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Silan

Nous sommes arrivées à Silan qui était toujours le premier point d’ancrage des aventuriers à la surface. Eeri trépignait d’impatience de retourner à Pyr. Certains des légionnaires recrutés y étaient déjà. Après m’avoir entièrement équipé, elle a apposé un écusson des Légions Fyros sur l’armure qu’elle m’avait offerte sans vraiment me demander mon avis. J’aurais pu refuser mais je ne l’ai pas fait. Elle m’avait formée durant toutes ces années pour çà et je n’avais pas l’intention de la laisser réaliser son rêve de renaissance des légions fyros et de reconquêtes des territoires perdus d’Atys sans moi.

Elle m’a présentée à un nouveau légionnaire, un mâle fyros magnifique aux cheveux blonds roux : Ywan. Je suis tombé sous le charme tout de suite. Il était souriant, aimable et toujours prêt à rire. Eeri est partie pour Pyr nous laissant seuls avec un petit sourire en coin. Se doutait elle qu’Ywan me plaisait déjà ? En tout cas, j’étais heureuse de ne pas être seule pour mon apprentissage de la vie à la surface d’Atys.

Avec Ywan, nous avons découvert avec surprise que ma cousine Kyshala et son oncle Morandy se connaissaient. Ayant lu le cube d’ambre de Kyshala, je savais qu’ils avaient entretenu une relation d’une grande complicité. Peut-être aurait elle dérivée jusqu’à de l’amour si les kitines leurs en avaient laissé le temps ? Mais je n’ai pas osé en parler à Ywan. Nous nous sommes rendus aussi compte que nous faisions les mêmes rêves à leur propos : ils étaient enfermés dans une pièce sombre et appelaient quelqu’un. Pour Ywan, le nom que semblait appeler Morandy était celui de Kyshala. Tout ceci nous paraissait tellement étrange, mais que pouvions nous faire?

Nous avons commencé notre apprentissage auprès des instructeurs mais à vrai dire sans grande assiduité. Libérés de la pression des officiers légionnaires tous partis à Pyr, nous en profitions souvent pour paresser sous un champignon en parlant de choses et d’autres. Parfois, nous nous promenions montant sur les promontoires les plus hauts pour profiter de la vue. J’étais assez fière quand je lui ai fait découvrir la jungle de Silan qu’il ne connaissait pas. Il est vrai que le passage pour s’y rendre était difficilement visible et qu’il fallait savoir nager. C’est là que nous avons découvert nos premières kitines. Nous les avons massacrées avec beaucoup de plaisir comme une vengeance que nous offrions à Kyshala et Morandy.

Les jours ont passé. Nous passions tout notre temps ensemble. Ils nous arrivaient même parfois de nous endormir dans les bras l’un de l’autre comme deux enfants en manque d’affection. Pourtant, j’avais parfois l’impression d’imposer ma présence à Ywan. Je le laissais parfois seul pour ne pas qu’il me trouve trop envahissante ou collante mais il finissait toujours pas me réclamer pour ma plus grande joie. Ayant pris un peu d’avance sur lui en artisanat, je lui ai demandé un jour qu’elle était son arme préférée. Il m’a déclaré aimer combattre avec une pique. Je me suis alors empressée de trouver le plan de fabrication de cette arme auprès de l’instructeur et les meilleurs matériaux sur le marché. J’ai fabriqué pour lui ma première pique. Elle n’était pas très jolie, un peu cabossée par endroit mais elle était assez efficace pour taquiner des créatures. Quand je l’ai offerte à Ywan, il a paru très heureux. Il a même montré sa pique fièrement à un homin avec lequel il avait sympathisé.

Eeri a fini par nous contacter pour nous demander quand nous allions venir à Pyr. Nous lui manquions disait-elle. A vrai dire, elle me manquait à moi aussi. Mais il nous restait une dernière chose à faire sur Silan : vaincre le kirosta qui se terrait au fond de la jungle. C’était comme un rite de passage. Ceux qui avaient terrassé le kirosta étaient près à quitter Silan. Nous savions qu’à deux nous aurions un peu de mal à y parvenir. Aussi, nous nous sommes alliés à d’autres homins, empressés comme nous de vaincre la Bête. Nous y sommes parvenu sans vraiment trop de mal même si j’ai eu une frayeur quand j’ai vu Ywan s’effondrer. J’ai repensé à Kyshala qui n’avait plus eu de sève pour sauver Morandy quand ils ont été transpercés par cette kitine… J’ai chassé ces idées noires de ma tête et je l’ai soigné en espérant que jamais je ne vivrais ce qu’elle avait vécu lors de ce jour funeste. Le kirosta a fini par s’effondrer sous les coups.

Ywan et moi, nous nous sommes souris : nous étions prêt à partir pour Pyr.

Réveil brutal

Nous étions tout joyeux d’arriver à Pyr. Malgré notre épuisement, nous n’avons pas pu nous empêcher d’aller taquiner quelques Shookis devant les portes de la ville. Mais tellement empressés, nous faisions un peu n’importe quoi attaquant chacun une créature sans faire attention de prendre soin de l’autre. Nous avons alors failli succomber sous leur riposte collective. Ça nous a bien fait rire. Nous avons fini par nous trouver un coin pour la nuit. Ywan a basculé très vite dans le sommeil à mes côtés.

Mais, moi, je n’arrivais pas à m’endormir. Alors, je suis montée en haut d’une dune. Je respirais enfin l’air chaud du désert Fyros et plus cette odeur de moisissure des champignons de Silan. Je regardais l’immensité désertique en me disant que j’étais enfin chez moi. Je suis retournée me coucher près d’Ywan avec un sourire aux lèvres.

Le réveil a été brutal. Un « cal i selak » tonitruant a retenti près de moi, le chef de notre guilde Icus me saluait avec la salutation des légionnaires : le fameux « Force et gloire » en fyros. Ywan n’était plus là. Les yeux encore embués de sommeil, j’ai regardé éberluée les légionnaires entourer notre chef. Et c’était parti : la légion se mettait en ordre de bataille!

