Tag Archive: lettre


Une lettre pour ma mère

Jour 28 Nuona – Fingelien 383
La rage de ma mère dure toujours… Je ne sais plus quoi faire je suis épuisée. Je ne sais pas comment elle peut encore tenir debout… la rage sans doute…

Le coursier a amené une lettre de Kharya adressée à ma mère… Heureusement, j’étais éveillée à ce moment là pour la réceptionner. J’ai préféré la cacher pour le moment. J’ai peur qu’elle ne sombre un peu plus si elle la lisait maintenant.
La voici :

« Killya,

Quelque chose en moi s’est brisé quand j’ai entendu la dernière menace proférée par Khaena lors de sa vengeance. Celles qu’elle avait faites précédemment n’avaient eu aucun effet, pas même celle portant sur Oscarhamel et mon fils.

Sur le moment j’étais furieuse de ma faiblesse, mon orgueil s’est réveillé et je l’ai laissé me submerger. J’ai pensé que c’était passager, que c’était une blessure et qu’elle se refermerait après quelques jours d’isolement. Je me suis calmée. Mais après un mois, je me rends compte que rien ne revient comme c’était avant. Je me sens vide mais je n’en soufre pas. Je n’ai plus envie d’avoir ni femelle ni mâle même juste pour le plaisir du corps. Je n’ai plus envie de rire ou de sourire.

Tu as probablement raison dans ton analyse de mon incapacité sentimentale. Je n’arrive pas à m’ouvrir totalement à quelqu’un. Plus le temps passe, moins j’arrive à accorder une confiance totale en qui que ce soit.

Les seuls à qui j’ai pu m’ouvrir étaient des mâles dont l’aplomb et la sagesse faisaient d’eux des rocs inébranlables auxquels je pouvais me raccrocher en cas de doute. Ceux là, je les regrette.

Tous ceux qui étaient eux mêmes la proie de doutes et que j’ai voulu faire avancer semblaient préférer rester faibles devant moi pour être cajolés. Ceux là, je m’en veux d’avoir échoué et précipité leur perte.

Puisque seule, je ne fais pas de ravages, autant le rester. Je suis épuisée. Mon cœur est sec et ne peut plus rien offrir. Je veux finir ce à quoi je me suis engagée pour le peuple et ensuite disparaître.

Kharya. »

Je n’aurais pas du lire cette lettre sans doute mais je voulais protéger ma mère de toutes mauvaises nouvelles. Et celle-là en était une. Je me rendais compte à quel point j’avais blessé Kharya sans vraiment le vouloir, au point qu’elle veuille « disparaître ».

J’ai prétexté devoir lui remettre les derniers éléments du devis de Naralik pour la rencontrer. Je suis restée debout tout le temps de notre conversation. Je préférais qu’elle ne voit pas avec quelles difficultés, je m’asseyais avec mon corps meurtri. Heureusement quand je lui ai tendu le sac, elle n’a pas vu mes mains tremblantes et bleuies par les coups reçus et surtout donnés par ma mère.

Je lui ai expliqué que j’avais lu sa lettre et que je ne préférais pas que ma mère la lise sur le moment, sans donner plus d’explications. Elle n’a pas manifesté de désapprobation, affirmant même que j’étais la plus susceptible de savoir ce qui était le mieux pour ma mère.

Je me suis ensuite excusée pour l’avoir blessée plus que je ne l’avais voulu. Elle restait calme déclarant qu’elle n’avait pas été blessée mais qu’elle avait changé… Moi aussi, elle m’avait changée : j’avais l’impression d’avoir grandi.

Elle a ajouté qu’il ne fallait pas que je m’en veuille pour ce qu’il s’était passé. Que ma mère et elle avaient une vision trop éloignée de la vie pour qu’elles restent ensembles. Elle affirmait qu’elles auraient de toutes façons fini par se séparer. Et puis, ma mère avait déjà trouvé quelqu’un pour la remplacer…

Je suis restée un instant silencieuse ne sachant si je devais lui dire dans quel état se trouvait ma mère après sa rupture avec Bahar… Je lui ai finalement appris que ma mère s’était déjà disputée avec sa nouvelle femelle, sans en dire plus. Kharya n’a pas exprimé grande chose à cette nouvelle à part une légère surprise.

J’ai préféré écourter la conversation. Je ne tenais plus qu’à peine debout. Je ne voulais pas qu’elle prenne pitié de moi alors qu’elle était elle même si mal. Je l’ai quitté en déclarant que j’arrêtais de l’ennuyer. Elle m’a souhaitée un deshmal en ajoutant que je ne l’ennuyais pas.

