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La folie des téléporteurs

Je ne sais pourquoi mais soudain les téléporteurs nous ont été disponibles sans que nous ayons besoin d’acheter des pactes auprès des Kamis ou de la Karavan. Je suppose que ceux-ci sentant venir la menace facilitaient les déplacements des homins pour la surveillance de l’invasion kitins.

Ça a été l’occasion pour moi de découvrir des recoins d’Atys qui normalement m’étaient inaccessibles sans escorte. J’ai souvent visité seule les différentes destinations avec plus ou moins de succès. Il y avait parfois de mauvaises surprises comme de se retrouver au milieu d’un groupe de varynx ou de kitines.
Parfois, on rencontrait des personnages singuliers. Certains étaient antipathiques comme cette furie qui avait installé des explosifs un peu partout autour de sa maison ou cette autre qui avait dressé des varynx pour attaquer ceux qui l’approchait trop.

Une fois avec Eeri, nous sommes tombées par hasard dans un endroit complètement inconnu, sans doute dû à une panne de téléporteur. Un fyros étrange et un peu étonnée de nous voir là, nous a accueilli. Il s’appelait Mawa. Cela faisait des années qu’il habitait seul ici dans ce qu’il semblait être les terres anciennes. Il s’était retrouvé seul après que tous les autres homins aient fait le voyage vers les nouvelles terres. Il avait été oublié… J’étais émue par son histoire pourtant il ne semblait pas trop souffrir de la solitude. Il nous a fait visiter fièrement son « pays » et son « lac privé ». J’avais peur pour lui la moindre bestiole agressive lui infligeait de graves blessures. Sans nos soins, il aurait sans doute succombé mais çà ne semblait pas le tracasser. Il courrait partout parcourant ses terres qu’il voulait nous faire découvrir. Au moment de partir, nous lui avons proposé de venir avec nous. Il a refusé. Je crois qu’il s’était habitué à sa solitude. D’ailleurs, sans doute se serait il senti complètement perdu et agressé parmi autant d’homins. Nous l’avons donc laissé sur ses terres en sachant qu’il était fort probable que plus jamais nous ne pourrions à nouveau le rejoindre.

Grâce aux téléporteurs, Glorf nous a proposé une expédition dans la kitinière… Je n’étais pas particulièrement chaude. Allez directement dans le nid des kitines, c’était courir au suicide selon moi. Mais il affirmait qu’il y avait des endroits sécurisés où on ne risquait rien. Après tout, j’étais curieuse : je me suis téléportée près de lui. Dinomir nous a rejoint également. Glorf nous a montré la salle de la reine : une immense grotte dont on distinguait à peine les parois. Glorf affirmait que la reine kitine prenait toute la place. Je n’osais imaginer la taille de la bête… Mais là, la grotte était vide. Où était la reine?

Tout çà était plutôt inquiétant. D’autres légionnaires ont fini par nous rejoindre. Nous avons eu envie d’aller taquiner les kitines qui étaient encore là… Mal nous en a pris, enfin surtout en ce qui me concernait. Je ne sais combien fois j’ai succombé. Mais à chaque fois, Morandy ou Dinomir me relevaient. Nous sommes retournés à Pyr, l’esprit préoccupé : les kitines étaient sorties de leur nid. Cela ne présageait rien de bon…

Une angoisse sourde me taraudait : est ce qu’un deuxième grand essaim était en préparation ? J’essayais d’oublier tout çà continuant mes balades à travers Atys avec une préférence pour le désert fyros mais aussi le pays tryker. J’ai trouvé une île déserte où j’ai passé souvent mes nuits après avoir regardé le coucher de soleil.

Là bas, j’étais loin de toute l’agitation de la ville et la beauté du paysage me redonnait courage et espoir dans l’avenir.

Première réunion de la N’ASA

Avec les explications d’Anyume, j’ai rejoint le bois d’Almati où avait lieu la réunion de la N’ASA (Nouvelle Académie des Sciences d’Atys). Je n’étais pas très rassurée de me retrouver dans cet endroit que je savais occupé par des kitines même si je m’étais déjà rendue sur place lors des fêtes d’Anlor Winn. Mais ce jour-là les abords avaient été sécurisés pour permettre à tous de participer et puis j’étais avec d’autres légionnaires.

Cette fois, j’étais seule… Mais, au final, j’ai traversé tout le bois sans rencontrer une seule kitine pour arriver au milieu du camp ranger… oui ranger!!! La dernière fois, je n’avais pas fait attention… Il y avait des rangers partout avec leurs armures blanches et vertes! Je sautais de joie : les rangers étaient là au bois d’Almati. En discutant avec certains d’entre eux, ils m’ont expliqué leur présence ici : ils surveillaient l’entrée de la kitinière. Je suis restée bouche bée : « la kitinière??? ». Je me souvenais des luciogrammes que Kyshala avait fait dans le nid des kitines. Mais dans son cube d’ambre, elle n’avait jamais parlé de la façon dont elle avait atterrit là bas… Les rangers étaient donc là en première ligne protégeant les homins des invasions kitines.

Alors que je discutais avec quelques rangers, j’ai vu Na Djaï’tal non loin de là. J’ai couru pour le rejoindre. Mais, je suis tombée en plein sur une scène que je n’aurais sans doute pas dû voir. Anyume avait sauté dans les bras du grand zoraï et celui-ci la serrait contre lui : « Woha la belle ! ». Auquel elle a répondu : « Bankun mon beau ! ». Ils se souriaient tendrement. Je trouvais la scène touchante. Et soudain, ils m’ont aperçu. Anyume s’est mise à rougir et la sève de Na Djaï’tal lui ai monté au masque… Du coup, je me sentais très gênée de les avoir dérangés. J’ai proposé de les laisser mais Anyume m’a retenue, elle était heureuse de me voir.

Nous étions en avance pour la réunion. Na Djaï’tal nous a alors raconté qu’il avait fait un tour dans la kitinière. Anyume et moi l’avons regardé comme si il avait perdu la tête. Il a alors sorti un petit sac et l’a ouvert devant nous. Il y avait des espèces de larves grouillantes et peu ragoutantes. Nous avons eu une grimace de dégoût. Que voulait il en faire? Les manger? Grillées çà pouvait être bon… Mais, le grand bleu ne savait pas encore ce qu’il allait en faire. Anyume était inquiète : « Manipuler des machins kitins, ça me parait risqué… Il faut juste les détruire, pas commencer à leur trouver une utilité ! ». Na Djaï’tal s’est moqué gentiment d’elle : « Tu as peur que je devienne un Kirosta ? ». Il a commencé à faire des grimaces en la piquant avec le doigt. Anyume s’est mise à rire. Puis elle a commencé à imiter la démarche d’une kitine. J’ai souri trouvant, une fois de plus, leur tendresse et leur complicité très touchantes. Cela ressemblait à un amour naissant, naïf et tendre comme celui que ne peuvent vivre que ceux qui n’ont pas déjà été brûlés par le feu de la passion… comme celui… non!!!
J’ai refermé violemment la boite de mes souvenirs les plus sombres…

L’heure de la réunion était arrivée. Nous étions tout près de l’entrée de la kitinière ce qui n’était pas très rassurant… Zo’ro Argh était déjà là ainsi que d’autres homins comme Mindae, la fière et belle matis rousse qui nous avait conduit dans les sources cachées. Zo’ro Argh a commencé et nous a rapidement présenté ce qu’était la N’ASA :
« Avant le second essaim, nous avions créé un traité de paix entre nations. En tant que scientifique, j’estimais que les accords politiques étaient insuffisants pour maîtriser les grands dangers : la goo, les kitines… Avec d’autres amis scientifiques nous nous sommes réunis pour trouver de nouvelles solutions. Il fallait un endroit neutre dans tous les sens pour permettre la créativité. Ici, dans l’ASA, nous mettons de côté nos divergences politiques et religieuses.
Notre première règle est de respecter toute intelligence… et donc de ne pas critiquer les idées d’un chercheur. Certaines peuvent être « folles » : par exemple certains espèrent « apprivoiser » les kitins, d’autres espère détruire la goo par fermentation… Et il y a plein d’autre idées de ce style… En plus, parfois nous étudions d’autres choses pour le bien être de tous ou tout simplement pour la science.
Hélas, le second essaim nous frappa avant que l’on ait trouvé comment maîtriser les kitines. Mais, l’ASA devait renaître de ses cendres et réunir encore plus les homins chercheurs: c’est devenu aujourd’hui la Nouvelle… ASA… la N’ASA « .