Les jours qui ont suivi, n’ont été que entraînements intensifs à n’en plus finir et de longues expéditions… encore et encore… Je croisais Ywan que pendant de brefs instants de répits. Eeri n’était pas souvent là, elle non plus. De nouveaux arrivants venaient tous les jours gonfler les rangs de la légion. Je me sentais perdue, ne sachant pas où était ma place. Moi qui avait pourtant déjà eu droit à l’entrainement des légionnaires avec Eeri dans les profondeurs, je me sentais complètement abrutie par ce traitement de choc. J’avais rêvé d’aventures, de découvertes et de grands espaces mais je me retrouvais comme oppressée par la pression que m’infligeait l’entrainement de la légion.

Toutefois, les moments que je préférais étaient les expéditions mais Ywan n’était pas là pour les partager avec moi. J’étais pourtant tellement heureuse de découvrir la taverne de Thesos où Kyshala était venue… Mais, nous nous sommes à peine arrêter. Il fallait déjà repartir cette fois pour Yrkanis la capitale des matis. Tout c’est fait au pas de course comme toujours… Un jeune fyros nous a suivi profitant de la force de frappe des légionnaires en mouvements. J’ai à peine vu les primes racines…Nous étions déjà dans les forêts pleines de champignons du pays matis. A un moment, quelqu’un a crié que le dernier arrivé à la taverne était un bébé matis: insulte suprême pour un fyros. La troupe s’est disloquée chacun courant le plus vite possible pour ne pas arriver dernier. Pour ma part, ne sachant absolument pas où se situait cette taverne, j’ai suivi Eeri. La connaissant, je savais qu’elle pouvait sentir l’odeur d’une taverne à dix kilomètre à la ronde. Mais au final, personne n’est allé là bas. La troupe s’est retrouvée devant l’intendante matis. Le but était de l’agacer le plus possible en refusant la citoyenneté matis. Au début, je trouvais le jeu amusant mais à force, je n’aimais pas ce manque de respect même envers une matis. Et quel était l’intérêt pour la guilde de se mettre déjà à dos les matis, je ne comprenais pas… Je me sentais une fois de plus en total décalage avec ce que j’avais pensé vivre ici. Heureusement, Eeri m’a déclaré par télépathie qu’elle trouvait elle aussi que tout ceci était exagéré. Elle considérait qu’elle avait bien l’intention de se servir de matis pour au moins leur pomper leurs dappers. Elle préférait donc garder des relations neutres avec eux. Au final, je suis retournée par téléporteur à Pyr complètement dépitée, oubliant de prendre un pacte pour pouvoir retourner à Yrkanis…

Les jours passaient. Ywan était toujours aussi absent. Eeri, en tant qu’officier, avait bien d’autres choses à s’occuper que de moi. Je me sentais très seule… Heureusement, j’ai rencontré une petite tryker Lyouna qui était venue s’installer à Pyr. Elle était enthousiaste et je l’ai aidé du mieux que j’ai pu. Elle a fini par vouloir intégrer les légions fyros, elle aussi… Je n’étais pas très enthousiaste pour qu’elle le fasse mais elle semblait tellement y tenir que j’ai donné un avis favorable à sa candidature. Elle m’a sautée au cou pour me remercier après que notre chef Icus lui ait remis son écusson de la légion.

Et puis, j’ai revu Ywan. Il semblait déprimé. Il n’avait plus envie de rien. Je crois qu’il pensait que tout serait facile, qu’il suivrait les traces de son oncle Morandy et qu’il deviendrait un grand magicien et un grand foreur comme lui. Mais la réalité était tout autre. Il était un jeune légionnaire débutant et même si il apprenait bien plus vite que moi, Atys ne faisait aucun cadeau à qui tentait de la défier… Il s’est endormi près du téléporteur kami de l’oasis d’Oflovak. Je l’ai quitté avec la gorge serrée… Allait il repartir et retourner dans les profondeurs?

Première réunion des légions fyros

Une nouvelle fois, j’ai été réveillée en sursaut d’un sommeil sans rêve. Icus appelait les légionnaires à la première réunion des nouvelles légions fyros.

C’est encore à moitié endormie que je me suis rendue dans notre hall de guilde. J’étais une des dernières à arriver et pourtant je savais où se situait notre immeuble contrairement à ceux arrivés après moi. Comme disait Icus, ce n’était pas difficile : c’était l’immeuble de guilde le plus proche de la taverne. Je me suis assise près de la porte en oubliant de saluer les présents. Eeri m’a fait un petit signe de la main auquel j’ai répondu avec un vague sourire. Si j’avais pu, je me serais assise près d’elle mais Kralis et Guyzion, l’entourait déjà. J’ai regardé un peu tristement l’assemblée : Ywan n’était pas là…

La réunion a commencé rapidement sous la direction d’Icus. Il allait nous falloir des uniformes. Depuis toujours, la légion arborait fièrement une armure fyros lourde rouge. Seuls certains anciens légionnaires, parmi ceux qui avait survécu au deuxième grand essaim avaient encore leur uniforme. Mais pour fabriquer des armures, il fallait des ingrédients. Un rendez-vous a été pris à Thesos pour organiser une récolte.

Puis, des expéditions allaient être à nouveau organisées pour Yrkanis, Zora et Fairhaven. Ceci afin de permettre à tous les légionnaires d’avoir accès aux télé-porteurs des capitales.

Depuis toujours la guilde avait été plutôt kamiste, mais cette fois, Icus semblait dubitatif sur cette orientation « religieuse ». Il semblait préférer une position plus neutre. Mais, l’avantage d’être dans les bonnes grâces des kamis, permettait d’avoir accès à leurs télé-porteurs. Toutefois, on entendait de plus en plus de rumeurs concernant la future apparition de télé-porteurs qui n’appartiendraient ni aux kamis, ni à la Karavane. La guilde allait restait neutre en attendant de plus amples informations.

Puis, les artisans de la guilde ont été choisis chacun avec une spécialité. Pour finir, les trois postes à responsabilité ont été distribués : Icus a conservé son rôle de chef, Maltor est devenu l’intendant et Eeri a été désignée diplomate. Ça m’a fait sourire : elle qui traînait dans les tavernes allait devoir apprendre à être sérieuse. Quoique comme elle le disait, la diplomatie pouvait commencer à la taverne!

La réunion s’est terminée. Je n’avais pas vraiment participé à part pour répondre aux questions qui étaient posées à tous. Je me sentais trop débutante parmi tous ses habitués de la surface. J’allais m’en aller quand Eeri m’a rattrapée pour me demander si je voulais quelque chose dans le hall de guilde. J’ai parlé de mes amplificateurs qui étaient devenus trop faibles pour les sorts que j’arrivais désormais à lancer. Elle m’a alors sorti un amplificateur correspondant à mon niveau de mage.

