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Le mépris de Fharath

Jour 25 Elfist – Fingelien 384
Malkael m’avait parlé de Fharath, il y a quelques jours. J’avais été surprise d’apprendre qu’elle s’était éloignée du peuple parce qu’elle s’était sentie dénigrée par les sombres. Je me demandais pourquoi et à quelle occasion, elle avait eu cette impression. Si ce malentendu pouvait être dissipé, peut-être que la fière sombre qu’elle était reviendrait parmi nous et qu’avec sa force de caractère, elle pourrait devenir la future Ilharess qui pourrait remplacer Kharya.

En effet, j’avais beau retourner le problème dans tous les sens : je savais que je n’étais pas celle qu’il fallait pour les sombres. Je n’avais pas assez d’autorité et de goût pour la politique pour être une Ilharess qui saurait mener le peuple. Même si Fharath était, elle aussi, peu attirée par la politique, elle était respectée, fière, dure avec les autres et avec elle même, avec une autorité naturelle et un sens de la répartie que je n’avais pas. Je savais qu’elle pourrait être une grande Ilharess si elle le voulait.

J’ai donc engagé la conversation télépathiquement avec elle. Je savais par avance que la conversation serait glaciale et je m’y étais préparée mais je ne pensais pas en ressortir aussi blessée.

J’ai commencé par essayer de savoir ce qui avait provoqué son départ. Apparemment, il y avait eu un incident sur une proposition de travail en commun qu’elle avait faite pour fabriquer des bagues de Naralik. Je n’avais aucun souvenir de çà… Il y avait eu aussi des accusations sur des prétendues ventes à Véreux. Je me doutais que MageInvok devait être à l’origine de ces moqueries et de ces accusations douteuses. Elle et lui étaient constamment à couteaux tirés à l’époque. J’ai essayé de lui préciser que celui-ci n’était plus là. Elle le savait déjà et affirmait que c’était une bonne chose pour le peuple.

Malgré les continuelles piques qu’elle me lançait à chacune de mes phrases, j’ai tenté d’orienter la conversation sur celle qui devrait succéder à l’Ilharess. Elle semblait être très courant de tout ce qui se passait dans le peuple parce qu’elle n’a pas paru surprise à cette annonce. Elle a même ajouté que çà la désolait que je sois la successeure presque désignée de l’Ilharess. Je suis restée un instant interdite. La pique m’avait fait mal cette fois mais je n’ai pas bronché préférant affirmer que çà me désolait tout autant qu’elle et que justement, elle était surement plus apte que moi pour prendre cette place.

Une fois de plus, elle m’a attaquée frontalement. Je fuyais mes responsabilités en me déchargeant sur elle. Ce n’était pas tout à fait faux mais à vrai dire, je ne faisais que penser à mon peuple. Elle a martelé que le peuple sombre était mort et que j’en étais responsable. Je suis restée interdite. Fharath me méprisait. Elle détestait ce que je représentais. Je n’étais pas grand chose de plus pour elle que les inférieurs : Voronwe, le représentant haut-elfe, était bien plus sombre que je ne le serais jamais…

Une boule s’est formée dans ma gorge. Je n’arrivais plus à parler ou difficilement. Malkael qui était à mes côtés a remarqué mon trouble et m’a conseillé de cesser la conversation. J’ai tenté de le faire une première fois, elle a sauté sur l’occasion pour me rabaisser à nouveau en disant que je fuyais une fois de plus, qu’une vrai sombre face à ce genre d’attaques aurait répliqué et « mordu »… Mais à quoi bon continuer une conversation qui n’en était pas une et qui ne servait à Fharath qu’à déverser son fiel sur moi ?

Je crois que j’ai perdu ce jour là tout le respect que j’avais pour elle mais j’ai aussi perdu beaucoup plus : le peu de confiance que j’avais acquis en m’occupant de mon peuple venait d’être détruit par les quelques agressions acerbes d’une autre sombre. Je savais désormais que jamais je ne pourrais être Ilharess…

Lettres et glace

Jour 9 Ullitavar – Fingelien 384
Durant le voyage, je repensais aux lettres brutales et dénuées de sentiments que j’avais envoyées à Iymril et Bahar en quittant les îlots. Je me souvenais d’une phrase maladroite que j’avais écrite à Iymril en parlant de Malkael : « Vous avez su profiter d’une période difficile pour Khaena pour attirer son attention. ». Je me rendais compte à quel point cette phrase pouvait être mal interprétée. J’espérais qu’il n’en était rien mais je n’avais eu aucune réponse d’Iymril.

D’ailleurs, je n’avais eu aucune réponse non plus à la lettre que j’avais envoyée à Bahar :
« Bahar,

Je crois que vous avez le droit de savoir que Khaena et Killya n’existent plus. Leurs esprits ont fusionnés en un seul. Je suis le résultat de cette fusion.