Zo’ro Argh a proposé ensuite à chacun de se présenter. La zoraï Fey-Lin a commencé : elle était déjà là quand l’ASA existait encore et s’est portée volontaire pour faire partir du groupe d’éthique chargé de surveiller les agissement des scientifique de la N’ASA.

Puis, la tryker Krill s’est présentée sans oublier de boire un longue gorgée à la gourde qu’elle avait emportée. Elle se définissait comme une amie de l’ASA et ne comptait pas être une scientifique sauf si une branche Alcool était montée. Ca m’a fait beaucoup rire.

Les présentations continuaient alors que je remarquais la matis à côté de moi : une peau d’une pâleur extrême mais surtout elle était chauve enfin… pas vraiment chauve… les cheveux coupés aussi courts que moi… C’était la première fois que je voyais une matis ainsi coiffée. Quand j’en ai fait la remarque à Anyume, elle a dit : « Je trouve ça étrange… Toi aussi en fait. Pourquoi couper aussi court ? ». J’ai bafouillé une vague explication peu convaincante, j’avais copié la coiffure d’Eeri et puis c’était plus facile les cheveux courts quand on était légionnaire… Mais au fond de moi, je savais que je me mentais à moi même. Anyume a fini par déclaré que cela m’allait bien en fait et que çà se mariait bien avec mon tatouage.

La présentation de la matis chauve a été très succincte, elle se nommait Dirae et était venue en curieuse. Elle a déclaré avec un ton légèrement hautin : « Je me demande toujours comment de simples homins peuvent réussir là où la Grande Karavan ne trouve pas de réponse ».

C’était mon tour, je ne me souviens plus de ce que j’ai dit, un discours des plus banals. Puis Anyume a pris la parole. J’ai vu Zo’ro Argh sursauter quand elle a parlé des carnets codés de Laofa. Et son regard et celui de Krill s’assombrir quand Anyume a annoncé sa mort. De toutes évidences, il savait ce qu’il pouvait y avoir dans les carnets. Mais, il préférait en parler après la réunion.

Il a alors demandé à la « voisine zoraï » d’Anyume de se présenter. Nous avons éclaté de rire car la « voisine zoraï » était Na Djaï’tal. Il s’est levé en précisant qu’il était « UN » zoraï. Il n’avait pas beaucoup à dire à part qu’il soutenait le projet.

Mindae a alors pris la parole. Elle aussi était candidate pour faire partie du groupe d’éthique car elle s’était inquiétée des dérives que certains scientifiques pourraient avoir. J’avais cru comprendre lors de notre dernière rencontre qu’elle était assez religieuse. Elle nous avait même précisé qu’elle était Jénaïste. J’avais cru à un moment qu’il s’agissait d’un courant du culte Karavan. Mais Anyume m’avait expliqué que pour les Jénaïstes, « Jena était la déesse et les kamis son expression ». Elle a ajouté : « C’est étrange, hein, ce besoin d’avoir une force supérieure pour justifier le monde ? ». J’ai souri, elle avait la même opinion que moi sur la religion. Ca me rappelait une anecdote avec Kyshala. J’étais encore toute jeune quand je lui avais dit que je pensais que les « dieux » et « déesses » étaient les peluches des adultes. Ça a fait rire Anyume qui a déclaré qu’elle ressortirait ma citation au prochain athée ou croyant qui l’ennuierai.

Et puis, çà été au tour de Rajaaar, un matis. Lui aussi faisait partie à l’époque de l’ASA mais il n’était pas scientifique pourtant il faisait de son mieux pour participer. Il a déclaré avoir tenté des expériences sur la fermentation ce qui a fait ricaner Krill. Par contre, j’ai senti Mindae se raidir quand il a parlé de ces expériences sur l’impact de la Goo sur l’eau…

Et enfin, Zo’ro Argh s’est présenté lui aussi. il a parlé de la guilde Hoodo qui était en sommeil. J’ai été étonné puisqu’il portait l’écusson de la tribu Talodi. Il a expliqué par la suite que la tribu Talodi les avait accepté en leur sein pour les protéger mais que bientôt la guilde Hoodo renaîtrait de ces cendres. La réunion s’est terminé là. La plupart des participants sont partis.

Mais Anyume s’est apporché de Zo’ro Argh et de Fey-Lin. Elle voulait savoir pour son carnet. Cela faisait huit années entières qu’elle le gardait en espérant trouver quelqu’un sachant le décrypter. Je n’osais pas m’approcher, ne sachant pas si j’avais le droit d’entrer dans ce genre de secret. Mais le regard d’Ayume m’a fait comprendre qu’elle voulait que je sois à ses côtés. Zo’ro Argh restait très évasif, tournant autour du pot, ce qui avait le don d’agacer tout le monde. Il a fini par nous conduire vers la kitinière.

Mon coeur s’est mis à battre plus fort, une sourde angoisse me tenaillait. J’ai vu Anyume et Na Djaï’tal se tenir la main pour se donner du courage. Pourquoi ce geste tendre m’a fait monter les larmes aux yeux? Non… je ne voulais pas me souvenir… J’ai planté mes ongles de les paumes de ma main et j’ai avancé vers le vortex d’entrée d’un pas décidé en crispant les mâchoires. L’entrée de la kitinière était fortement gardée par les rangers, ce qui m’a rassurée. Nous ne nous sommes pas éloignée beaucoup de l’entrée. Zo’ro Argh a expliqué que pour décrypter un secret, il fallait deux clés : Anyume et son carnet et les affaires de Laofa qu’il avait entreposé dans une grotte de la kitinière. Il nous a montré l’endroit.

Nous espérions que le code serait décrypté très vite mais Zo’ro Argh a tempéré notre impatience… Cela prendrait des jours avant de réussir à obtenir quelque chose du carnet. Nous sommes ressortis de la kitinière un peu déçus mais nous étions tous épuisés.

Je me suis endormie sur place mais mon sommeil a été peuplé de cauchemars. Je me suis réveillée plusieurs fois en sursaut en train de hurler, tremblante et dégoulinant d’une sueur glacée… J’ai fini par me lever alors que le soleil n’avait même pas encore fait son apparition. Je suis redescendue seule dans la kitinière comme attirée irrésistiblement par la source de la cause de toutes ces morts. La vue d’un énorme kirosta m’a comme éveillée… Qu’est ce que je cherchais à faire? Kyshala n’était pas là… et même si les kitines l’avaient entraînée là, elles avaient du la dévorer depuis longtemps…

Je suis ressortie avec comme un grand vide dans la tête et dans le coeur…

Dans la kitinière

Pendant la nuit que j’ai passée avec Na Djaï’tal, j’ai fait un horrible cauchemar. Je suppose que la première nuit que je passais avec un homin depuis ce que j’avais subis, ont réveillés mes douleurs secrètes. Je ne me souviens plus de grand chose de ce qu’il s’est passé mais Na Djaï’tal m’a raconté qu’il m’avait vu me débattre contre un ennemi invisible. Il avait tenté de me calmer mais j’étais somnambule. Je ne le voyais pas. J’ai déchiré un pacte et je lui ai échappé sans qu’il arrive à me retenir.

J’ai tenté d’écrire ici ce dont je me souviens. Mais l’ensemble de ce que j’ai vécu reste flou.

La fuite

Je me réveille dans le noir… J’ai du mal à respirer… la poussière envahit ma bouche, mes yeux… Je panique et tente de faire un mouvement qui m’arrache un cri de douleur. Pourtant, il faut que je respire. Je sens que si je reste ainsi, je ne survivrai pas étouffée par la terre qui me recouvre… De la main qui ne me fait pas souffrir, je réussis à creuser doucement en espérant que je creuse vers l’air… Enfin, une bouffée d’air m’arrive en plein visage. Je respire… reprenant mon souffle… Je finis par me dégager complètement en poussant parfois des gémissements de douleur. Je commence à m’habituer à l’obscurité et je vois que mon bras qui me fait tant souffrir a une drôle de courbure…
Je regarde autour de moi. Il y a des larves… des grosses larves de kitines répugnantes. Je me souviens alors comment je suis arrivée là. Mon rêve si beau dans les bras de Na Djaï’tal qui s’était transformé en cauchemar. J’étais entravée par des bras, des homins m’entouraient et m’empêchaient de bouger. J’ai hurlé et pris un pacte de téléportation. J’ai couru ensuite me cognant partout. Je m’étais retrouvée devant le kami poilu de Zora et j’avais hurlé de me laisser aller au bois d’almati… les rangers… les rangers m’aideraient… Je courrais dans tous les sens à moitié somnambule. Je me suis retrouvée dans la kitinière des kitines à mes trousses… et soudain… le sol qui s’effondre sous mes pieds… puis le noir…

La peur

Je m’étais évanouie à nouveau mais des bruits de cliquètements me réveillent. Je reconnais le bruit caractéristique des pattes de kitines sur le sol. Impossible de fuir… Les kitines allaient me dévorer comme elles avaient sans doute dévoré Kyshala. Je voyais l’ombre de l’énorme kitine approcher, sans doute attirée par l’odeur de l’homine que j’étais. Je ne trouvais pas mes pactes de téléportation sans doute perdus dans ma chute.