Après l’avoir remerciée, j’allais partir quand elle m’a demandé si je voulais faire quelque chose. J’étais heureuse : Eeri avait enfin un peu de temps pour moi. Nous sommes alors parties à la chasse aux bandits et aux créatures dangereuses pour sécuriser les alentours de Pyr à la demande d’un sergent de la garde. A vrai dire, c’était aussi pour gagner un peu de dappers qui étaient désormais si difficiles à gagner.

Ce soir là, je me suis endormie un peu rassérénée par la présence souriante et joyeuse de celle qui avait pris soin de moi après la mort de Kyshala.

Nouvelle expédition à Yrkanis

A peine éveillée, Eeri m’a proposée de la rejoindre pour faire le « tour des bandits » d’Oflovak comme elle l’appelait. J’ai accepté tout de suite même si j’avais la bouche pâteuse suite à la soirée de la veille. Ywan s’est alors réveillé en saluant la guilde. Eeri s’est alors montrée soupçonneuse : étrange comme nous nous réveillons ensemble Ywan et moi. J’ai pensé que j’aurais bien aimé passer la nuit avec lui mais en l’occurrence ce n’était pas le cas.

Elle m’a alors proposée d’inviter « mon beau blond » à nous suivre dans notre tour. Je me suis empressée de le faire. Il m’a répondu qu’il en avait marre d’attendre pour trouver des bandits. J’ai cru donc qu’il ne voulait pas venir. J’étais un peu déçue de sa réaction mais après tout c’était son choix. Eeri et moi, nous sommes donc partie toutes les deux à la chasse. Ce n’est que bien après que je me suis rendue compte que j’avais mal compris. Ywan avait voulu venir et n’avais pas parler des bandits d’Oflovak mais de ceux de Pyr… J’étais mortifiée et profondément déçue de ne pas avoir pu profiter de sa présence.

J’espérais le trouver pour le départ de l’expédition vers Yrkanis. Mais il n’était pas là m’indiquant qu’il nous rejoindrait « plus tard ». J’espérais qu’il n’était pas fâché contre moi… La troupe des légionnaires prêts à partir en expédition était impressionnante. J’avais rarement vu autant de monde rassemblé. D’ailleurs, la première partie du voyage vers Thesos s’est déroulée plutôt tranquillement sans véritablement d’attaques de la part de créatures, sans doute peu enclines à s’attaquer à un groupe tel que nous.

A Thesos, j’ai cherché Ywan du regard mais je ne l’ai pas vu. J’ai soudain entendu sa voix, il se moquait disant qu’il nous attendait depuis longtemps. J’ai souri en le saluant mais nous avons à peine eu le temps de nous parler que j’ai entendu le cri d’Icus : « Kralis non!!! ». Kralis s’était jeté droit devant dans un groupe de carnivores. J’aimais bien Kralis même si il était un peu « primaire ». Les rares mots qu’il prononçait étaient « Kralis content » ou « Kralis taper » ou encore « Kralis aime pas les minus » quand il parlait des trykers. Là, il avait décidé de n’en faire qu’à sa tête fonçant droit devant, sans doute tout heureux de pouvoir aller « taper » les vilaines bêtes.

Nous n’avions pas le choix, nous devions le suivre au risque de mettre en danger tout le groupe. La bataille a été acharnée : les varynx et les ocyx nous attaquant en nombre. Je suis tombée à plusieurs reprise mais relevée à chaque fois par mes camarades. J’ai bien cru à un moment que tout était perdu, tant il y avait de légionnaires à terre. Mais au dernier moment, la tendance s’est inversée : les prédateurs n’arrivaient plus. Et nous avons fini par être tous à nouveau debout. Mais il ne valait mieux pas rester dans le coin, nous nous sommes précipités vers le vortex nous permettant de rejoindre le désert matis.

Il y avait un téléporteur de la Karavane. Quand j’ai lu son nom « les sources cachées », je me suis souvenue des luciogrammes que Kyshala avait laissé dans son cube d’ambre. Je voulais moi aussi aller voir cet endroit alors j’ai acheté des pactes. J’ai entendu les remarques des légionnaires qui me reprochaient de commercer avec la Karavane. Je n’ai rien répondu. Mais même Ywan s’en est étonné. J’ai tenté de lui expliquer que je voulais découvrir les sources cachées mais je n’ai pas eu le temps pour des explications plus longues : nous étions déjà repartis.

Quelques minutes plus tard, nous étions dans les primes racines. Cette fois, Icus nous a laissé le temps d’apprécier le spectacle. J’ai même eu le temps de prendre un luciogramme.

Nous sommes repartis sans les traverser, c’était inutile pour aller à Yrkanis.

Nous étions bientôt arrivés quand nous avons croisé une tribu matis en plein déplacement. Je ne sais qui a commencé mais soudain nous étions en train de les combattre. Les matis se sont tous retrouvés à terre pendant que je me demandais pourquoi il nous avait attaqué. Mais c’est quand nous avons croisé le camp de la tribu des Graines vertes que j’ai compris.

Icus a lancé : « on va se faire les graines vertes ». J’ai cru à cet instant qu’il parlait des espèces de drôles de plantes en forme de cerveaux appelés psykoplas. Mais quand j’ai vu mes frères et soeurs légionnaires se jeter sur les membres de la tribu matis des Graines vertes qui nous avait laissé entrer sans méfiance dans leur camp, je suis resté interdite. Pourquoi faisaient ils çà ? Ces matis ne nous avaient rien fait… Je voulais bien répondre à une agression matis mais pas les attaquer volontairement et brutalement sans aucune raison. J’ai regardé les matis tomber les uns après les autres sous les coups des membres de ma guilde. Ils étaient déjà repartis loin devant quand je suis sortie de mon état de stupéfaction.

Je m’apprêtais à repartir quand j’ai vu une des nôtres qui était restée en arrière. J’ai eu l’impression qu’elle était blessée car elle ne réagissait pas aux coups que lui donnait un matis encore debout. J’ai appelé à l’aide. Les légionnaires sont revenus en force massacrant le pauvre matis. Mais de toutes évidences, j’avais fait une bourde… celle que j’avais cru en danger, avait voulu « se faire » seule le matis et je l’en avais empêchée en rameutant la troupe…

C’est l’esprit un peu perdu que je suis arrivée à Yrkanis. Une nouvelle fois, nous avons investi le trône du roi, prenant même un luciogramme de groupe.