Je ferais en sorte que vous ne manquiez de rien comme l’aurait souhaité Khaena et Killya.

La chose qui remplace Khaena et Killya. »
Je ne sais ce qu’a pensé Bahar de cette lettre… Je suppose qu’elle a été mortifiée.

Étrangement, j’avais l’impression que mon attitude glaciale avait été semblable à celle qu’avait Fharath. Est ce que la sombre si dure et si froide avait cette façon d’être pour se protéger? Est ce qu’elle caparaçonnait son coeur ainsi pour ne pas souffrir? Possible… Mais à vrai dire, je ne voyais pas bien comment je pourrais le vérifier. Il faudrait déjà que j’arrive à l’approcher sans qu’elle me repousse. Mais je n’étais pas sûre d’avoir envie de ce genre de confrontation même si je n’étais plus aussi vulnérable que la Khaena d’avant…

J’étais bientôt arrivée. J’attendais le bateau. Je regardais au loin espérant distinguer les îlots. Qu’allais je retrouver là bas? Est ce que j’aurais envie de rester cette fois?

Fil de soie

Jour 20 d’ullitavar du fingelien 384

L’expérience vécue dans le vieux temple m’avait affectée bien plus que je ne le pensais…

Mon parcours sur ces terres était récent,certes,mais j’avais du mal à reconnaître ceux qui avaient la même couleur que moi…

Je n’avais plus envie de les côtoyer…

Fharath,cette sombre si inaccessible mais qui me fascine tant son aura me magnétise,s’était trompée :

je ne me voyais aucun avenir parmis les enfants de Lith…

Je n’en souhaitais aucun …

Une seule chose me retiens ici telle un fil de soie lancé par une tisseuse :

L’odeur de ces terres,les mystères qu’elles recèlent et que je n’ai pas encore découverts…

Ces êtres qui cohabitent ,se cotoient ,s’ignorent,s’aiment,se détestent…

… Fil de traine ou fil englué ?

… Je vais laisser le temps défiler …un peu …peut être…

J’ai tant de choses à faire … je crois …

Peau sombre

Jour 13 Mundia – Fingelien 384
Je n’avais toujours pas de nouvelles de Shaael… Ma douleur se transformait en rage… Le premier à en faire les frais a été Mulvaar. Il grognait sur le manque d’habileté de Tankel à réparer ses dagues et regrettait de l’avoir aidé à retrouver sa fille. Alors je l’ai volontairement provoqué pour attiser sa colère en lui reprochant son manque d’amabilité. J’avais envie d’en découdre et n’importe qui aurait fait l’affaire mais à vrai dire Mulvaar était une proie facile à mettre en rage… trop facile à mon goût…

Il a commencé à dire que Tankel travaillerai mieux si sa fille avait une lame sous sa gorge. Puis quand je lui ai fait remarqué qu’il était douteux que lui un ancien échevin ne respecte pas les lois. Il a rétorqué, tombant dans le piège que je lui tendais, que les lois pouvaient être bafouées à condition de ne pas se faire prendre. J’ai répliqué qu’un sombre pouvait donc écraser les araignées de Naralik tant qu’il ne se faisait pas prendre, rappelant un incident qui avait eu lieu où un jeune sombre par pure provocation s’était enorgueilli de tuer des araignées. Je m’amusais pendant que Rhiodan s’esclaffait. Mais Mulvaar commençait à être étouffé par la rage d’être humilié en public.

La discussion s’envenimant et provoquant des remouds au sein des sombres présents, Alak devenu le fils adoptif de Mulvaar, a tenté d’apaiser les choses. Mais il n’a fait que déporter la rage de son père sur lui. J’ai alors traité Mulvaar de « primate » parce qu’il préférait passer sa rage sur plus faible que lui. J’ai ensuite signifié l’arrêt de la dispute en déclarant que j’allais suivre les conseils d’Alak qui était bien plus avisé que son père. Et c’est avec une joie malsaine que j’ai entendu Mulvaar passer sa rage à mains nues sur les créatures qui l’entouraient.

J’en avais terminé avec lui mais j’avais encore besoin de passer ma rage sur quelqu’un. Et qui mieux que Fharath pouvait répondre à mon besoin d’agressivité. C’était une adversaire redoutable plusieurs fois elle avait par le passé, brisé le peu de confiance que j’avais en moi. Mais cette fois-ci, étrangement ses piques glissaient sur moi sans m’atteindre et je ne me privais pas de lui en envoyer. Petit à petit, ma rage s’atténuait et j’appréciais nos petites passes d’armes.