Il ne fallait pas que je meure… J’avait tant à vivre avec Eeri, Anyume et Na Djaï’tal… Ils devaient être horriblement inquiets tous. Si je ne revenais pas, je sentais qu’Eeri ne s’en remettrait pas, elle qui avait tellement souffert de ne pas avoir su « protéger » Kyshala. J’étais moins inquiète pour Anyume et Na Djaï’tal qui sauraient se réconforter mutuellement…

Il fallait que je survive… Dans un dernier réflexe, j’attrape une larve et la frotte contre moi pour m’imprégner de son odeur. L’énorme kitine s’approche des larves et de moi. Elle commence à tâter de sa griffe les larves, semblant sentir leur odeur. Je me tétanise, retenant ma respiration espérant passer inaperçue. La griffe arrive sur moi. Je me dit que c’est la fin… La kitine hésite tâte et me griffe un peu. Je retiens un cri de douleur quand la griffe s’attarde sur mon bras blessé. Puis la créature repart sans doute troublée par cette étrange larve mais sans m’attaquer.

La douleur

Je recommence à respirer, blanche comme une matisse anémiée. Il faut sortir d’ici. Il faudrait que je me soigne mais impossible avec mon bras de faire les gestes appropriés à l’incantation de soin… Et puis, ma sève est au plus bas. Il faut déjà faire cesser la douleur de mon bras qui pendouille lamentablement et qui m’arrache des gémissements de douleurs à chaque mouvement. Je dois l’immobiliser d’une façon ou d’une autre… Je cherche d’une main dans mon sac l’armure zoraï blanche qu’Eeri m’avait offerte et dont je n’ai jamais pu me séparer malgré son état d’usure. Je pleure en la déchirant petit à petit pour me fabriquer une sorte d’écharpe que je passe autour de son cou. Le plus difficile maintenant réussir à mettre le bras dans l’écharpe. Je m’enfourne un morceau de l’armure dans la bouche pour étouffer mes cris qui ne manqueront pas de venir.

Je hurle de douleur en mettant le bras dans l’écharpe manquant de m’évanouir à nouveau. Il me faut plusieurs minutes avant d’oser faire un mouvement attendant que la douleur lancinante se calme. Je regarde mon bras… Je sais que c’est grave. Je n’arrive plus à bouger les doigts et la main. Est ce que la magie curative sera assez forte pour le remettre en place et ressouder les os brisés ? Est ce que je vais devenir infirme?

Une chose est sûre, plus le temps passe moins la guérison sera possible. Est ce que Na Djaï’tal, Anyume et Eeri, m’aimeront toujours si je deviens infirme? Est ce que je pourrais encore leur offrir les caresses que j’aime tant leur donner? Mes larmes débordent à nouveau à l’idée de les perdre. Je finis par m’endormir secouée par des sanglots de douleur.

Le réconfort

La soif me réveille. Je n’ai rien bu ni manger depuis que j’ai fui comme une folle. Ma bouche est sèche comme si j’étais restée en plein soleil dans le désert pendant des jours. Je cherche dans son sac. Je souris. Il me reste des gourdes d’eau qu’Eeri m’avait offertes pour m’aider dans ma quête de renommée auprès des différents peuples d’Atys. Je bois avec l’avidité d’une assoiffée. Je pense au surnom que Na Djaï’tal m’a donné : Cracheuse d’eau… Je ris doucement. Cette eau là, je ne la cracherai pas. Eeri se moquerait gentiment de moi si elle me voyais boire autant d’eau en aussi peu de temps. Mais sans doute qu’Anyume approuverait que je me désaltère avec de l’eau plutôt qu’avec de la bière de shooki. L’eau me redonne des forces.

Mon ventre se met à grogner. J’ai faim. Penser à Anyume, Eeri et Na Djaï’tal, me fais du bien et me donne envie de les retrouver. Il faut que je mange. Je cherche à nouveau dans mon sac. Anyume m’a laissée une boite de petits gâteaux secs que j’aime tant, Eeri du fromage de capryni et Na Djaï’tal un sac rempli de baies. Je mange doucement en faisant attention à chaque bouchée… Qui sait combien de temps je resterai ici… il faut que j’économise.

Je regarde mon bras blessé. Il a toujours cette courbure horrible. Je n’arrive toujours pas à bouger ma main. Je hausse les épaules : je suis vivante c’est déjà çà. Je me rend compte que je suis couverte de poussière de la tête au pied. Je m’apprête à me nettoyer avec un peu d’eau puis je retiens son geste… mieux vaut rester couleur terre pour passer inaperçu et éviter de faire ressortir son odeur d’homine.

Je regarde autour de moi. Je suis toujours entourée des larves de kitines. Je regarde le trou par lequel je suis tombée… impossible de remonter par là surtout avec un seul bras valide. Devant moi, il y a le tunnel d’où j’ai vu déboucher la kitine. C’est la seule sortie… Je prends une des larves près de moi, je me frotte à nouveau avec pour m’imprégner de son odeur répugnante. Je la mets dans mon sac au cas où…

J’essaie de me lever. Chaque muscle de mon corps endolori me fait souffrir et malgré la douleur de mon bras, je parviens à me lever. La tête me tourne. Je suis prise de nausées. Je me retient à la paroi. Non, il ne faut pas que je m’évanouisse à nouveau… Personne ne me trouvera, où je suis. Il faut que j’avance, que je remonte à la surface ou du moins que je m’en approche… J’avance doucement, difficilement prise de nausée à chaque pas. Je serre les dents et le poing de mon bras valide. Je vais y arriver : il le faut. Je ne veux qu’une chose retrouver les bras de Na Djaï’tal, Eeri et Anyume.

Le labyrinthe

J’avance le long du tunnel. Chaque pas est une douleur. Parfois, Je m’arrête appuyant mon dos contre la paroi pour reprendre mon souffle. Mais pourquoi une fois de plus, je m’étais enfuie dans la kitinière? A chaque fois que j’avais eu mes cauchemars, je me retrouvais ici ou non loin de là comme si je tentais de rejoindre Kyshala. Quelle idiotie! Comme si Kyshala pouvait être encore là… Même si les kitines l’avaient traînée jusqu’ici, elles l’avaient sans doute dévorée depuis longtemps… Je secoue la tête.

Je reprend ma marche à petits pas. Le tunnel s’élargit soudain. J’arrive dans une immense pièce remplie de kitines. Je me plaque contre la paroi prise de terreur, le cœur battant la chamade. Mais les immenses insectes passent devant moi sans me prêter attention continuant leurs activités. Toujours collée à la paroi, je rejoins l’entrée d’un autre tunnel… Celui-ci semble descendre dans les profondeurs. Pas celui-là… un autre… Je continue pressée de quitter cette pièce qui me terrorise. J’arrive sur l’entrée d’un autre tunnel, je manque de rentrer en collision avec une kitine qui revient avec son butin de chair sanglante… Je panique complètement en imaginant que la chair est celle d’un homin. Je cours horrifiée droit devant dans le tunnel qui semble heureusement remonter. La douleur que j’inflige à mon corps martyrisé, finit par m’arrêter. Les nausées me reprennent. Je me mets à vomir tout ce que j’avais réussi à avaler quelques heures auparavant.

Je sens que je vais m’évanouir… il faut que je trouve un endroit… pas au milieu du couloir… Il y a un petit recoin dans la roche. J’use mes dernières forces pour m’y glisser avant de m’évanouir à nouveau.

La nurserie

A nouveau ces cliquètements qui me réveillent. La kitine reste là tâtant à droite et à gauche. Je la distingue dans une sorte brouillard… Depuis combien de temps est elle là? La créature semble chercher quelque chose. Ça doit être moi… Mon odeur d’homine… dans un dernier réflexe de survie, je sors la larve et me frotte avec. Je n’arrive même pas à avoir peur tellement je suis épuisée… Peut-être que je devrais me laisser mourir? Après tout, les kamis récupéreront ma graine de vie? Mais, en auront-ils la possibilité? Les kitines pourraient me dévorer entièrement et ma graine de vie avec…

La kitine s’approche. Elle m’a trouvée. Elle m’extrait de mon recoin. Je me dis que c’est la fin. Je ne cherche même pas à lutter après tout je ne souffrirai plus… Mais étrangement la kitine ne me tue pas et m’emporte avec elle. Je distingue le sol qui bouge sous moi mais ma vue est brouillée… Je m’évanouis à nouveau.