Les autres sont repartis. Mais cette fois, je suis restée en arrière et je ne les ai pas suivi. J’avais peur qu’ils m’entraînent à nouveau dans des exactions contre les matis que je n’approuverais pas. Je me suis endormie dans un coin d’Yrkanis en espérant que si des gardes me trouvaient, ils ne me reprocheraient pas les attaques auxquelles j’avais participé bien malgré moi…

Fairhaven enfin!

Nous étions prêtes au départ Lyouna et moi pour le téléporteur du bosquet de l’ombre. J’avais prévu de partir très tôt, étant persuadée que j’allais me perdre dans les méandres de la jungle zoraï. A tout hasard, j’ai demandé sur le canal de la guilde si quelqu’un était intéressé pour nous accompagner jusque là. Je ne m’attendais pas vraiment à de réponses puisque la plupart des légionnaires avaient déjà fait le voyage. C’est avec surprise que j’ai entendu Ywan répondre qu’il voulait venir avec nous. Je dois dire que j’étais heureuse et rassurée qu’il nous rejoigne. Il connaissait la région pour l’avoir souvent parcouru seul.

Il nous a guidé sans hésitation au milieu de la jungle. Je crois que j’ai commencé à avoir peur quand il s’est dirigé droit vers un nid de kitines qu’Icus avait fait en sorte de nous faire éviter en faisant un grand détour. Ywan était confiant, il était déjà passé par là : étrangement, les créatures n’attaquaient pas… Je dois dire que je n’étais absolument pas rassurée pour autant. Passer au milieu de ces insectes répugnants et géants ne m’enchantait pas du tout. J’ai pris une grande inspiration et j’ai suivi Ywan au milieu des créatures. J’entendais le bruit caractéristique de leurs griffes sur le sol mais comme l’avait affirmé Ywan, elles ne nous attaquaient pas. La peur commençait pourtant à m’envahir. Je m’imaginais tomber sur le corps à moitié dévoré de Kyshala. Et si je la trouvais là au milieu des créatures avec Morandy? J’ai commencé à paniquer courant de plus en plus vite vers la sortie de l’amas de griffes.

Est ce ma peur qui les a attirées ou est ce que l’un de nous avait donné un coup par inadvertance à l’une d’entre elles? Elles nous ont soudain attaqués alors que nous étions en train de sortir de leur nid… Malgré l’intervention des gardes, nous avons fini par tous succomber. Ywan a demandé une résurrection aux kamis et est revenu nous relever. J’étais pâle je crois, mais incapable d’exprimer la terreur qui m’avait prise au milieu des kitines.

Nous avons continué la route, cette fois sans encombre jusqu’au téléporteur. Nous étions en avance, très avance… J’avais vraiment prévu large pensant nous perdre mais avec Ywan qui nous avait guidé tout avait été beaucoup plus simple. Allions nous attendre les autres pour partir? Nous sommes descendu vers le vortex des primes racines pour au moins profiter de la vue. Icus était là. J’ai vaguement émis l’idée de partir pour Fairhaven tout de suite. Icus a répliqué d’un ton sans équivoque : « on attend les autres! ». Puis, il est parti s’allonger un peu pour faire une sieste en les attendant. Lyouna, Ywan et moi, nous nous sommes regardés. Il fallait encore attendre de longues minutes avant que les autres arrivent. Nous sommes partis sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller Icus, nous étions tous d’accord pour tenter la traversée à trois.

La beauté des primes racines était une fois de plus enchanteresse : des gubanis, des bodocs et des mektoubs blancs parmi des plantes étranges aux couleurs fluorescentes…

Mais cette beauté hors du temps cachait les créatures les plus dangereuses d’Atys : des varynx à la peau sombre, des énormes tyranchas et des vorax, des espèces de lézards géants qu’on ne trouvait qu’ici.

Aussi quand Ywan nous a dit avec humour « c’est le moment de serrer les fesses », en nous montrant un passage entre ces créatures, je serrais tellement mes petites fesses potelées que j’aurais pu casser une noix. Nous avons sprinté mais heureusement aucune créature ne nous a attaqué. Nous avons finalement atteint le vortex qui menait aux pays trykers.

Nous nous sommes reposés un instant le temps de nous remettre de nos émotions. Ywan et Lyouna ont bien ri quand je leur ai raconté à quel point j’avais serré les fesses. Plus tard, nous avons d’ailleurs décidé que le cri « casse-noisette » signifierai pour notre petite troupe « attention danger ».

Il nous a fallu repartir, nous n’étions pas encore à Fairhaven. Il fallait passer entre des cutes, une tribu primitive particulièrement agressive. Ils formaient un barrage presque infranchissable. Nous avons tenté d’en combattre un : moi et Lyouna au soin et Ywan au combat. Ces êtres étaient particulièrement résistants… Nous ne pourrions pas passer en force. Mais la technique d’Ywan était la discrétion. Seul, il parvenait souvent à passer sans encombre mais nous étions trois et pas forcément aussi silencieux et discrets qu’une seule personne. C’était d’autant plus difficile que Lyouna était épuisée et avait du mal à nous suivre avec ses petites jambes. Pourtant, après plusieurs essais, nous avons pu rejoindre l’eau des lacs, synonyme d’abri sur Atys.

Fairhaven était en vue. Lyouna et Ywan se sont endormis au pied du téléporteur kami. Mais moi, je n’arrivais pas à dormir. Je voulais découvrir ce pays qui avait tant plu à ma cousine Kyshala. J’en rêvais depuis que j’étais arrivée à la surface. Je me suis baignée appréciant la limpidité de l’eau qui permettait de découvrir le merveilleux spectacle des fonds lacustres.

Alors que je profitais de ma baignade improvisée, j’ai vu arriver les légions fyros. Je les avais complètement oublié. Ils avaient rattrapé une grande partie du retard qu’ils avaient sur nous. Sans doute avaient ils pu passer sans encombre le barrage des cutes qui nous avait tellement posé problème. Ils courraient tous vers la taverne de Fairhaven semblant faire la course. J’ai suivi le mouvement.