Notre discussion (dispute? ) durait mais je n’avais aucune envie cette fois-ci d’y mettre un terme. Je crois que Fharath s’amusait elle aussi. J’avais l’impression parfois qu’elle tentait de m’apprendre l’art de la répartie et j’écoutais ses conseils avidement non sans me moquer d’elle en la soupçonnant de vouloir faire de moi son apprentie. Elle m’a plusieurs fois appelée « peau sombre ». Je savais que c’était une provocation et qu’elle voulait dire par là que je n’étais sombre que de peau mais pas d’esprit. J’ai fini par lui demander si c’était le cas. Elle m’a affirmé que c’était un nom doux qui me convenait bien tout en me faisant la leçon : il ne faut jamais relever un mot qu’un adversaire cherche justement à vous faire relever…

Finalement, j’aimais bien qu’elle m’appelle ainsi : Peau sombre. Étais-je en train d’apprécier Fharath? Est ce que ma douleur et ma rage me rapprochaient d’elle?

Ul’Jaliless

Jour 16 Mundia – Fingelien 384
C’était le dernier conseil matriarcal avant le départ de Kharya. Il devait être décidé entre autre de comment serait géré le peuple en son absence.
Le conseil venait tout juste de débuter quand j’ai senti la présence de Fharath. Je lui ai proposé par jeu de venir y participer pensant qu’elle m’enverrai une fin de non recevoir. Mais, c’est avec surprise que je l’ai entendu répondre un « pourquoi pas! ». J’en suis restée stupéfaite.

Mais son isolement volontaire faisait qu’elle ne connaissait pas la nouvelle salle de notre peuple… à moins qu’elle est volontairement feint l’ignorance pour que ce soit moi qui doive la mener jusque dans notre salle. Ça m’était égale après tout. J’assumais le fait de l’avoir invitée même si je savais qu’elle allait sans doute provoquer des remous.

Son entrée dans la salle à ma suite a jeté un grand froid. Fharath s’est assise au fond de la salle. Je lui ai lancé une petite pique par télépathie en lui demandant si elle avait besoin de la permission de l’Ilharess pour s’asseoir sur les grands sièges destinés aux Jalilessen. Elle s’est alors levée et s’est assise aux côtés de Polgarath.

Kharya a d’abord nommé Darkmon Jaliless. Ma jeune soeur sombre était particulièrement émue par cette promotion. Mais elle le méritait : elle était réfléchie et posée. Elle s’est assise à mes côtés. La disposition des Jalilessen était d’ailleurs surprenant. D’un côté de l’Ilharess, il y avait la faction dure et traditionnaliste avec Polgarath et Fharath et de l’autre, il y avait moi et Darkmon qui avions une image plus douce et plus ouverte.

Kharya a ensuite annoncé qu’elle souhaitait nommer une des Jaliless, Ul’Jaliless. Cette dernière serait chargée de présider le Conseil Matriarcal en son absence. Son rôle sera de proposer les thèmes à débattre afin de prendre des décisions avec l’appui du Conseil.

Rhiordan était absente mais elle lui avait fait savoir qu’elle désirait que ce soit moi qui soit choisie. Kharya a ensuite annoncé qu’elle pensait que j’étais la plus à même de prendre ce poste. Elle s’est ensuite tournée vers le reste du conseil pour qu’il donne son avis.

Darkmon s’est levée et a déclaré qu’elle me choisissait. Polgarath a ensuite pris la parole et s’est approchée de moi avec son bâton de nécromancie. J’ai bien cru qu’elle allait me frapper mais je n’ai pas cillé. Finalement, elle a violemment tapé son bâton sur le sol en déclarant qu’elle me choisissait. J’ai incliné la tête en signe de remerciement.

C’était au tour de Fharath. Tous attendaient qu’elle prenne la parole mais elle restait silencieuse. J’étais persuadée qu’elle allait refuser que je sois l’Ul’Jaliless. Finalement Kharya lui a demandé qu’elle était son choix. Elle a répondu : « mon silence est ma réponse ». Venant d’elle, j’ai presque pris çà comme un assentiment. J’ai souri discrètement.

C’était au tour des mâles du conseil de donner leur avis. Mulvaar a indiqué qu’il acceptait ma nomination à condition que je laisse à l’écart mes côtés humains. Etant donné, l’inimitié qu’il y avait entre nous, j’étais surprise qu’il fasse ce choix surtout après ce que je lui avais fait. Mais, je suppose qu’il ne voulait pas aller contre l’avis de l’Ilharess. J’ai souri amusée. C’était ensuite à Alak d’annoncer son choix mais celui-ci a juste indiqué qu’il n’avait pas d’avis. Fharath a lancé un « çà c’est un bon mâle ». J’ai failli m’esclaffer comprenant la pique envoyée à Mulvaar.