Je sens soudain que la kitine me repose sur le sol. Il fait une douce chaleur ici. Je sens des mouvements à côté de moi. Je tente d’ouvrir les yeux : des larves, des larves partout… Ça doit être la nurserie des kitines. La créature m’a prise pour une larve égarée et m’a reconduit auprès des autres larves. Je commence à me rendormir… mais j’entends Eeri et Na Djaï’tal qui m’appellent… Est ce un rêve? J’essaie de me redresser… il faut que je boive… si je me rendors… je sens que je ne me réveillerai plus. Les outres d’eau d’Eeri. Je fais l’effort de me redresser un peu pour boire. Ça me fait du bien… Je mange à nouveau les gâteaux d’Anyume, les baies de Na Djaï’tal et le fromage d’Eeri. Cette fois, il faut que je garde tout pour que mon corps reprenne des forces.

Il faut sortir d’ici. Je repars à nouveau avec toujours cette douleur, la tête qui me tourne, les nausées. J’avance… Je ne panique plus à la vue des kitines… si elles doivent me tuer qu’elles le fassent! Je prends les tunnels qui remontent sans vraiment de cohérence. Je me pousse quand je croise des kitines. Je marche jusqu’à épuisement complet. Je trouve un petit recoin dans la roche et cette fois, j’en bouche l’entrée en laissant un petit morceau de mon armure zoraï au cas où quelqu’un passe par là. Il ne faut pas que les kitines me ramènent plus bas. Je bois et mange à nouveau avant de m’endormir.

Le sauvetage

J’entendais Eeri m’appeler. Est ce que c’était un rêve? J’ai tenté d’ouvrir les yeux mais je ne voyais rien… Il y avait une ombre qui me murmurait : « Shaakya… ». J’ai tendu la main. Puis, une voix inquiète encore : « Shaakya, c’est moi!! réveille toi!! ». Est ce que c’était Eeri? Est ce qu’elle était vraiment là? A nouveau, j’ai tenté d’ouvrir les yeux. L’ombre m’a pris la tête et m’a caressé le front : « Shaakya!!! C’est moi… Je t’ai trouvée… Tout va bien maintenant. ». Je reconnaissais les caresses de mon amante : c’était Eeri. J’ai souri.

Elle m’a serrée très doucement contre elle en me caressant le visage. J’ai murmuré : « Je savais que tu me chercherais… ». Elle a souri puis s’est mise à pleurer : « J’étais si inquiète… ». Je voulais la réconforter. J’ai tendu ma main vers son visage mais mon bras était si lourd… Elle a pris ma main pour la poser sur sa joue. Ça me faisait tellement de bien de sentir sa peau. Mais elle était inquiète : « Nous ne pouvons pas rester ici! ».

J’avais soif. Elle m’a fait boire doucement en me nettoyant doucement le visage avec un petit morceau de tissu humide. J’ai souri : « J’avais tes gourdes d’eau… et ton fromage. ». Elle me tenait toujours contre elle : « Je vais te faire sortir d’ici… Nadjaï’tal n’est pas loin, il a du retourner au camp. ». J’ai demandé : « Il me cherche aussi? ». Elle a répondu : « Oui… Et Anyumé aussi. Nous étions tous trois morts d’inquiétude… ». Je m’en voulais : « Je suis désolée… j’ai fait un cauchemar… ». Elle m’a serrée contre elle : « Ce n’est pas grave, ce n’est rien. L’important c’est que tu sois là, avec moi… ».

La douleur de mon bras s’est réveillée : « J’ai mal… ». Elle a regardé mon bras en écharpe retenue par les morceaux de l’armure zoraï qu’elle m’avait offerte. Ça m’a soudain fait pleurer : « J’ai dû déchirer l’armure que tu m’avais offerte. Je la gardais tout le temps… ». Elle a passé une main douce sur mes larmes : « Ce n’est pas grave, Shaakya, l’armure… ». Mais, je sanglotais toujours comme une enfant : « Si… c’était… c’était un cadeau de toi… ». Elle avait la gorge nouée : « Imagine cette armure sans Shaakya pour la porter… Tu es là, c’est le principal… Je te ferai un autre cadeau. ». Elle m’a embrassée doucement. J’essayais de me blottir contre elle mais chaque mouvement était une douleur. A nouveau, ces nausées…

Elle regardait autour d’elle : « Je dois te sortir d’ici. ». Je sentais son inquiétude et je m’en voulais de l’avoir mise en danger avec moi : « Je suis désolée… d’être aussi stupide… à chaque fois… ». Elle ne m’a pas laissé finir ma phrase et m’a embrassée. J’ai tenté de me lever en grimaçant : « J’ai du mal à marcher… ». Elle a déclaré : « Je m’en doute… Je vais te porter! ». Je me suis moqué gentiment d’elle : « Je suis trop grande pour toi maintenant! ». Elle a souri : « Mais je suis très très forte. Nadjaï’tal me l’a dit hier! ». J’ai souri : « Oui. Tu l’es! ». Elle s’est levée et a regardé autour de nous : « Nous devons éviter le kipucka… ». Elle s’est penchée et m’a soulevée très doucement en chuchotant : « Allons-y! ». Elle a commencé à courir puis s’est arrêté brutalement : « Il es là! ». Malgré sa douceur, la douleur m’a terrassée. Je me suis évanouie. Elle a chuchoté : « Comment vas tu? ». Voyant mon état, elle m’a posée au sol pour me passer un peu d’eau sur mon visage. Je me suis réveillée. Le kipucka s’est éloigné. Elle m’a repris dans ses bras et s’est remise à courir. Elle ralentissait quand elle me voyait trop pâlir même si le kipucka n’était pas loin. Parfois, elle s’arrêtait pour me soulager et reprendre son souffle.

Nous sommes enfin arrivées près de l’entrée. Elle m’a allongée sur le sol : « Nous sommes hors de danger ici. ». Elle regardait mon bras avec inquiétude. J’ai demandé avec angoisse : « Je vais devenir… infirme? ». Elle a serré les dents : « Reste calme, ça va aller! ». Sa réponse ne m’a pas rassurée du tout : « Tu m’aimeras toujours? ». Elle a sorti un ambre de protection, une outre d’eau et une petite trousse de guérisseur sans me répondre. Je la regardais les yeux fiévreux. Elle a posé l’ambre de protection sur ma poitrine et m’a passé un peu d’eau sur le front : « Ça va aller! ». J’ai presque crié toujours aussi angoissée : « Tu m’aimeras toujours? ». Elle s’est penchée et m’a murmurée à l’oreille : « Je t’aimerai toujours Shaakya… ». Elle s’est redressée et a ouvert sa trousse de soin : « Et je vais sauver ton bras! ». Je me suis sentie rassurée et je l’ai regardée faire.

Elle a commencé à appliquer tout doucement une crème en partant de l’épaule. J’essayais de ne pas crier. Elle m’a dit doucement : « Ton épaule est déboîtée… Je dois essayer de te la remettre en place… ». Je l’ai regardée angoissée : « Je vais m’évanouir… je te préviens… ». Elle a passé une main caressante sur mon front : « Non tu ne vas pas t’évanouir. ». J’ai demandé : « Peut-être qu’il vaudrait mieux non? ». Elle n’a pas répondu. Elle a sorti une bouteille d’essence d’ocyx et l’a posée au sol, puis un morceau de parchemin qu’elle a plié : « Mords là dedans! ». J’ai obéi. Elle a sorti ses amplificateurs magiques : « Je vais être aussi douce que possible, mais tu sentiras que ça va mieux tout de suite après. ». J’ai acquiescé avec un regard inquiet. Elle a appuyé doucement sur ma clavicule pour me maintenir au sol en prenant mon bras. J’ai commencé à gémir sous la douleur. Je la voyais prendre de grande inspiration, le cœur battant. Elle a pris doucement mon bras contre elle. Je la regardais éperdue mordant dans le parchemin pour étouffer mes cris, espérant qu’elle en finirait vite. Elle semblait hésiter puis soudain elle a tiré sur mon bras d’un coup sec en le faisant pivoter légèrement. J’ai hurlé de douleur. Elle a relâché mon bras pour prendre ses amplificateurs magiques et me lancer une série de soins.