Je n’ai pas bougé sur le moment, ne sachant si il s’agissait d’une invitation à rester près d’elle ou non. Après un instant d’hésitation, je suis partie pour ne pas qu’elle soupçonne mon état et qu’elle s’inquiète inutilement comme elle l’aurait fait pour tout membre blessé de son peuple.

Je suis repartie sur l’île des oubliés, où le froid glacial a tendance à anesthésier la douleur.

Deux lettres et un retour

Jour 28 Kamarien – Fingelien 383
En arrivant au port, le coursier m’a remis deux lettres : une d’Eryann et une de Kharya.

« Mon Isil,

J’espère que tu recevras ce petit mot où que tu sois. Ne t’en veux pas pour ton départ, c’est normal. Remets mon salut à Bahar (bien qu’elle ignore qui je suis…) prends bien soin d’elle et fais attention à vous deux.

Prends le temps qu’il faut, Anar et Isil continuent de briller dans le ciel.

Eryann. »

« Ma louve,

J’espère que cette lettre te parviendra mais plus encore que le voyage n’aura pas été trop mouvementé. Je comprends que tu aies besoin d’aller voir Bahar, c’est une bonne chose de t’assurer qu’elle aille bien et votre enfant aussi.

J’attends votre retour mes sombres, je guetterai les navires au Trépont. Je vous embrasse toutes les deux.

Ta panthère, Kharya. »

J’ai pleuré en les lisant. Quand j’ai quitté les îlots, j’avais eu l’idée de ne pas revenir. Je pensais que l’un comme l’autre pourraient se passer de moi et moi d’eux. Mais, leur lettre m’ont fait comprendre à quel point leur amour me réchauffait le coeur. J’avais sans doute encore des choses à vivre avec eux, de belles choses.

J’ai gardé leurs lettres sur mon coeur tout le long du voyage qui cette fois s’est déroulé sans encombre. A mon arrivée à Trépont, Kharya était là au port. Elle m’attendait comme elle l’avait dit dans sa lettre. Elle semblait dormir. Elle devait attendre depuis longtemps. Quand je l’ai saluée, elle a sursauté. Elle n’avait pas vu le bateau arriver. J’étais terriblement émue qu’elle nous ait attendu ainsi au port de Trépont. Je me suis assise près d’elle et je lui ai caressé tendrement le dos.

Elle m’a proposé d’aller ailleurs pour raconter mon voyage. Je ne lui ai pas parlé du naufrage, je ne voulais pas l’inquiéter. Je lui ai expliqué mon rêve avec les deux araignées et ce que je pensais qu’il signifiait. Je lui ai demandé si les jumeaux étaient courants chez les bleus. Elle n’en avait aucune idée mais elle pensait avoir quelque chose qui pourrait aider mon père.

Je l’ai regardé pleine d’espoir. Lorsque mon esprit avait fusionné avec celui de ma mère, Kely et elle étaient partis dans la montagne pour retrouver un artéfact qui aurait pu m’aider. Il n’avait finalement pas servi et peut-être qu’il pourrait aider mon père. Je ne savais pas vraiment comment mais Kharya semblait sûr que mon père saurait me guider par l’intermédiaire d’un rêve. Elle avait enterré l’artéfact au pied de l’arbre d’éternité à Trassian. Nous irions le chercher ensemble. Elle a ensuite proposé de venir voir Bahar avec moi. Je savais qu’avec ses connaissances, elle serait d’une grande aide mais je ne voulais pas qu’elle le fasse par pitié pour moi. Elle semblait pourtant décidée à m’aider.

J’étais épuisée. Elle m’a conduit dans la chambre de prestige de la taverne de Naralik. Je me suis endormie dans la chaleur de ses bras, heureuse d’avoir quelqu’un pour qui je comptais.

Jour 22.

Suivent une série de lettres recopiées dans les pages du journal.

25 fingel 384, Dépôt de Raven.