J’ai donc était nommé Ul’Jaliless. Je me sentais honorée par cette confiance mais je savais que ce poste serait particulièrement difficile à tenir.

Il a fallu ensuite nommer un responsable du dépôt sombre. C’est Alak qui a été choisi. Je ne me souviens pas bien à propos de quoi mais un accrochage assez virulent a eu lieu entre Polgarath et Fharath. La haute-prêtresse avait tutoyé Fharath et celle-ci détestait çà. Les deux femelles sombres se dressaient sur leur ergots toutes deux aussi fières l’une que l’autre. Mais à mes yeux, Polgarath semblait soudain bien douce comparée à Fharath. Elle ressemblait à une enfant capricieuse qu’on a contrarié alors que Fharath restait comme à son habitude glaciale, fière et distante.

Quand , j’ai fait remarqué à Fharath par télépathie que Polgarath avait l’air d’un doux agneau à côté d’elle, elle a rétorqué qu’elle m’avait déjà dit que Polgarath n’était pas si terrible : elle finissait toujours par obéir.

Le conseil s’est terminé Fharath est partie immédiatement par téléportation. Quand à moi, j’avais du mal à partir et je n’étais d’ailleurs pas la seule… J’avais peur de ne pas revoir Kharya avant son départ mais elle m’a assurée qu’elle me préviendrait avant de s’en aller. Je suis alors partie très vite, soudain submergée par l’émotion. J’avais peur que Mulvaar se moque des larmes qui allaient inévitablement couler et me reproche à nouveau mon côté bien trop humain.

Ma jeune soeur Darkmon, s’est inquiétée de ma réaction. Elle était douce et réconfortante. Ses paroles étaient pleines de bon sens. Je comprenais qu’elle ait été choisie comme Jaliless même si elle n’a pas réussie à apaiser ma peine. Qui l’aurait pu d’ailleurs?

Je me suis ensuite endormie à nouveau seule, à même le sol dans le recoin d’une grotte.

Tracasseries et retour d’Elzeberith

Jour 6 Kamarien – Fingelien 384
Peu de choses se sont passées ces derniers jours. Le peuple sombre était comme sonné par la départ de sa Matriarche. A moins que ce ne soit moi qui ne voyait plus bien, ce qu’il se passait…

Puis les choses ont repris un cours normal avec les tracasseries quotidiennes entre sombres. Une nouvelle fois, Seliane a provoqué un incident… Elle avait vu Melany regarder de trop près son nouveau mâle le représentant des pâles Voronwe… Il s’en était suivi une querelle entres les deux soeurs sombres. Finalement, Melany avait défié en duel Seliane. Cette dernière m’a demandé audience pour me parler de l’incident. J’ai tenté de les apaiser toutes les deux mais elles ont continuer à s’invectiver de plus en plus durement. Finalement, j’ai pris la décision avec Darkmon et en l’absence des autres membres du conseil de leur donner à toutes deux la même punition : récolter 1000 quartz roses chacune pour le dépôt du peuple.

Puis, j’ai eu la surprise de découvrir l’arrivée de l’ex haute-prêtresse Elzeberith. Mes premiers pas en tant qu’Ul’Jaliless n’allait sans doute pas être des plus simples avec son arrivée. Killya l’appelait à l’époque la vipère et je ne pense pas qu’elle ait beaucoup changé depuis. Mais à vrai dire, çà m’était égale, comme si plus grand chose ne me touchait… J’ai même proposé à Elzeberith de lui faire visiter la nouvelle Naralik. Elle a accepté. J’ai parlé de mes craintes au sujet d’Elzeberith à Darkmon. Celle-ci s’est proposée de m’accompagner. Ca me faisait plaisir que ma jeune soeur me soutienne ainsi.

Puis, j’ai pensé que Fharath serait peut-être heureuse de savoir que Elzeberith avec qui elle entretenait des rapports cordiaux était revenue. Je lui ai même proposé de participer à la visite de Naralik, croyant ainsi lui offrir une bonne excuse pour venir voir la prêtresse. Mais, celle-ci s’est complètement fourvoyée dans ce qu’elle pensait être mes pensées. Elle s’imaginait que je souhaitais sa venue parce qu’Elzeberith me faisait peur. J’avais d’après elle, « la peur qui suintait par tous les pores de ma peau »… Comment pouvait elle se tromper à ce point? J’avais pensé naïvement que nos dernières discussions nous avaient rapprochées. Ne voyait elle pas que je n’étais plus la Khaena timide et renfermée qu’elle avait connue ? Ne voyait elle pas que je n’avais plus peur d’elle, ni de Elzeberith? Je n’ai pas poursuivi cette discussion stérile avec elle. c’est la première fois que Fharath me décevait à ce point.