Des larmes de douleurs coulaient le long de mes joues. Je tremblais. Elle a passé une main sur mon front : « C’est fini… c’est fini… Bois un peu d’eau. ». Elle m’a aidé à boire en me maintenant la tête. J’ai murmuré : « Merci. ». Elle a pris un petit chiffon imbibé d’essence d’ocyx : « Ça va piquer un peu. ». Elle a passé le chiffon sur toutes mes petites blessures qui parsemaient mon corps. Je sifflais entre mes dents de douleurs. Elle a chuchoté : « Comment va ton bras? ». Je me suis blottie contre elle : « Mieux je crois… ». Ma belle chauve suait à grosses gouttes. Elle a pris une gorgée d’essence d’ocyx : « La douleur devrait se calmer. ». J’ai passé doucement un doigt le long des gouttes de sueur de ma belle. Elle me caressait doucement le front : « Tu es très courageuse. ». J’ai eu un petit sourire reprenant notre petit jeu : « Toi plus! ». Elle a souri semblant rassurée.

Elle m’a portée dehors au camp ranger espérant y trouver Na Djaï’tal mais il n’était pas là : « Ça va aller Shaakya, on rentre à la maison! ». Je la regardait les yeux fiévreux sans vraiment la comprendre. Elle avait retrouvé mes pactes de téléportation près du trou où j’étais tombée. Elle m’a tendue le pacte de Thesos : « Je t’aide à le déchirer. Je déchire le mien en même temps, et je te retrouve là bas. ».

Au téléporteur de Thesos, elle m’a repris dans ses bras et m’a portée jusqu’au camp. Arrivée là bas, elle m’a reposée sur une couverture. Anyume était là. Elle a crié de joie : « Shaakya !!! Eeri !!! Vous… vous êtes en vie… ». Elle semblait sous le choc entre le rire et les larmes. Puis tout est devenu brumeux. Je me suis évanouie.

Je me suis éveillée à nouveau. J’ai tenté d’ouvrir les yeux mais habituée à l’obscurité de la kitinière, le soleil m’éblouissait. J’ai senti qu’Anyume me prenait la main osant à peine me toucher. Eeri m’a passée un chiffon humide sur le visage puis elle a tendu la main vers Anyume. Celle-ci lui a pris la main en s’approchant : « Je… je croyais que vous ne reviendriez jamais… ». J’ai murmuré en tentant de lui toucher le visage : « Anyume? ». Elle a soudain éclaté en sanglots. J’ai essayé de me redresser en grimaçant : « Je suis là… ». Eeri m’a aidée : « Si tu sens la douleur, c’est que ton bras est encore vaillant ». J’ai eu un petit rire mi-amusé, mi-amer : « Youpi… ».

Anyume a passé doucement ses doigts sur ma joue : « Tu es là… Où est-ce que tu est allée te mettre ? On t’a cherché si longtemps… ». J’ai effleuré la sienne en soupirant : « Je… je suis partie chercher Kyshala je suppose… J’ai fait un cauchemar… je suis désolée… de vous avoir causé de l’angoisse… ». Anyume hoquetait : « Désolée ? Désolée ??? J’ai cru que je ne te reverrais jamais ! Je m’en moque que tu sois désolée ! Tu es en vie! C’est tout ce qui compte! ». Elle m’a serrée doucement contre elle. Eeri m’a grondé gentiment : « Tu ne dois pas être désolée. Mais ça ne veut pas dire que tu dois recommencer! ».

Nous avons plaisanté ensuite sur le fait qu’il fallait m’attacher. J’ai expliqué comment j’avais réussi à m’en sortir en frottant des larves sur moi. D’ailleurs, je me rendais compte que j’étais répugnante avec mon odeur empestant la kitine et ma peau recouverte de la poussière noire des galeries de la kitinière. Eeri a commencé à me nettoyer doucement.

J’ai alors remarqué que le visage d’Anyume était couvert de bleus. J’ai essayé de demander malgré le mal de tête qui commençait à m’enserrer de son étau : « C’est quoi çà ? ». Anyume a répondu en se frottant la joue : « Eeri, Na Djaï’tal et moi on t’a cherché sur toute l’Ecorce… Geyos a même fouillé les Primes quand il a cru qu’Eeri avait aussi disparu ! Bref, l’Ecorce, c’est dangereux… Attends de voir les cicatrices de Na Djai’tal… j’ai eu la bonne part, quasi pas de kitins… ». J’ai senti qu’elle essayait de noyer le poisson : « Qui t’as fait çà ? J’ai assez traîné dans les bars pour savoir que c’est un coup de poing! ». A vrai dire, je n’en savais rien. Je tentais de prêcher le faux pour avoir le vrai. Elle n’a rien répondu sur le moment puis elle a lancé : « C’était pas un coup de poing ! ». Elle avait donc bien été frappée. J’ai demandé malgrè mon mal de tête : « Une baffe peut-être? ». Elle a fini par acquiescé : « Oi… Une sacré baffe. ». J’imaginais Alric en train de la frapper. La tête a commencé à me tourner. Eeri sentant sans doute ma détresse, me disait doucement : « Shaakya, calme toi… C’est fini… ».

La lumière du désert qui m’éblouissait ne faisait qu’accentuer mon mal de tête. Avant même que j’indique que la lumière me faisait mal, Eeri avait posé une étoffe afin de me faire de l’ombre. Comment ma belle chauve avait-elle su? Étions-nous à ce point liée qu’elle sentait mon mal-être avant même que l’exprime? Je l’ai remercié en lui serrant doucement la main. Mais ma pâleur les a inquiétées toutes les deux. Anyume a dégluti avec angoisse : « Eeri, on… on peut pas faire quelque chose ? ». Eeri a suggéré : « On peut l’emmener dans un lieu plus clos peut-être? ». Anyume a proposé : « Le bar de Thesos? ». Eeri a acquiescé : « Ou dans la tour? ». Anyume a eu une voix paniquée : « Nani ! pas la tour !!! ». J’ai grogné en me tenant les tempes douloureuses : « Non…. je veux rester là… au camp…. ». Eeri m’a caressée doucement : « D’accord Shaakya… On reste là… ». Mais le ton de panique d’Anyume m’avait surprise : « Qu’est ce qu’il y a dans la tour? ». Mais elles ne m’écoutaient pas discutant de savoir ce qu’elles allaient me donner pour calmer ma douleur : alcool? drogue?

Je me suis soudain énervée : « Pourquoi tu ne réponds jamais à mes questions? ». Anyume a baissé la tête honteuse : « J’ai vu… heu, un maraudeur… l’autre jour à la forteresse… Je ne veux pas qu’on tombe sur eux. Tu sors tout juste des kitins, c’est pas pour aller voir les maraudeurs. ». J’ai acquiescé. Je n’avais de toutes façons plus la force d’insister même si je sentais qu’elle ne me disait pas tout. Eeri a caressé doucement le bras d’Anyume comme pour l’apaiser : « En effet, ne prenons pas le risque de les croiser. ». J’ai regardé surprise le geste tendre qu’elles partageaient en me demandant si il s’était passé quelque chose entre elles deux pendant mon absence. Le mal de tête s’est amplifié me laissant là avec mes questionnements.

Je ne sais plus bien ce qu’il s’est passé ensuite… J’avais l’impression d’être toujours dans la kitinière… Il fallait que je mange… j’ai attrapé mon sac, cherchant des gâteaux secs. J’entendais un bourdonnement sourd… J’ai senti une caresse sur ma nuque. J’ai regardé devant moi un peu perdue. J’entendais les voix d’Eeri et d’Anyume mais je ne les voyais pas : « Eeri tu es là? ». Elle a répondu doucement : « Oui je suis là… ». J’ai demandé ensuite : « Tu es là aussi Anyume? ». Elle a répondu, elle ausi : « Oi Shaakya, nous sommes là… Tu es en sécurité maintenant… ». Eeri a ajouté : « On ne te quitte pas, Shaakya… Nad devrait arriver. ». Est ce que j’étais en train de rêver? Où était la réalité? Est ce que j’avais rêvé avoir été sauvée? Où est ce que je rêvais d’être retournée dans la kitinière? Si nous étions dans la kitinière, il fallait que je les prévienne : « Faites attention aux kitines : elles mangent les homins… ». J’ai cru voir ma cousine : « Kyshala? ». Encore ce bourdonnement….

Et puis un linge humide sur mon front, j’ai regardé devant moi les yeux exorbités qui faisait çà ? Je ne voyais pas… Quelqu’un a passé un bras autour de mes épaules. J’ai regardé dans la direction du « quelqu’un » avec des yeux hallucinés. Puis, j’ai recommencé à distinguer un visage. J’ai passé un doigt sur les lèvres : « Anyume? ». Elle a souri : « Oi… ». Puis, j’ai regardé le visage au bout du bras qui me passait un linge humide sur le front. J’ai touché doucement les lèvres : « Eeri ? ». Elle ne répondait pas. Est ce que c’était vraiment elle? J’ai tenté de m’approcher. Elle s’est penchée vers moi. J’ai caressé doucement le visage. Elle a déposé un baiser sur ma joue… et soudain j’ai vu une larme qui perlait de ses yeux.