Archlongine a annoncé fièrement qu’elle était la première. Icus a profité que nous étions rassemblés dans la taverne pour accueillir une nouvelle recrue : Gunbra. Elle avait déjà participé à plusieurs de nos expéditions. Pour ma part, j’avais particulièrement apprécié sa présentation un peu « brute de fonderie » dans notre hall de guilde surtout quand elle avait parlé d’Artifice qu’elle trouvait bizarre parce qu’elle se baladait souvent en petite culotte.

La soirée s’est poursuivie avec des verres de bière de shooki et de liqueur d’ocyx. Le reste est assez flou, je dois dire… Je suppose que j’avais un peu trop bu et que j’ai du m’endormir sur place.

A la recherche de Kyshala

Je me suis réveillée la tête dans le sable, sur la plage nord de la ville. Les brumes de l’alcool de la veille avait du mal à se dissiper. Je me suis relevée péniblement époussetant le sable collé à mes joues et mon front et j’ai regardé autour de moi. Ce pays était vraiment magnifique… Je comprenais pourquoi Kyshala l’avait tant aimé. Si elle était encore vivante, elle devait être là quelques parts. C’était décidé j’allais parcourir le pays tryker pour tenter de la retrouver.

Mais d’abord, j’avais envie de me baigner. Je me suis relevée et j’ai directement plongé dans l’eau. J’ai soupiré de plaisir : quel bonheur de nager dans cette eau transparente! Dans le désert, les points d’eau étaient rares et souvent trop sombres ou trop boueux pour en distinguer le fond. Là, je voyais les algues et les plantes lacustres flotter au grès des courants et les poissons multicolores venaient me chatouiller les pieds.

J’avais entendu parler de cette compagnie « Vers de Nouveaux Horizons » qui proposait aux homins de livrer des colis dans différentes villes de chaque région. Le but de ces livraisons était de mettre en place un système de transport rapide entre les villes remplaçant ainsi les téléporteurs kamis ou de la karavane. Ceci était bien sûr rémunéré et très bien d’ailleurs. J’allais profiter donc de ma visite du pays tryker pour livrer ces colis et me faire quelques dappers.

Mais pour çà, il fallait que je trouve leur représentant. Après une première recherche infructueuse, j’ai demandé sur le canal de la légion fyros si quelqu’un savait où le trouver à Fairhaven. Icus a répondu d’un ton bourru que je ferais mieux de le faire dans le désert ardent et n’a pas répondu à ma question. J’ai râler intérieurement : qu’est ce que çà pouvait lui faire d’abord? Si j’avais envie de livrer des colis au pays tryker, je le ferais avec son assentiment ou non! J’ai redoublé d’effort et j’ai fini par le découvrir dans une petite île au sud-est de Fairhaven.

Quand le représentant m’a donné le paquet, j’étais estomaquée : il pesait une tonne!!! Il a fallu que j’aille vider mon sac pour réussir à le porter. Le représentant m’a alors précisé que je gagnerai mes dappers une fois le colis livré et la rémunération était fonction de la difficulté à atteindre la ville. Ça tombait bien, je comptais aller le plus loin possible. Par contre, il fallait faire vite et arriver dans le temps imparti.

Ne connaissant pas très bien la région, je me suis dit que j’allais commencé doucement. Fairhaven était trop près et ne rapporterait sans doute pas grand chose : ma première destination serait Crystabell, une ville située un peu plus loin au nord. Cela me permettrait de vérifier ma capacité à sillonner la région. L’avantage du pays des lacs, c’est la présence d’eau partout qui offrait la possibilité de se réfugier en cas d’attaques. Ça m’allait très bien! J’adorais nager en regardant sous l’eau.

J’ai regardé la carte et j’ai trouvé un passage. J’espérais juste arriver à temps pour le colis. Mais à vrai dire, je n’ai pas vraiment eu de problème. Et, je suis tombée nez à nez avec le responsable des « Nouveaux horizons » de Crystabell dès mon arrivée. La récompense était intéressante mais pas autant que je m’y attendais. Sans doute que Crystabell n’était pas assez éloignée. J’ai fait un tour de la ville cherchant sans grand espoir Kyshala. J’ai posé des questions autour de moi en montrant un luciogramme de ma cousine : quelqu’un avait il vu cette fyrette?. On me répondait toujours par la négative. Un des pontons de Crystabell était relié à une petite île. De loin, j’ai vu qu’elle était envahie par un nid de kitines. Kyshala était elle là? Je me suis approchée à la fois terrifiée et fascinée par les insectes géants : est ce eux qui avait traîné le corps de Kyshala dans les entrailles de leur nid? Ma curiosité a eu raison de moi. Des soldats kitines m’ont pris en chasse. Malgré l’intervention de quelques gardes, je n’ai pas survécu à l’attaque.

Après une demande de résurrection aux kamis, j’étais de retour à Fairhaven. J’ai continué mes recherches toujours en emportant un colis avec moi. J’ai visité Avendale puis Windermeer, laissant à chaque fois un colis aux représentants des « Nouveaux horizons ». Personne n’avait vu Kyshala. Je m’y étais attendu mais la déception était grande.

Pourtant, j’ai continué, nageant longtemps visitant de long en large le pays tryker. J’ai fini par croiser une tribu tryker qui semblait déambulait comme moi à travers tout le pays. Je les ai suivi. Ils m’ont conduit à leur camp. J’ai été accueilli simplement, un énorme kami était là.

Étrange tribu, les trykers étaient plutôt des fervents de la Karavan, hors ceux-ci accueillaient sur leur petite île un ambassadeur kami. Ils m’ont dit qu’ils se nommaient les Corsaires. Apparemment, les autorités trykers les laissaient en paix car ils étaient des guerriers redoutables mais que surtout, ils étaient toujours là lors des guerres pour défendre la région des lacs. A eux aussi, j’ai demandé si ils avaient croisé Kyshala. Un de leur ancien guerrier l’a reconnue me redonnant espoir. Mais d’après ses dires, il l’avait vue bien avant le deuxième grand essaim…

Me voyant déprimée, ils m’ont invité à passer la soirée avec eux. L’alcool a coulé à flot. Je me suis endormie dans leur camp. A mon réveil, au moment de partir, ils m’ont promis de garder les yeux ouverts et de me prévenir si ils voyaient quelqu’un qui pourrait ressembler à Kyshala. Je leur ai laissé un luciogramme d’elle. Je suis repartie avec le sourire : si eux pensaient qu’elle était encore vivante, il y avait encore de l’espoir.

