais attendre que tous les membres soient là. J’espère que tu as pu revenir assez vite comme tu me l’as dit dans ta lettre…
Voilà maintenant des jours et des jours que je cherche Shaael dans tous les coins de Bordeciel… Je dors et je mange à peine. L’angoisse de ne pas la retrouver vivante enserre mon coeur dans un étau douloureux… J’ai peur…
Elle me manque… autant que tu me manques…
Que Khala veille sur toi.
Khaena. »
J’ai trouvé un coursier pour lui remettre la lettre et je suis repartie dans mes recherches, poussée par la terrible angoisse d’avoir perdue ma femelle chat.