J’ai émergé de l’état second dans lequel j’étais : « Eeri! ». Je l’ai serrée contre moi malgré la douleur. Elle a éclaté en sanglots : « J’ai eu si peur… ». Je lui ai murmuré : « Ne pleure pas… moi aussi j’ai eu peur… ». Anyume nous a rejoint pour nous enlacer toutes les deux. Elle pleurait en silence. J’ai caressé doucement le dos d’Anyume en embrassant le front d’Eeri : « Je suis désolée… j’ai des absences… ». Puis, j’ai ajouté en riant : « J’ai pris un coup sur la tête aussi! ». Eeri a caressé de la main les cheveux d’Anyume : « Ce n’est pas grave, Shaakya. ». Encore un geste tendre envers Anyume… Est ce ma disparition qui les avait rapprochées?

J’ai alors lancé d’un ton comique : « J’ai faim!!! ». Ce qui a eu le dont de faire cesser leurs pleurs, elles se sont mises à rire en farfouillant dans leur sac. Anyume a sorti plein de choses : un saucisson de bodoc et du pain, du fromage, des oeufs dur d’izam… Mais elle devait trouver que ce n’était pas assez. Elle a couru à la taverne de Pecus pour aller chercher autre chose à manger et à boire malgré nos protestations. J’ai profité de son absence pour embrassé tendrement Eeri : « Merci ma belle chauve. Tes lèvres m’ont manquée… Tes bras aussi… tout en fait! ». Elle a murmuré : « Moi aussi, tu ne peux pas t’imaginer à quel point. ». Anyume est revenue les bras chargés de victuailles et de bouteilles : « Pour la boisson, j’ai demandé à Pecus des trucs que vous aimeriez. Faut fêter ça ! ». J’ai commencé à dévorer tout ce qu’il se présentait mais j’ai refusé la bière de shooki. J’avais un tel mal de tête que l’alcool ne me semblait pas une bonne idée. Anyume m’a donné un peu de son jus de baies au poivre.

J’ai caressé leurs joues à toutes les deux. J’avais une terrible envie de les embrasser. J’ai hésité un peu et puis je me suis penchée sur Anyume et j’ai goûté ses lèvres. Puis, je me suis approchée d’Eeri et je l’ai embrassée. Toutes deux ont frissonné. J’ai souri : « Je n’ai pas pu résister. ». Anyume a gloussé. Eeri a souri puis a chuchoté : « Shaakya… ». Je l’ai interrogé du regard mais elle ne voulait rien dire finalement. Je lui ai tapoté le crâne : « Parle petite chauve! ». Elle a dit en riant : « Non je voulais te demander comment allait ton bras!! ». Puis elle a ajouté en chuchotant : « Et tu as eu raison de ne pas résister. ». J’ai souri et je lui ai offert un baiser terriblement sensuel qu’il l’a fait rougir tandis que que sa peau frémissait. J’ai offert le même baiser à Anyume. Celle-ci est devenue aussi rouge qu’un izam de la jungle. J’ai ri : « Vous êtes aussi rouge que mon tatouage? ». Eeri a ri doucement : « Petite profiteuse va… ». J’ai eu un petit air innocent : « Tu trouves ? ». Anyume nous regardait bouche bée ce qui a provoqué un petit rire d’Eeri : « Nous sommes bien là… comme deux igaras qui ont trouvé un oeuf d’izam dans leur nid… ».

J’étais fatiguée : « Vous croyez qu’on peut… dormir toutes les trois ensembles ce soir? ». Anyume a demandé : « Dormir, hein ? ». J’ai éclaté de rire. Elle a rougi. J’ai été taquine : « Pourquoi tu souhaites autre chose? ». Eeri a ri nerveusement. Anyume a répondu doucement : « Peut-être pas ce soir… ». Puis, elle s’est empourprée se rendant compte de ce qu’elle était en train de dire : « Enfin, je veux dire… ». Eeri a déposé un baiser sur ma joue : « Shaakya, tu as besoin de dormir et c’est tout. ». Anyume a hoché vigoureusement la tête : « Oi ! Tu as besoin de dormir ! ». Je me tenais les côtes tellement je riais en grimaçant en même temps de douleur : « Je ne suis pas en état de faire un quelconque mouvement acrobatique! ». Mais Anyume et Eeri pensaient vraiment que je voulaient faire autre chose que dormir… Eeri a dit à Anyume : « Il y a quelque temps, nous avons parlé de toi toutes les deux… Et j’avais très peur de… ma réaction dans une telle situation. Et j’ai finalement l’impression que tu es plus gênée que moi… ». Anyume s’est frottée la nuque : « Disons que je ne m’attendais pas à ça… Et puis, je ne te connais pas tant que ça Eeri… je t’aime bien, mais je te connais peu encore. ». Eeri s’est mise à rire : « Tu ne vois pas que Shaakya nous mène par le bout du nez? ». Anyume a acquiescé : « Oi, elle se débrouille très bien ! ». Puis elle m’a regardée d’un air pensif avec un petit sourire en coin.

J’ai soupiré et j’ai finalement redemandé : « On peut alors ? juste dormir toutes les trois? On l’a déjà fait je vous rappelle… et je promets de ne caresser personne… enfin… Je vais essayer. ». Elles ont acquiescé toutes les deux. Je me suis allongée difficilement en grimaçant. Je me demandais comment elles avaient pu penser que je pouvais leur proposer autre chose que dormir alors que je souffrais le martyr à chaque mouvement… J’ai pris doucement leurs mains et je me suis endormie.

La nuit a été agitée. Les cauchemars m’ont repris. Je me suis tournée et retournée comme si je me débattais en gémissant sous la douleur. Je rêvais qu’on me faisait du mal alors que ce sont mes propres mouvements qui martyrisaient mon corps douloureux. Je me suis redressée soudain brusquement en hurlant de terreur et de douleur, les yeux exorbités, une sueur glacée perlant sur mon corps, le cœur battant à tout rompre.

Anyume et Eeri ont été réveillées en sursaut. Elles m’ont caressée, rassurée : leurs mains et leurs voix étaient si douces. Les cauchemars se sont éloignés. Je me suis mise à pleurer en silence, les larmes coulant le long de mes joues. Mes amantes les ont essuyées tendrement en me parlant très doucement. Je ne comprenais pas tout ce qu’elles me disaient, toujours dans un état semi-comateux mais je ressentais l’amour et l’émotion qu’elles m’offraient. J’ai fini par me rendormir apaisée par leur présence.

Au bord de la mort

Nous nous étions endormies sur l’île de Kyshala. La veille je l’avais veillée, toute la nuit, inquiète, parce qu’elle était éteinte, malade souffrant d’un vilain rhume. Elle allait mieux alors j’étais tombée, épuisée de fatigue le soir suivant. Est ce que c’est l’angoisse de la voir malade ainsi qui a réveillé mon cauchemar au kirosta rouge? Je ne sais pas… En tout cas, quand je me suis réveillée, j’étais dans la kitinière et un kirosta en face de moi qui n’a pas mis longtemps à me mettre à terre. Je me suis évanouie.

Quand, je me suis réveillée, j’étais percluses de douleur parmi les cadavres de créatures. J’étais dans le garde-manger des kitines, incapable de me soigner, je ne ressentais pas la présence des kamis, ni de la karavan… les pactes de téléportation n’allaient pas fonctionner et les demandes de résurrection encore moins… J’allais mourir. Je me suis mise à pleurer… Non, non… pourquoi? Alors que j’étais si heureuse et que j’avais enfin trouvé celle avec qui je voulais passer le reste de ma vie… J’ai pleuré de longues minutes incapable de m’arrêter. Je repensais au moment merveilleux que j’avais passé à ses côtés ces derniers jours, comme cette journée près d’une cascade sous une arche que nous avions surnommées « l’arche des amantes » en raison des étreintes passionnées que nous y avions vécues…

Et moi, je gâchais tout avec mon cauchemar et mon somnambulisme maladif… Je m’en voulais de provoquer un nouvel horrible déchirement dans la vie de Jalindra. Mes larmes ne cessaient plus… Et puis il y a eu un petit mouvement parmi les cadavres, un izam blessé essayait de se dégager. Je me suis traînée jusqu’à lui pour l’aider mais il était vraiment mal en point lui aussi. Il s’est blottit contre moi recherchant ma chaleur. J’ai eu pitié, si je ne pouvais plus me soigner moi-même au moins je pouvais l’aider lui… J’ai lancé un soin. Il était guéri et volait autour de moi tout joyeux.