Mon Isil,

Je suis content d’avoir de tes nouvelles. Grâce aux lettres, j’ai l’impression d’être à tes côtés. Comme j’aimerais partir à la découverte du continent avec toi. Ouvre grand tes yeux, respire l’air et tend l’oreille pour nous deux. Sois prudente si tu croises un « Dragon », a voir les crânes qui ornent le bateau fusée de Sarma et qui jonchent l’Archéron, ces créatures doivent être terribles. Sois bien prudente. Et si tu savais me raconter comment c’est, ça me ferait plaisir.
Dans ta lettre, tu dis ne pas être capable de rassembler les sombres autour de toi. Je suis sur que tu le peux. Rien n’est impossible à Isil : elle fait bien bouger les flots des océans. Même si je ne comprend rien à la politique, je suis certain, que, avec ton expérience, tout ce que tu as déjà vécu, il y a peu d’aventuriers sombres plus à même de succéder à Kharya. Fais comme tu le sens, moi je croirai toujours en toi, qui que tu fasse.
Par contre, je tiens à te dire que ce n’est pas le fait que tu sois là qui risque de me faire perdre la raison. Mais le fait que tu ne sois pas là.Tu l’as pourtant déjà vu avec épisode des gargouilles. Je tiens à te rassurer : ne suis pas Kely. Même si je lui ressemble par certains points, je préférerai quitter les Îlots plutôt de de devenir cet être insensible et immoral qui s’est emparé de son corps. Et je tiens à le répéter : je ne perdrai pas l’esprit tant que tu seras avec moi. Physiquement, Télépathiquement ou Épistolairement.

Ici, c’est plutôt calme. Je me suis retiré à Starenlith, au fin fond de StarathLin, près de l’école d’Alchimie. Cela m’a fait du bien. J’ai beaucoup réfléchi. J’ai aussi beaucoup fondu d’essences curatives. C’est fou comme elles partent vite… Je n’ai même pas l’occasion d’en vendre, j’en utilise tellement lorsque je défend un territoire… Il faudra que je m’attelle à d’autres essences, mais mes maigres compétences de mineur me bloquent un peu…
Hier soir, j’ai voulu aider les nains à Nord-Thyl : Les gobelins avaient infesté la ville, mais je me suis résigné : à quoi bon aider des gens qui ne veulent pas de votre aide… Et puis ils sont bien assez puissant pour juguler une telle invasion. Je commence à croire que c’est illusoire de penser aider tout le monde : il y a tant de mauvaise volonté.

Je pense fort à toi sur la route,

Tye mélan

Tengwar signifiant « Lumière du Soleil » (Signature de Eryann)

Jour 23

2 illumen 384, Plage Nord du Trépont.


Mon Isil,

Le temps me semble long sans toi. Heureusement que la date de ton retour est tout proche. Je me réjouis de te voir, ne fut-ce qu’au détour d’un chemin.Car, si les festivités d’inauguration sont ouvertes à tous, je viendrai découvrir le Manoir Elfe noir, qui j’en suis sur sera encore plus beau (bien que dans une autre style) que celui des Hauts-Elfes.

Les Dragons volent? Quelle créature magnifique cela doit être! Tu as rencontré Une D’ji? La chance! Quoi que tu fasses sois prudente. Je suis contente que tu ailles mieux et ta mère aussi.
Concernant les Sombres, il est normal que tu leur manque. Tu es de ceux qu’on ne peut oublier, même croisé rapidement. J’en sais quelque chose.

J’ai décidé de me remettre sérieusement à l’alchimie. Je me rends compte que, j’ai assez de forces pour survivre lors d’une invasion pour l’instant et que j’avais négligé mon vrai métier. C’est vrai que je ne t’en avais jamais parlé mais le  je crois que  fait de faire l’alchimie est plus qu’un simple métier : Il faut respecter les différents éléments pour qu’ils daignent se combiner et non pas disparaître. J’ai fondu quelques barres d’argent et les ai venue à la représentante Eldoriane pour un bon prix. Je crois que je vais m’intéresser aux barres de métal, car comme déjà dit, j’ai assez de mal à récolter certaines pierres plus précieuses.
Tu sais comment je suis curieux de nature. Je me pose de plus en plus de questions à propos de la nécromancie. Comment rendre la vie à des chers mortes, comment manier les être créer. Il faudra que nous en discutions. Comment se fait il que certains peuples rejettent une telle pratique. Du côté des Haut-Elfes ils argumentent que la nécromancie est contre-nature. Mais la nature ne fait-Elle pas renaître  certaines plantes du désert après les pluies? Ne fait Elle pas non plus revenir à la vie certains animaux pris par le gel? Je n’en sais rien.

A la relecture de ma lettre, je me rends comte que mes histoire sont bien tristes par rapport aux tiennes. Puissé-je un jour connaître pareille aventure à la tienne.

Tye mélan.

Jour 25

18 nuona fingelien 38, Bâteau vers le continent.