La visite de Naralik a été brève mais suffisante pour voir à quel point Elzeberith exultait de découvrir la transformation de nos terres. Pour la visite du temple de Lith, je l’ai laissé aux mains de Rhiordan qui était son apprentie au moment où elle est partie.

De retour au dépôt, je me suis installée pour travailler sur quelques potions. Voronwe est arrivé. J’étais agacée d’avance par sa présence pour avoir provoqué l’incident entre Seliane et Melany, d’autant plus qu’il avait tendance à vouloir attirer mon attention. Ca n’avait d’ailleurs pas échappé à Darkmon, nous en avons ri toutes les deux. Voronwe aurait sans doute pu m’intéresser il y a quelques temps mais j’avais perdue l’envie de goûter aux mâles… Et, je me méfiais bien trop de lui pour le laisser me séduire. J’étais donc volontairement désagréable avec lui.

Notre jeune soeur à l’esprit égaré, Nisrath, m’a donné l’occasion de le taquiner encore plus. Celle-ci avait décidé d’en faire son jouet. Elle le pinçait, le tâtait avec une branche. Je lui ai donné l’idée de le manger comme le faisait un de nos frères maintenant disparu. Ca a beaucoup plus à Nisrath mais beaucoup moins à Voronwe pour ma plus grande joie. Mais il est quand même resté jusqu’au bout forçant mon admiration malgré les gentilles maltraitances que lui infligeait Nisrath.

Je suis finalement partie en saluant tout le monde sauf bien sûr Voronwe. Je dois dire que j’en ai éprouvé un plaisir malsain. Je crois qu’il va me détester maintenant. Dire qu’avant, j’avais du mal à supporter les reproches et la haine des autres… Maintenant, cela m’amusait…

Une lettre à Fharath

Jour 20 Kamarien – Fingelien 384
Je n’ai pas sentie la présence de Fharath depuis notre dernière discussion. Peut-être que je m’inquiète pour rien : elle est si solitaire. Mais, je l’ai sentie si pleine de doutes et si fragile la dernière fois et je me suis montrée si stupide, en ne cherchant pas à comprendre le pourquoi de cet état…

Ma façon d’aborder Fharath me rappelle la façon avec laquelle, enfant solitaire, je cherchais à approcher petit à petit les animaux sauvages, mes seuls amis pendant longtemps. Il fallait de la patience, beaucoup de patience et s’approcher doucement petit à petit. Faire accepter sa présence. Ne pas s’approcher trop vite ou avoir de gestes brusques au risque de morsures cruelles ou pire ne pas revoir avant longtemps la créature que l’on cherche à approcher.

Ce soir là, j’étais sur le point d’éffleurer ce qui se cachait derrière la carapace de Fharath, et ma fatigue a fait que je ne l’ai pas vu, pas compris… Et elle s’est à nouveau cachée…

Je ne savais pas comment rattraper ma bévue. Présenter des excuses n’était pas une manière sombre et si je l’avais fait j’aurais attiré son mépris sur moi. Je lui ai alors écrit une lettre où j’ai tenté de lui expliquer mon point de vue. J’ai accompagné la lettre d’une rose noire.

« Fharath,

Je ne sais si vous lirez cette lettre, le coursier ayant semble-t-il du mal à vous trouver parfois . Mais lors de notre dernière discussion, vous m’avez semblé si différente presque fragile… Depuis, je ne sens plus votre présence et du coup je m’inquiète pour vous… peut-être à tord…

Je voulais juste vous préciser que quand je vous ai dit que j’appréciais de parler avec vous, cela n’avait rien d’une politesse hypocrite… C’est réellement le cas mais ce soir là, j’avais passé mon temps à travailler pour le dépôt du peuple et j’étais épuisée. J’aurais pu discuter encore des heures avec vous si la fatigue n’avait pas eu raison de moi.

J’aimerai vous offrir cette rose en souvenir de cette discussion.

Elle est aussi noire que nos peaux et aussi épineuse que peuvent l’être parfois nos échanges. Et pourtant, elle reste magnifique.

Que la nuit veille sur vous.

Khaena. »

Comment réagira-t-elle? Sera-t-elle touchée? Ces questions ont tournées en boucle dans mon esprit dans la nuit qui a suivi…

Et Fharath ?

Jour 8 Thyllion – Fingelien 384
Cela fait déjà plusieurs fois que je discute avec Fharath depuis que je lui ai envoyé une lettre. Elle n’a pas répondu mais à vrai dire je m’y attendais. Elle n’a fait aucune allusion à celle-ci. Je sais qu’elle l’a reçue, le coursier me l’a confirmé. L’a t’elle seulement lue ?