J’ai eu un petit sourire triste. L’izam est revenu contre moi, semblant vouloir tenter de m’aider. Je l’ai caressé même si je savais que je ne survivrais pas. Pourtant son insistance m’a donnée une idée. J’allais envoyer un message à ma bek-i-bemaï. Il ne fallait pas que je meurs sans qu’elle sache ce qu’il m’était arrivée comme avec Shab. J’ai sorti difficilement de quoi écrire de mon sac et j’ai commencé ma lettre :

« Mon amour, ma bek-i-bemaï,

Je crois que j’ai encore fait un cauchemar et comme j’ai oublié de te donner mes pactes, je suis à nouveau dans la kitinière. Je t’envoie cette lettre grâce à l’aide d’un izam qui était sur le point de mourir et que j’ai réussi à soigner grâce à mes dernières gouttes de sève, lui aussi a été ramené par les chasseurs dans le garde manger des kitines.

Ma bek-i-bemaï, cette fois, je crois que ma graine de vie s’est brisée et ne pourra plus être réparée. Quelle idiote, je suis! J’ai à nouveau suivi un kirosta rouge dans mes cauchemars pour me réveiller transpercée par son dard au fond de la kitinière. Je suis à un niveau tellement profond que je crois que les kamis n’entendront pas mon appel… Je vais mourir mon amour…

Je suis désolée de te laisser seule alors que notre amour était ce qu’il y avait de plus beau dans ma vie. Je veux que tu profites de la vie et que tu trouves quelqu’un qui t’offre ce que j’ai à peine eu le temps de t’offrir.

La mort ne nous séparera pas mon amour. Ma sève attendra la tienne pour se mêler à elle et être à jamais réunies.

el makèch ma bek-i-bemaï.

Shaaky. »

J’ai attaché le message à la patte de l’izam. Je lui ai donné quelques miettes du gâteau que j’avais dans mon sac et je l’ai laissé s’envoler. Il est parti à tir d’ailes. Je n’étais vraiment pas sûre qu’il parviendrait à sortir de la kitinière vivant mais j’espérais de tout mon cœur que mon message parviendrait d’une façon ou d’une autre à Jalindra. Au moins, pour qu’elle sache que j’avais pensé à elle jusqu’à ma dernière seconde de vie. J’ai tenté de lutter contre l’engourdissement de la mort que je sentais venir mais j’ai fini par m’évanouir à nouveau.

C’est le bec d’un izam qui m’a réveillée. Dans un état comateux, j’ai tenté de le repousser de la main : « Laisse moi… je suis fatiguée… trop fatiguée… ». Mais l’izam me picorait le crâne avec insistance. J’ai finalement réussi à ouvrir un œil : c’était l’izam que j’avais sauvé. J’ai grogné : « Je t’ai dit pourtant de rejoindre Jalindra… Va-t-en!!! ». J’ai fermé les yeux à nouveau mais toujours ce bec qui picorait avec insistance mon crâne. J’ai ouvert à nouveau les yeux et c’est là que j’ai vu que la pauvre bête avait été chargée comme un mektoub de bât. Il portait des sacoches et semblait épuisé.

J’ai ouvert les sacoches : des potions de vie et de sève… Et un mot de Jalindra, griffonné dans l’urgence : elle me disait qu’elle m’aimait et qu’il fallait que je lutte de toutes mes forces, qu’elle allait me rejoindre. Ma bek-i-bemaï me redonnait courage. J’ai bu les potions. Le bien-être a été immédiat même si les douleurs étaient toujours là…

Maintenant, il fallait sortir sans se faire dévorer… J’ai aperçu une larve de kitine perdue non loin de là… J’ai réussi à l’attraper en me faufilant à travers les cadavres et les kitines. Je me suis frottée avec reprenant l’idée qui m’avait déjà sauvée une fois et je l’ai gardée dans mon sac. Il fallait que je remonte le plus possible pour que Jalindra me trouve. J’ai suivi mon petit izam qui semblait décider à m’aider… mais parfois il passait par des endroit inaccessible pour moi… alors je faisais demi-tour cherchant une autre issue. Je me suis perdue dans le labyrinthe de la kitinière… Mais à chaque fois, l’izam me retrouvait trouvant un autre chemin. Jusqu’à ce que l’épuisement me fasse tomber à genoux. J’étais arrivée dans la chambre des œufs, où je me suis évanouie à nouveau.

Puis, j’ai entendu la voix au bord de la panique de Jalindra : « Shaakya, ma belle! ça va? ». Elle a lancé une série de soins magiques sur moi. J’ai ouvert un œil et j’ai souri en voyant son visage au dessus de moi : « Tu n’aurais pas du…. prendre de risque… comme çà… ». Elle m’a soulevée dans ses bras toujours terriblement inquiète : « Ça va aller… je n’allais pas te laisser là! comment tu te sens? ». J’ai dit doucement : « Mal… et bien parce que tu es là… ». Elle a dit doucement : « Je serais toujours là… ». J’ai murmuré : « J’ai cru… que j’allais mourir… ». Elle a dit d’une voix déterminée : « Je ne t’aurais pas laissé faire… ». Elle m’a serrée très fort dans ses bras et m’a embrassée tendrement. J’ai caressé sa joue : « Je suis désolée… ». Elle a secoué la tête : « C’est moi qui le suis… J’ai cru… qu’il n’y avait plus de danger… Mais allons sur l’île, que je puisse te soigner… c’est risqué de rester ici. ». Elle m’a soutenue avant de déchirer nos deux pactes et elle m’a conduite ensuite jusqu’à l’île de Kyshala.

Elle a fait un feu et m’a recouverte d’une couverture. Je voyais qu’elle faisait çà presque mécaniquement comme pour oublier la peur qu’elle avait eu. Elle a demandé : « Tu as soif? faim? ». J’ai tendu ma main vers sa joue. Elle s’est penchée vers moi pour embrasser mon front : « Un câlin? ». J’ai souri : « Oui un câlin… tes soins m’ont fait du bien. ». Elle m’a pris doucement entre ses bras pour poser ma tête sur ses genoux : « Je suis désolée… ». Je l’ai laissé faire en souriant : « Ha oui là… je suis sûre que je vais aller beaucoup mieux! ». Mais je voyais bien qu’elle n’avait pas le cœur à rire, alors j’ai repris plus sérieusement : « J’ai du…. te faire très peur mon amour… avec ma lettre… j’ai cru que j’allais mourir cette fois… je ne pensais même pas que l’izam arriverait à te rejoindre… il était tellement mal en point lui aussi. ». Elle avait pris de la crème dans son sac et l’appliquait doucement sur mon flanc : « Oui… j’ai cru que je n’arriverais pas à temps… Les kitins auraient eu un peu plus à manger… si je ne t’avais pas retrouvée… ». J’ai écarquillé mes yeux : « Tu veux dire…? ». Elle a caressé mon visage : « Je serais restée avec toi oui… plus rien n’aurait de sens sans toi… ». Je me suis redressée malgré ses tentatives pour m’en empêcher : « C’est comme je te disais… quand nous étions dans les primes racines… il me sera impossible de vivre sans toi désormais… ». Elle a souri en reprenant un peu de son humour : « Il y a plus simple pour me quitter que d’aller embrasser les kitins! ». J’ai ri en me tenant douloureusement les côtes.

Puis, son regard s’est assombri : « Je m’en veux… j’ai relâché mon attention… j’ai faillit te perdre… ». J’ai tenté de la rassurer : « Mais non… c’est cette angoisse à cause de ta maladie… les cauchemars sont réapparus. J’aurais du y penser! ». Elle a secoué la tête : « Je n’oublierais jamais plus de te prendre tes pactes… j’ai eu si peur… ». Elle a frissonné : « Quand je me suis réveillée… et que tu n’étais plus la… ». Je l’ai serrée contre moi : « Moi aussi, j’ai eu peur… de savoir… que je te laissais seule… J’étais persuadée… que j’allais mourir… Sans ton izam… je n’aurais jamais réussi à remonter plus haut. ». Elle a secoué la tête : « Je n’étais même pas sûre qu’il arrive jusqu’à toi… ». J’ai souri en me frottant le crâne : « Il est arrivé… il était très insistant… parce qu’il a du me sortir de mon évanouissement avec des coups de bec. ». Elle a souri reprenant son humour habituel : « Oui je lui ai soufflé dans les plumes avant qu’il parte! Ça se trouve, c’était le même, il a eu peur… ». J’ai ri en repensant à notre première rencontre où elle avait soufflé dans les plumes de l’izam qui avait envoyé une lettre incomplète faisant suite à sa candidature à la guilde Hoodo.

