Jour 23 Fingel – Fingelien 385
Je suis arrivée à Bordeciel. Il fallait que je me fasse discrète si je voulais retrouver Shaael. Si elle était vivante, elle ferait sans doute tout pour m’éviter comme quand je l’avais cherché la première fois. Il me fallait écouter sans poser de questions trop directes. Heureusement pour moi, les kajiits sont assez rares en Bordeciel. Il suffisait que je dises chercher une caravane Kajiit pour qu’on me parle des Kajiits qu’ils avaient croisé. Puis, quand un nordique m’a parlé d’une kajiit accompagnée d’un chien, j’ai su que j’étais sur la bonne voie. Même si je m’étonnais qu’il ne parle que d’un seul chien… Quand j’ai quitté Shaael, elle avait deux chiens : Meeko et Barbas. Peut-être que Barbas avait fini par retrouver son maître?
J’ai suivi la piste que le nordique m’avait indiquée. Je voyageais de nuit utilisant mes qualités de discrétion de sombre, en profitant ainsi pour repérer les feux de camps au loin. J’ai fini par la trouver. J’ai failli me faire repérer. Ses sens aiguisés avaient repéré mon approche. Je me suis cachée derrière un arbre espérant qu’elle ne m’avait pas vu. Je la voyais regarder dans ma direction intriguée. Elle devait se demander si elle avait rêvé ou non. J’ai vu qu’elle était en compagnie de Lydia, la nordique mise à son service par le Jarl de Blancherive. Une pointe de jalousie a aiguillonné mon coeur. Etaient elles devenues amantes?
Soudain, une masse sombre s’est jetée sur moi. Elle s’est mise à me léchouiller le visage. Meeko était là. Il m’avait reconnu. Il sautait autour de moi me faisant la joie, tandis que j’essayais de le calmer pour ne pas que son attitude attire l’attention de Shaael. J’adorais Meeko et j’étais heureuse qu’il se souvienne de moi ainsi. Je l’ai caressé autant que j’ai pu et je lui ai chuchoté de rejoindre Shaael. J’ai vu ma femelle chat, observer interloquée l’attitude de Meeko qui revenait vers elle tout joyeux. Je l’ai vaguement entendu gromeller que ce chien était vraiment stupide, ce qui a fait sourire la glaciale Lydia. Elles ont alors continué à remballer leurs affaires prêtes à repartir.
Je ne savais pas ce que je devais faire : si je me montrais, Shaael risquait de fuir encore une fois et si je continuais à les suivre, je finirais de toutes façons par me faire repérer. J’en étais là de mes réflexions quand un mouvement dans la neige a attiré mon attention : un troll des glaces était en train de me charger. Je n’avais aucune chance contre cette bestiole que j’avais fui il y a plusieurs mois avec Shaael. J’ai fui une nouvelle fois droit devant moi.
Ma course effrénée a brutalement été stoppée… une douleur fulgurante m’a traversée la poitrine… Une flèche de verre était plantée tout près de mon coeur… j’ai regardé devant moi incrédule… Shaael était là toujours avec son arc bandé. L’incompréhension se lisait dans nos deux regards. J’ai vu soudain Meeko menaçant me montrant les dents… je ne comprenais plus… il s’est jeté sur moi… j’ai vu l’effroi dans le regard de Shaael… puis soudain une nouvelle douleur dans le dos cette fois. Les griffes du troll des glaces m’avait entaillée… Meeko ne s’était pas jeté sur moi mais sur lui…
Une nouvelle flèche a sifflé à mes oreilles tandis que l’horizon basculait et que le sol s’est rapproché de moi sans que je puisse l’en empêcher… j’étais allongée dans la neige glaciale, qui rougissait sous mon corps. Les sons autour de moi étaient étouffés… Il y avait un martèlement étrange. J’ai compris qu’il s’agissait des battements de mon coeur. Je me suis dit que j’allais me retrouver bien vite dans l’Achéron… Et puis, je me suis souvenue… ici, il n’y avait pas d’Achéron… La panique m’a envahie soudain… j’allais mourir… le martèlement s’est accéléré provoquant une douleur plus vive encore.
Je crois que j’ai appelé Shaael… j’entendais des bruits de lutte près de moi puis le râle d’agonie du troll des glaces. Je me suis retrouvée soudain dans les bras de ma femelle chat. Elle regardait plus loin semblant donner des ordres… pourquoi est ce qu’elle ne me regardait pas? J’ai tendu un main vers sa joue pour attirer son regard mais mon bras avait la lourdeur du plomb. Elle a pris ma main et l’a posée sur sa joue en me regardant, d’un air terriblement angoissé. J’ai tenté de sourire. Elle a embrassé la paume de ma main avec le baiser enflammé d’une amante. Elle m’aimait toujours… j’ai souri… Elle me disait quelque chose mais je n’entendais pas… un voile rouge gênait ma vue… il fallait que je lui dise… « je t’aime »… je n’ai pas entendue ma voix… est ce que j’avais parlé? J’ai senti la douceur de ses lèvres sur les miennes tandis que mon coeur s’emballait de bonheur et que la douleur me déchirait…
Puis le noir…