Peu importe, elle a décidé de faire comme si cette lettre n’avait jamais existé et je n’ai pas l’intention de lui en parler. Cela en restera sans doute là. J’essaie parfois de lui demander comment elle va mais elle ne me répond pas ou me signifie vertement que cette question n’a aucun intérêt. Je suis condamnée avec elle à n’avoir que des discussion politique, seul moyen de l’aborder. J’ai bien pensé à tenter d’acheter les traités qu’elle avait mis en vente mais je ne ferais que passer d’une discussion politique à une discussion commerciale.

Je n’ai plus beaucoup d’idées pour entrer en contact avec elle et comme elle ne cherche jamais à engager la conversation avec moi, je pense que tout ceci va finir par s’éteindre petit à petit. C’est peut-être mieux ainsi car j’ai l’impression qu’elle cherche à me faire entrer dans un moule qui n’est pas le mien.

Retour, pertes et soumission

Jour 4 Archeno – Fingelien 385
Je suis revenue sur les îlots. Shaael était restée introuvable et comme je n’avais pas de réponse de Kharya, je craignais que le peuple sombre ne soit plus dirigé par personne.
Mais à mon arrivée, Kharya était là et depuis longtemps semble-t-il… Elle n’a exprimé aucun sentiment à mon retour et ne m’a rien demandée… Comme si çà lui était indifférent… J’avais pourtant espéré… enfin, je ne sais pas ce que j’espérais… Elle ne m’aime plus. Quand je repense à cette soirée sous les étoiles où elle m’avait avouée son amour, je me demande encore comment nous en sommes arrivées là…

J’avais l’horrible sensation d’avoir perdu ma femelle chat à jamais pour venir en aide à mon ancienne amante Kharya, espérant sans doute que je retrouverais son amour… Au final, je les avais perdues toutes les deux.

J’ai salué Fharath dont j’avais senti la présence, juste par habitude sans vraiment penser à lui faire la conversation, en me demandant juste si elle avait remarqué mon absence. Quand bien même, j’étais persuadée qu’elle ne daignerait pas montrer qu’elle s’en était rendu compte. Mais, une fois de plus, elle m’a prise à contre-pied. Après m’avoir saluée, la première chose qu’elle m’a dite c’est que cela faisait longtemps qu’elle m’avait entendu… J’ai répondu par l’ironie en lui demandant si je lui avais manqué. Evidemment, elle a répondu par la négative : elle n’avait jamais eu besoin de personne… Mais elle m’a retournée la question, affirmant que nous connaissions toutes les deux la réponse…

Je ne sais pas à quelle réponse, elle s’attendait… Mais en réfléchissant, je me suis rendu compte que oui, étrangement, Fharath m’avait manqué. J’aimais nos conversations parfois acerbes qui me faisaient oublier mon désespoir. J’aimais essayer de la comprendre. Alors, je lui ai avoué de façon un peu amère et ironique qu’effectivement, elle m’avait manquée, sans doutes à cause de mes travers trop humains…

Je crois qu’elle a senti que j’allais mal, très mal. Elle s’en ai même presque inquiété me demandant ce que j’avais. Mais comment expliquer la douleur que je ressentais au fond moi à quelqu’un qui ne sait pas ce qu’est l’amour? Elle a semblé agacée ou a fait semblant de l’être, je ne saurais dire, déclarant qu’effectivement les sombres étaient trop stupides pour comprendre ce genre de choses. Mais, je n’avais pas parlé des « sombres » mais d’elle uniquement d’elle. Je m’attendais à une réplique cinglante mais elle a accepté affirmant qu’elle ne savait pas ou avait oublié comment « tendre la main ».

Elle m’a même demandé de lui expliquer ce qu’était l’amour pour moi… Étrange discussion… Pour elle, une relation avec un mâle n’était qu’une histoire de domination et de soumission. Son but était de faire du mâle sa « chose » et qu’il atteigne le « fond de sa déchéance ». Une fois arrivée à ce stade, elle délaissait le mâle n’ayant plus rien à lui apprendre. J’ai tenté de savoir ce qu’elle ressentait quand elle dominait un mâle. Elle m’avoua ne ressentir qu’une « indifférence froide ».

J’ai alors tenté de lui expliquer ce qu’était l’amour pour moi : un échange, un partage, des liens indéfectibles, des émotions intenses… Mais elle ne semblait pas comprendre. Alors j’ai tenté d’utiliser son langage. L’amour était une soumission mutuelle consentie, un asservissement parfois… Elle a semblé satisfaite de ces explications qui entraient dans un cadre qu’elle comprenait, reprenant un ton doctoral comme si c’était elle au final qui me faisait la leçon.