Puis, je me suis blottie contre elle : « Tu m’as sauvée la vie mon amour… ». Elle a souri en me serrant contre elle : « Et je recommencerais autant qu’il le faudra… même si j’aime autant que tu ne te mettes pas en danger! ». Elle m’a embrassée tendrement. J’ai répondu à son baiser avant de lui répondre doucement : « Je n’en ai pas l’intention… Si tu savais comme j’ai pleuré… pas par peur de mourir… mais parce que je te laissais seule… alors que nous avions tellement à vivre ensemble… J’avais l’impression… d’avoir tout gâché avec ce cauchemar! ». Elle m’a serrée un peu plus contre elle : « J’ai beaucoup pleuré aussi… Je ne veux pas perdre ce bonheur… on a eu si peu de temps… ». J’ai posé mon front sur le sien et pris ses mains dans les miennes : « Rien ne nous séparera mon amour… comme je te le disais dans ma lettre… nos sèves se mêleront… et nous serons à jamais réunies. ». Elle a dit avec une petite voix : « Je n’aurais jamais pu attendre… J’ai croisé Xenargos avant de partir… Je n’ai pas réussi à lui en parler… Il aurait souhaité venir… et je ne voulais pas le mettre en danger… ni qu’il m’empêche de rester à tes cotés si jamais… ». Sa voix s’est soudain brisée dans un sanglot. Je l’ai prise contre moi pour la bercer doucement, en lui murmurant des mots d’amour.

Elle a finalement séché ses larmes petit à petit : « C’est moi qui devrait te rassurer… ». J’ai joué les grosses dures en montrant les muscles de mes bras : « Moi? mais je suis une habituée de la kitinière maintenant… Même pas peur!!! ». Elle a eu un petit sourire : « Tu vas vite perdre cette habitude! Je suis d’accord pour qu’on meure ensemble… mais dans très longtemps! ». J’ai acquiescé : « Dans très longtemps oui… Je demanderais à Na Djaï’tal qu’on fasse rapidement le Voyage. ».

Nous avons ensuite chercher la meilleur manière de m’empêcher de me sauver lors de mes crises de somnambulisme. La meilleur solution était celle qu’avait adoptée Anyume après ma première visite de la kitinière : m’attacher à elle. Jalindra m’a ensuite fait manger en me grondant parce que je dévorais comme un ogre. Elle avait peur que mon estomac ne tienne pas le le choc. Je voyais bien que son angoisse était disproportionnée par rapport à cet événement : ma belle n’avait pas encore réussi à exprimer toute l’angoisse et la peur qu’elle avait ressenti pendant que j’étais dans la kitinière. Aussi après avoir fini de manger, je l’ai prise dans mes bras. J’ai caressé doucement ses épaules pendant qu’elle se blottissait contre moi. J’ai commencé à la bercer doucement.

Au bout de quelques minutes, elle a enfin réussi à exprimer son angoisse : « J’étais persuadée de te trouver morte… comme Shab… ». J’ai embrassé son front délicatement : « Je sais… j’y ai pensé… et je m’en voulais… de te faire subir çà à nouveau… ». Elle a secoué la tête : « Tu n’y es pour rien… Je voulais juste que tu ne meurs pas seule… ». Je l’ai serrée fort contre moi en retenant mes larmes : « Je ne voulais pas mourir sans toi… mais je ne voulais pas que tu meurs pour moi… Je ne savais plus où j’étais mon amour… ce que je voulais… ». Elle a eu un sourire tremblant : « Tu n’aurais pas pu protester. ». Je me suis mis soudains à pleurer silencieusement.

Elle m’a prise dans ses bras, me berçant doucement en me murmurant des mots d’amour. J’ai réussi à dire d’une voix tremblante : « Je voulais mourir dans tes bras… mais pas que tu meurs… ». Elle a murmuré d’une voix douce : « Je serais morte avec toi… dans tout les cas. Et même si j’avais résisté à la volonté de te rejoindre… je serais restée une coquille vide… ». Je l’ai regardée : « Comme moi… avec toi… si… ». Je n’ai pas réussi à terminer ma phrase. J’ai secoué la tête : « Je ne veux plus revivre çà… ». Elle a acquiescé : « Je ferais tout pour que ça n’arrive plus… ».

J’ai pris un ton plus désinvolte : « On sera obligées d’être attachées tout le temps! ». Elle a souri : « Je vais remettre tes pactes dans mes bottes, comme avant! ». J’ai pris un petit air taquin : « Celles qui sentent des pieds? ». Elle a ri : « Oui!!! Au pire l’odeur te réveillera… on ira même voir le tas de fumier de bodocs pour être sûres! ». J’ai éclaté de rire avec elle.

Elle a remis de la crème sur mon flanc. Ce geste doux nous a rappelé les tendres attentions qu’elle avait eu pour mes pieds alors que nous n’étions encore que des amies. Nous avons longuement discuté sur ce que nous avions ressenti l’une pour l’autre à cette époque qui nous paraissait déjà si lointaine. Le sommeil a fini par avoir raison de moi. Jalindra a posé une couverture sur moi et m’a attaché le poignet au sien : « Voilà, tu ne pourras pas partir cette nuit! Je te garde avec moi! ». J’ai murmuré d’une voix ensommeillée : « Je ne veux pas partir… je n’ai jamais voulu partir… ». Elle m’a entourée de ses bras : « Je sais mon amour… ». Elle m’a bercée doucement. J’ai murmuré dans un demi-sommeil : « Jamais séparées mon amour… jamais… toujours dans tes bras… ». Elle a murmuré : « Je suis là, je serais toujours là… ». J’ai murmuré avant de m’endormir dans le creux de ses bras : « el makèch… ». Je l’ai entendu murmurer très doucement : « el makèch ». Elle s’est endormie en me serrant fort contre elle.

Durant la nuit, j’ai encore fait le cauchemar du kirosta rouge, j’ai hurlé le prénom de Jalindra. Mais elle était là veillant sur moi, me murmurant des paroles apaisantes. Je suis retombée dans un sommeil plus apaisé en murmurant : « Ne me laisse pas toute seule… laisse moi venir avec toi… ». Elle a murmuré à mon oreille : « Je suis là… je ne vais pas mourir… Tu ne seras jamais seule… ». J’ai fini par me rendormir dans un sommeil calme et réconfortant.

Le lendemain, c’est elle qui a fait un cauchemar. Elle s’est réveillée en sursaut tremblant de tout son corps. Je lui ai murmuré : « Je suis là mon amour… je suis là ma bek-i-bemaï… ». Elle m’a regardée avec des yeux hagards : « La kitinière… tu y étais retournée… je te cherchais… et j’allais mourir sans te retrouver… sans savoir si j’allais t’abandonner ou si c’était déjà fini… ». Un sanglot l’a empêchée de continuer. Je l’ai serrée contre moi, tentant de la rassurer d’une voix enrouée par l’émotion : « Je ne retournerais pas dans la kitnière pas sans toi… On ira dire aux rangers qui gardent l’entrée de me bloquer le passage si je suis seule par la force si il le faut… On leur dira de te contacter si jamais il me trouve… Ça n’arrivera plus… Les rangers sont capables d’empêcher de sortir des énormes kitines, ils arriveront bien à arrêter une petite fyrette au pieds nus, non? ». Je l’ai serrée encore plus fort contre moi : « Je ne veux plus revivre çà… croire que je t’avais perdue… que je te laissais seule… que nous ne pourrions pas vivre, tout ce que je veux vivre avec toi… ma bek-i-bemaï… ». Elle a murmuré en se blottissant contre moi : « Non, plus jamais… J’ai cru devenir folle quand j’ai reçu ton izam… Je n’avais jamais ressenti un tel déchirement… ni une telle haine contre la vie… seule la perspective de pouvoir encore te sauver m’a fait avancer… ». Je l’ai embrassée par petites touches tendres en continuant à la caresser : « Nous aimerons la vie ensemble désormais… Je vivrais pour te rendre heureuse, voir ton merveilleux sourire et entendre ton rire. ». Je la gardais contre moi en respirant son odeur : « Si je pouvais te garder constamment contre moi comme çà… profiter de ta chaleur, de la douceur de ta peau, du goût de tes lèvres… je le ferais… Plus rien, n’a d’importance, quand tu es dans mes bras à part toi… ». Mon baiser s’est fait plus sensuel et passionné. Elle a répondu avec fièvre. Cette nuit là, nous nous sommes fait l’amour avec urgence comme pour conjurer le sort, nous délectant de sentir l’autre si vivante.

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