Anlor Winn

Les festivités d’Anlor Winn avaient commencé. Dans la culture tryker, Anlor Winn était le vent maléfique celui qui réveillait chez tous les homins, les terreurs de l’enfance. Des espèces de grosses citrouilles taillées et illuminées avaient envahi les rues des villes.

Des jeux allaient être organisés au bois d’Almati. Nous nous y sommes rendu avec Lyouna. Nous avons retrouvé là bas : Icus, Archlongine, Artifice et Ywan. Ça n’avait pas encore commencé, j’en ai alors profité pour admirer le paysage si particulier du bois d’almati avec ses arbres immenses. C’était l’hiver et la neige était tombée donnant au paysage une beauté rare…

Nous avons tous été appelés près d’une sorte de grand terrain entourée de barrière avec sur les côtés les plus courts des ouvertures au milieu. C’était les buts. Un tournois de yuboball allait être organisé. Icus a mis en place son équipe. Il voulait que les légions fyros soient représentées. Je n’étais pas très enthousiaste, j’étais venue en tant que spectatrice pas pour participer. Mais, nous étions très peu de légionnaires et Ywan ne voulait pas participer. Il fallait une équipe de cinq. Je n’ai pas vraiment eu le choix…

Pour gagner, il fallait attirer un yubo dans les buts de l’adversaire et cela sans le frapper : juste en l’agaçant pour provoquer son attaque ou en lui bloquant le passage. Nous étions l’équipe rouge, couleur de la légion depuis toujours. Un premier match avait lieu avant le notre, nous permettant d’observer la technique de l’équipe gagnante. J’ai demandé à Icus quelle allait être notre stratégie. Il nous a regardé avec un petit sourire. Il était le seul homin entouré de quatre homines : « Notre tactique est simple! Vous vous déshabillez pour déconcentrer l’adversaire et je marque le but pendant ce temps là! ». Nous avons bien ri.

Et puis, çà a été notre tour. Étrangement, nous avons gagné alors que je ne m’y attendais absolument pas. Nous avions repris la tactique de la première équipe gagnante qui attirait le yubo en avançant vers le but en marche arrière et en bloquant le passage du yubo quand il tentait de revenir sur ces pas. Nous étions donc qualifiés pour la suite du tournois. L’attente a été longue très longue… Je m’endormais presque. Heureusement, un homin est passé distribuant des bâtons en forme de sucre d’orge. J’ai reconnu tout de suite le bâton que Kyshala avait reçu en cadeau de Morandy. J’en ai pris un assez fière d’avoir moi aussi un joli sucre d’orge.

Notre deuxième match a commencé mais cette fois, le yubo avait changé. Il était beaucoup plus gros, énorme pour un yubo. Il faisait des bons gigantesques, nous bousculant quand nous tentions de le bloquer. Cette fois, notre tactique a complètement échoué et nous avons perdu le match. Icus semblait déçu mais pour ma part, j’étais plutôt contente de pouvoir aller me coucher. J’étais épuisée.

Le lendemain, des histoires terrifiantes étaient contées. C’était distrayant. J’écoutais en forant. Mais je dois dire que quand un matis a commencé à raconter une histoire de petit izam tombé du nid. Je me suis moquée : les matis trouvaient donc terrifiante cette histoire? Les matis étaient vraiment bizarres. J’ai préféré aller me coucher sans écouter la fin.

Libération du désert ardent

Depuis le deuxième grand essaim, les nids de kitines étaient toujours présents provoquant parfois des incidents malheureux lorsqu’on s’en approchait de trop près. il était grand temps de les refermer. Et c’est par le désert ardent que nous allions commencer.

Les légions fyros avait été réquisitionnées à Thesos et devaient se mettre sous les ordres de l’officier de l’armée impériale Ibritis Ibirus. Tous ceux qui le désiraient pouvaient se mettre à son service. D’autres groupes étaient également présents à Pyr et à Dyron et avaient le même objectif : détruire tous les nids de kitines.

Pour l’occasion et sur les conseils d’Eeri, je m’étais achetée une nouvelle armure légère. Pour les magiciens, c’est ce type d’armure qui était recommandé. Une moyenne ou une lourde étaient gênantes pour lancer des sorts et je voulais être la plus efficace possible pour la bataille qui allait avoir lieu. Au marché, je n’en avais trouvé aucune correspondant à la fois à mon niveau de magie et de la couleur rouge de la légion. Au final, j’avais opté pour un mélange de couleurs blanche et bleue.

Forcément quand les légions fyros se sont rassemblées toutes de rouges vêtues, je ressortais un peu du lot avec Bjorka qui n’avait pas non plus d’armure au couleur de la légion. Sylve a râlé déclarant que nous aurions pu réclamer notre armure rouge et qu’on nous l’aurait fabriquée : la légion subvenant au besoin de base de ces légionnaires. Mais à vrai dire, je n’aimais pas demander me sentant par la suite redevable. Il faut dire que même pendant les longs mois que j’avais passés en tant qu’enfant des rues, je n’avais jamais usé de la mendicité comme le faisait certains. Sans doute, qu’un jour la faim et le désespoir m’auraient poussée, moi aussi, à le faire si Eeri ne m’avait pas retrouvée…

Une seule fois, j’avais demandé une parure de bijoux magiques à Icus, presque forcée par Ywan. Mais j’avais tellement mal formulé ma demande que j’avais fini par avoir une parure que ma force magique n’était pas capable de supporter. Je n’ai jamais osé en parler Icus, mortifiée à l’idée de l’avoir fait travailler pour rien. Enfin pas pour rien, un jour je pourrais la porter sa parure. En attendant, j’utilisais une vieille parure usée et plus du tout adaptée à mes progrès en magie que Ywan avait pris pour moi dans le hall de guilde, il y a bien longtemps.

Nous étions près à partir. L’angoisse me nouait la gorge. Je savais que Kyshala avait vécu plusieurs batailles contre les kitines et qu’elle avait disparu durant la dernière. Est ce que moi aussi, j’allais disparaître? Est ce que mon corps allait être emporté par les kitines au fond de leur trou? Je me souvenais de la description horrible qu’elle avait faite des kitines dévorant des homins… Est ce que j’allais être dévorée moi aussi?