Il est vrai que parfois, je ne savais plus de qui nous parlions d’elle ou de moi… Sans doute qu’elle entretenait volontairement ce flou. Elle cherchait une nouvelle fois à m’amener dans la direction qu’elle souhaitait. Je lui ai donc fait part de ce que je ressentais : l’impression qu’elle cherchait à me modeler à gommer mes « aspérités » trop humaine. Elle a réfuté cela, déclarant que c’était uniquement moi qui ressentais « un rituel de changement en mon fort intérieur » ou peut-être était ce « un acte de soumission » ?

Un acte de soumission? Voulait elle que je me soumette à elle ? J’ai souri tristement : aurait elle de l’affection pour moi ? Elle n’a bien sûr pas répondu préférant éluder la question en affirmant « aimer les sombres à sa façon ». Quand je lui ai fait remarquer sa façon élégante de ne pas répondre. Elle a déclaré ne pas vouloir me laisser de fausses impressions par un « siyo » ou un « nau ».

Elle était une énigme pour moi, parfois je croyais la comprendre et parfois j’avais l’impression d’être à des milliers de lieux d’elle… Il m’a semblé soudain que son humeur basculait un peu vers la tristesse et l’amerturme. Elle disait que « ceux qui cherchaient à lire en elle n’avaient qu’à l’ouvrir, ils ne verrait qu’une âme vide ». J’ai tenté de lui dire que je pourrais la remplir mais elle affirmait que c’était impossible que tout s’évaporait avant. Mais peut-être que je pouvais y arriver si je la remplissais plus vite qu’elle ne s’évaporait. Elle semblait amère : « pour vivre une déception plus tard? ». On ne peut jamais savoir si on s’est trompé si on a pas essayé… même si çà fait mal… Et si on ne tente pas, on reste un objet sans âme.

Après un instant de silence, elle a affirmé que j’avais raison… J’attendais la suite pensant qu’elle allait poursuivre par une remarque cinglante mais rien n’est venu. J’avais tout dit d’après elle. Pensait elle que je la considérais comme une « objet sans âme »? J’ai tenté de lui dire qu’il devait être possible de ranimer un objet sans âme. Mais, elle a déclaré que « les objets sans âme restaient à vie sans âme ».

Je suis partie me coucher ce soir là avec de drôles de sentiments… des sentiments contradictoires envers elle. Parfois, je la détestais pour sa méprisante arrogance et parfois elle me semblait fragile au point que j’avais envie de la serrer dans mes bras. Je ne sais ce qu’elle ressent pour moi? peut-être que je ne suis qu’un jeu amusant pour elle? un nouvel être à soumettre? mais peut-être pas… peut-être qu’elle se cherche à travers moi?

Je ne sais si mon coeur en lambeau pourrait supporter, une nouvelle déconvenue. Pourtant, je le sens qu’il palpite plus vite quand elle est là, et qu’il lui manque quelque chose quand elle n’est pas là. Pourquoi suis je fascinée à ce point par elle? Peut-être que je cherche à m’entailler profondément et définitivement le coeur pour ne plus souffrir? Comme un papillon de nuit qui tourne autour de la flamme d’une bougie et fini par y brûler ses ailes?

Le clan sombre de Draïa

Les jours passaient et je restais le plus discret possible. J’ai croisé pour la première fois une sombre à Illumen. Elle était fière, le regard glacial. J’ai préféré m’éloigner dans un premier temps mais j’aimais sa façon d’être. Elle ne m’a pas vu. J’ai appris plus tard qu’il s’agissait de Fharath, une Jaliless du clan sombre des îlots qui s’était volontairement mis à l’écart de son peuple.

Je commençais à apprécier cette liberté que je n’avais jamais connue jusqu’à lors. J’étais libre de me lever et de me coucher à l’heure que je voulais. Mon emploi du temps n’était dicté par personne. J’allais où bon me semblait. Personne ne me frappait pour un oui ou pour un non.

Mais, un jour à Galein’th Aseyis, je n’ai pas pu échapper aux regards de deux femelles sombres. La rousse s’est présentée : « Je m’appelle Kharya de Norhen Dagha, je suis la Matriarche des Elfes Noirs qui vivent sur les îlots centraux des Landes. ». Avec ma veine, j’étais tombé sur la matriarche et une de ses jaliless, Darkmon. Comment pouvais je me présenter? Je ne suis pas sûr qu’elles auraient aimé que je dise : « Echk, je suis Yloken et j’ai tué mon Ilharess! ». J’ai souri intérieurement en pensant à cette répartie. J’ai préféré une présentation plus neutre : « Je suis Yloken… d’aucune maison ». Darkmon a alors répliqué en souriant : « De la notre si vous le souhaitez! ». Et l’Ilharess a ajouté : « Le clan de Draïa est ouvert à tous les sombres qui veulent en faire partie. ».

Elles m’ont ensuite proposé un « paquetage » qui m’aiderait à survivre sur place. Je dois dire que je n’avais pas très envie d’accepter comme si cela devait me lier à ce clan. Mais, je n’avais jamais appris à dire non à une femelle sombre. Et quand Darkmon m’a proposé de m’asseoir avec elles. J’ai obéi par réflexe. Je montrais un visage avenant comme un servant sait si bien le faire mais au fond de moi, je voulais fuir sentant que j’étais en train de perdre ma liberté nouvellement gagnée.

Darkmon m’a ensuite proposé de découvrir Naralik, les terres du peuple sombre sur les îlots. Encore une fois, je n’ai pas osé refuser me laissant conduire aux travers de la région. J’observais Darkmon, elle ressemblait à la sombre que j’avais croisée au port : Khaena. La même chevelure blanche comme les neiges, le même regard douloureux et puis cette gentillesse si peu commune chez les femelles sombres. La visite s’est terminée, elle m’a proposé de parler sur les ondes du peuple. Je ne me sentais pas prêt, j’ai prétexté la fatigue pour échapper à cette suggestion.

De nouvelles journées ont passées, je fuyais toujours le clan. Mais, la Jaliless Darkmon ne m’avait pas oublié, tentant de m’intégrer à son peuple. Elle a finalement réussi à me faire participer à un entrainement commun avec d’autres nouveaux. J’ai fait bonne figure. Je ne me débrouillais pas si mal. Le mâle Alak a même douté de mon arrivée récente dans les îlots. J’ai appris plus tard qu’il était le fils adoptif de l’Ilharess et représentant du peuple sombre.

Je trouvais étonnant qu’un mâle puisse avoir un tel poste même si ce n’était qu’une façade pour les autres peuples, l’Ilharess dirigeant toujours en sous-main. Je trouvais ses manières des plus cavalières avec l’Ilharess parfois. Mais ce n’était rien à côté de Mulvaar, son amant. Celui-ci la tutoyait en public. Chose inimaginable dans mon peuple…

Je ne me sentais pas bien parmi eux comme anormal. Certaines femelles se moquaient d’ailleurs de ma façon d’être, trop soumise. La prêtresse Elzeberith ne cessait de me dénigrer sur ma façon de m’incliner à chaque apparition d’une femelle, affirmant que je pouvais en profiter pour leurs essuyer les bottes… Qu’est ce que je faisais de si incongru ? On m’avait toujours appris à faire ainsi…

Je crois que le pire jour a été celui où une dispute a éclaté au sujet de la religion et de Lith en l’absence de l’Ilharess… Mon peuple avait été écrasé par l’obscurantisme et le fanatisme de certaines prêtresses pendant un temps. La seule bonne chose qu’avait fait l’Ilharess que j’avais tuée, avait été de décapiter au sens propre comme au figuré le culte de Lith. Elle avait fait tuer la plupart des prêtresses qui avait pris leurs aises en profitant de la faiblesse et de la vieillesse de la matriarche précédente.

En entendant cette dispute, j’avais l’impression de retrouver cette ambiance malsaine portée par quelques intégristes. Evidemment, Mulvaar, Alak et la fille de la haute-prêtresse Seliane était dans ce clan. J’avais envie de vomir, ce clan était dirigé par la famille de l’Ilharess et celle de la haute prêtresse, tous des fanatiques. Déclarant, que ceux qui ne croyait pas en Lith, n’était pas de vrais sombres…

J’ai commencé à tuer des araignées, celles qu’ils appelaient les « filles de Lith »… C’était risible de voir comme ils nous menaçaient du fouet, moi et d’autres, pour ne pas croire à ce qu’ils croyaient… Certains sont venus à mon secoure en me prévenant discrètement que je ne pouvais pas tuer des araignées à Naralik : Iymril, DarkCat, Rhiordan et Darkmon. Ceux-ci semblaient plus ouverts mais n’avaient pas vraiment de pouvoir au sein du peuple à part Darkmon, une jaliless bien isolée…

Bien sûr Alak, comme le bon fils à sa maman, a rapporté l’incident à l’Ilharess. J’ai eu droit à un sermon, dont je n’avais rien à faire. A vrai dire, je m’attendais plutôt à des coups de fouet qui ne sont pas venus. L’Ilharess semblait moins stupide que le reste de sa famille. Je crois qu’elle tentait d’apaiser les tensions en évitant des punitions trop dures. Mais, j’étais habitué au fouet. Pour notre clan, ce n’était qu’une petite punition…

Plus les jours passaient, moins j’avais envie de rester. Était il déjà temps de quitter les îlots?

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