Alors que ces idées noires me trottaient dans la tête, notre armée s’est mise en route au pas de course. Il fallait boucher les nids le plus rapidement possible afin d’éviter qu’elles s’organisent. Nous sommes arrivés au premier nid. D’habitude je les regardais de loin mais là nous allions les combattre. il y a eu un bref moment d’observation mutuelle puis une clameur : les guerriers homins s’enfonçaient dans les rangs des kitines.

Ils ont été balayés. J’ai vu la marée de kitines s’avancer vers moi. La terreur m’a tétanisée. Je regardais les insectes sans réagir, les homins tombaient autour de moi. Et soudain, je me suis enfuie dans un dernier instinct de survie. Je courrais droit devant. D’autres soigneurs s’enfuyaient aussi tout comme moi, certains étaient pris à revers par des attaques de varynx qui profitaient de cette occasion. Et là… enfin… l’eau protectrice…

J’ai repris mes esprits et j’ai eu honte… honte d’avoir laissé mes frère d’armes sur place, sans soin. Est ce que c’était ce qui était arrivé à Kyshala? La rage m’a prise j’ai couru en sens inverse. Il fallait que je les sauve. Je lançais des soins à droite et gauche. Les soigneurs revenaient relevant les homins qui repartaient à la charge. A plusieurs reprises, je suis tombée : je ne fuyais plus. Je demandais une résurrection aux kamis, retournant en courant vers mes compagnons. Il a fallu plusieurs charges pour venir à bout de ce premier nid. Mais enfin, toutes les kitines ont été éliminées et le trou rebouché.

Puis nous avons continué, nous organisant un peu mieux à chaque nouveau nid. Pourtant à l’avant dernier nid, la bataille a failli tourner à notre désavantage : les kitines décimant les premiers rangs que les soigneurs ne pouvaient plus soigner attaqués par des varynx en arrière garde. Je suis tombée comme beaucoup d’autres. Un vortex n’était pas loin : j’ai demandé une résurrection et je suis repartie. Mais, une attaque de varynx m’a, à nouveau, fauchée. Je savais que la dette de vie que j’aurais à rembourser aux kamis serait énorme mais après tout j’étais une soigneuse et je me devais d’aller relever les autres quel qu’en soit le prix. Plusieurs fois ainsi, j’ai essayé de rejoindre les combattants mais je ne passais pas le barrage des carnivores. Alors, j’ai attendu que d’autres me rejoignent au vortex. Nous nous sommes organisés vaguement, nous soignant le mieux possible et nous sommes repartis en groupe cette fois. Zaydan était là en tant que tank, il m’a ouvert un passage. J’étais stupéfaite par le nombre d’homins à terre. J’ai soigné encore et encore. Finalement, ce nid a été refermé. Je me souviens des fanfaronnades de quelques légionnaires qui se vantaient de n’avoir rien eu à devoir aux kamis à la suite de cette bataille, j’ai répondu assez vertement ce jour là : savaient ils à quel point certains s’étaient dévoués accumulant une dette énorme de sève de vie aux kamis pour qu’eux ne doivent rien à personne? Je ne suis pas sûre que ma remarque ait été très appréciée.

Puis le dernier nid a été lui aussi rebouché. Icus a voulu faire quelques luciogrammes de groupe devant le dernier nid pour ne pas qu’on oublie ce que nous avions fait. Puis, nous nous sommes tous rendus à la taverne de Pyr pour fêter çà.

Je dois dire que je n’avais pas très envie de faire la fête. Toutes ses images sombres de Kyshala et de sa dernière bataille me trottaient dans la tête. Mais j’ai quand même pris un verre. J’ai remarqué les regards de plusieurs légionnaires sur les fesses très dénudées d’Eeri dans son armure légère zoraï. Quand je lui ai fait remarquer qu’elle avait beaucoup de succès. Elle a répondu d’un ton maussade qu’elle s’en passerait bien. Pourquoi? Ne voulait elle pas quelqu’un dans sa vie? Mais, en posant cette question, je me rendais compte que je ne l’avais jamais vu avec qui que ce soit… Elle me disait qu’elle ne voulait rendre de compte à personne et être libre de toutes attaches. Avait elle peur de souffrir? Mais ce n’était pas çà : elle avait plutôt peur de faire souffrir. J’ai répliqué avec un petit sourire qu’elle était pourtant attachée à « sa petite Shaa ». Mais, pour elle, ce n’était pas pareil… J’ai voulu savoir pourquoi ce n’était pas pareil. Mais comme à chaque fois que je cherchais à entrer un peu plus dans son intimité, elle détournait la conversation.

Elle m’a parlé de Glorf qu’elle était allée voir avec Icus, le chef des légions fyros quand Kyshala était encore là. Tout le monde le croyait disparu et pourtant Icus et elle l’avait retrouvé. J’ai pensé alors qu’il y avait encore l’espoir de retrouver Kyshala. Mais Eeri me disait qu’elle la pensait morte. J’ai encaissé le coup. Elle a poursuivi sur sa rencontre avec Glorf. Celui-ci n’était plus lui même. Il avait décidé de vivre parmi les Fraiders, ses étranges guerriers frahars. Il disait s’appeler désormais Glorrrf. Il avait absorbé une drogue durant son rite d’initiation et avait désormais le langage primitif des frahars : « Glorrf frraiderrr maintenant. Frrrrraiderrr!!! ». Je ne comprenais pas comment on pouvait choisir de devenir un être primitif… Mais Eeri m’expliquait qu’il avait choisi de tout oublier, ne se remettant pas de la mort de son empereur Dexton et de celui de ces camarades. Elle a ajouté que c’était comme çà et qu’il fallait l’accepter et vivre avec. J’ai compris enfin, où elle voulait en venir : Je devais vivre désormais avec l’absence de Kyshala…

Pendant toute cette conversation avec Eeri, je n’avais absolument pas suivi les autres conversations autour de moi. J’ai été au bar commander plusieurs bières de shooki… J’avais du mal à accepter. J’ai avalé plusieurs verres d’affilé, recherchant l’oubli dans l’alcool. J’ai commencé à m’écrouler. Je crois que je me suis endormie un bref instant le front sur le comptoir. Puis soudain, deux claques m’ont sortie du sommeil brutalement. Eeri m’avait réveillée à sa manière douce. J’ai beuglé : « çà va pôô nononono!!! ». J’étais prête à en découdre avec elle et lui rendre les baffes qu’elle m’avait donnée. Et elle m’a criée : « En slibard et sans parure, allez!!! ». J’ai obéi pressée d’en découdre avec elle. Et soudain, j’ai pris le poing de Gunbra en plein figure. Mais qu’est ce qu’elle me voulait elle? Je lui ai sauté dessus commençant à taper comme une sourde. Eeri souriait en sirotant son verre, pendant que Gunbra me susurrait d’un air agressif : « Je vais te répandre le rouge de tes yeux sur tout ton corps ». Eeri m’encourageait : « héééé tu te débrouilles bien!!!! Allez tape ça défoule!! ». Je continuais à taper encore et encore, extériorisant toute ma rage. Puis, Gunbra s’est écroulée me faisant sortir de l’état second dans lequel j’étais. Et j’ai compris : j’avais été enrôlée malgré moi dans un concours de combat à mains nues.

Les combats ont continué. Eeri devait se battre contre Archlongine mais elle a perdu contre la grande zoraï à la si grande allonge. Puis, c’est moi qui ai du la combattre. Moi aussi, j’ai perdue. L’alcool, les coups reçus et données ont eu raison de moi. Je ne comprenais plus rien. Je ne voyais plus qu’une masse informe de légionnaires se battant entre eux dans une mêlée générale… Je me suis endormie à même le sol dans la taverne…

Réflexions solitaires

J’étais de plus en plus souvent seule. Ywan ne faisait plus que de brèves apparitions fugaces et quand il était là, il ne réclamait pas spécialement ma présence. Lyouna était là parfois. Nous nous entraînions alors ensemble à défaut de pouvoir participer aux chasses des grands guerriers que les autres étaient devenus. Et puis Eeri, un jour, m’a annoncée qu’elle allait sans doute dans quelques mois rejoindre les profondeurs : elle avait des choses à régler…

Son annonce m’a glacée même si je n’ai rien laissé paraître sur le moment, préférant caparaçonner mon coeur pour éviter qu’il ne saigne. Elle aussi, elle allait partir? Comme Kyshala ? Est ce que tout ceux qui prenaient soin de moi finissaient par disparaître ? Dans ce cas, pourquoi s’attacher ?

A-t-elle sentie mon désarroi ? Je ne sais… Mais, elle s’est faite beaucoup plus présente me proposant de l’accompagner dans ses chasses. Elle ne me posait pas de questions. Nous profitions juste de la présence l’une de l’autre retrouvant cette drôle de connivence qui avait toujours marqué notre relation : peu de mots échangés mais une compréhension presque immédiate et instinctive de l’autre.

Pourtant, je n’osais lui parler des doutes que j’avais sur ma présence au sein des légions fyros et de mon incartade chez les matis. J’avais peur de la blesser, elle qui avait tellement donné pour le renouveau de la guilde.

Finalement, ma solitude me permettait de réfléchir à tout çà. Je ne suis pas allée à la deuxième réunion des légions fyros malgré les appels insistants d’Icus sur les ondes de la guilde. Je préférais rester seule au bord du lac de la région des vents du songe, en faisant glisser le sable entre mes doigts. Je les entendais parfois échanger. Je crois qu’ils ont décidé d’organiser une journée de forage ensemble chaque semaine.

Mais alors que je les écoutais distraitement en regardant les couleurs du ciel à la nuit tombante, des petites perles de lumière roses se sont mises à s’élever du sol autour de moi…

C’était tellement beau…

Sans doute, certains religieux y auraient vu un signe de Ma-Duk ou de Jena. Mais je me suis toujours méfiée de la religion et de ceux qui en portent la parole : qu’avait donc fait ces sois-disant déités lors de la mort de mes parents et de celles de ma tante et de mon oncle? Et qu’avaient ils fait pour Kyshala? Moi, je ne voyais là qu’une merveilleuse manifestation de la beauté d’Atys. Est ce que ma voie était là dans la défense d’Atys?

Une chose était sûre, alors que j’entendais Icus grogner des ordres sur les ondes de la guilde pour entraîner les légionnaires à des formations en ligne ou en carré, je me sentais bien plus heureuse d’être là au milieu des lucioles qui voletaient autour de moi qu’à faire des exercices militaires.

Où est ma place?

Cela faisait plusieurs jours déjà que je furetais à droite et à gauche dans les cubes d’ambre sans vraiment savoir ce que je cherchais. Sans doute que j’espérais y trouver une nouvelle direction à prendre dans ma vie d’homine.

Ces derniers jours m’avaient fait comprendre que je n’étais pas à ma place au sein des légions fyros. Je n’avais pas la même façon de penser ni les mêmes idéaux qu’eux. Mais qu’elle était ma place ? Défendre Atys mais comment?

Et puis je suis tombée sur des discussions sur les neutres de culte et civilisation. Je trouvais dans celles-ci comme une connivence d’esprit. Je découvrais ce qu’était les gnosts et les tenants. Les gnosts étaient ceux qui ne privilégiaient aucune religion Kami ou Karavan respectant les deux. Les tenants étaient ceux qui ne privilégiaient aucune « civilisation », ils étaient appréciés de la même façon par les peuples trykers, zoraïs, matis et fyros. Je me sentais très proche de ces deux définitions.

Et puis ce passage m’a soudainement frappé :

« La raison d’être des Rangers est de protéger les homins contre la menace kitine. Les Rangers sont animés par un idéal de fraternité. Ils pensent que les homins devraient vivre en paix sans division, estimant que les divisions entre homins ont été l’une des causes de la catastrophe du Grand Essaim, chaque peuple ayant lutté seul. »

Mais oui… c’est çà… J’étais une Ranger dans l’âme… J’avais trouvé ma voie… Je suis restée un instant stupéfaite par cette évidence.

Moi qui me croyais anormale, je découvrais que je n’étais pas seule et que d’autres partageaient les mêmes opinions que moi. Il me restait à les rencontrer.

Mais avant, j’avais quelque chose de difficile à faire : quitter les légions fyros… Je n’avais pas peur d’être seule et de perdre la protection de la guilde mais mon coeur se serrait à l’idée de blesser ou de décevoir ceux qui avaient cru faire de moi une légionnaire : Eeri, Icus, Ywan…

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