J’ai finalement pris ma décision. J’ai discuté avec Kharya. Nous avons beaucoup parlé. Elle m’a raconté ce que la nouvelle Khaena lui avait dit et avait fait : elle avait quitté toute fonction chez les sombre, avait quitté tous ceux pour qui Killya  et Khaena n’était pas en accord. Comme moi, comme Kharya et comme Bahar. Selon la nouvelle sombre, elle était en paix. Je devais donc me résoudre à cette terrible conclusion : Isil avait disparu, Killya aussi. C’était une nouvelle personne. Et, si elle était en paix, pourquoi tenter de faire revenir la situation antérieure. J’ai cru déceler dans les paroles de la Matriarche (que j’ai surnommée Amya – la Mère) une réelle tristesse bien qu’elle ne l’eut pas avoué.

Lorsqu’elle a parlé de Bahar, je me suis revu dans le neige du Trépont, promettant à Isil que je prendrais soin de Bahar et des enfants. Il fallait que j’y aille. C’était la dernière chose que je pouvais faire pour la mémoire d’Isil. Avec les conseils de Kharya, je suis parti. Le bateau navigue sur la mer qui est étrangement calme, comme si la Nature voulait que je quitte les Îlots. J’ai laissé « mon » Arbre à Kharya, lui disant qu’elle pouvait s’y rendre si elle voulait profiter de son calme.

J’ai aussi écrit une dernière lettre à Isil, Killya et à celle qu’elles étaient devenues :

Khaena (ou quelque soit le nom que vous prenez aujourd’hui),

Je ne comprendrai jamais ce qui est arrivé et je doute que quiconque le puisse un jour. J’ai parlé à Kharya. Elle m’a expliqué. J’ai compris. Vous m’avez menti. Isil n’est pas morte. Elle a juste fusionné avec Killya. C’est mieux, au moins elles, au moins vous serez heureuse. Je vous souhaite que vous trouver ce que vous cherchez. N’oubliez tout de même pas ce que Khaena et Killya vous ont donné : la douceur de la fille et la passion de la mère.

Je vous transmets les quelques lignes que j’écris pour l’ancienne Khaena. Je sais qu’elle n’est plus nulle part, mais j’ai besoin de lui écrire certaines chose que je n’ai jamais pu lui dire.

Puissent Isil et Anar éclairer votre route de jour comme de nuit.

Namarie,


—————

Mon Isil,

Je suis désolé. Désolé de ne pas t’avoir retenu, de ne pas avoir été ce que j’aurais pu être. J’aurais voulu pouvoir te donner plus, être plus à ton écoute, comprendre ce que tu voulais. Sans doute n’était ce pas mon Chemin. Si cela avait été possible, j’aurai été fier de quitter le Landes, main dans la main avec toi, que nous nous trouvions une belle maison, que nous fondions famille, que nous oubliions toute cette violence. J’ai raté l’occasion d’être définitivement en paix. Je porterai donc ce fardeau, condamné à vie à la violence, au sang et à la souffrance.

Merci Isil, merci de m’avoir fait découvrir tant de choses. De m’avoir ouvert les yeux sur ce qui était vraiment important : profiter de ce que la Vie nous donne, en jouir comme si nous devions la perdre l’instant d’après. Tu as été la plus belle découverte de toute ma longue vie d’elfe. Jamais je n’en aurai d’autre, je n’en suis pas capable. J’ai appris que celle que tu est devenue a quitté Bahar. Je sais que tu n’aurais jamais fait ça. Je dois tenir la promesse que je t’ai faite. J’ai pris le bateau sur les conseils de Dame Kharya. Je retrouverai Bahar et resterai quelques jours sur le continent. C’est la dernière chose que je puisse faire pour toi. Je garderai l’anneau. Jamais je ne t’oublierai. Les Landes sont remplies de toi.

Tye mélan.

Namarie,



La dernière lettre d’Eryann

Jour 20 Nuona – Fingelien 384
J’ai reçu une nouvelle lettre. Cette fois, elle venait d’Eryann. Je ne l’avais pas revu depuis que les esprits de Khaena et Killya avaient fusionnés. J’avais juste eu une brève conversation avec lui où je ne l’avais pas ménagé. J’étais à ce moment là encore dans un état de colère froide avec un coeur entouré d’une gangue de glace.

Je crois que sa lettre était une sorte de lettre d’adieu. Il a tenu à en écrire une partie destinée à son « Isil ». Sans doute, espérait il la réveiller en moi? Mais çà n’a pas été le cas… J’ai quand même essayé de lui répondre.

« Eryann,

La Khaena que vous avez connu n’existe plus… Je ne vous ai pas menti… Je suis ce mélange des deux.

Quand à Bahar, je ne l’ai pas abandonnée. J’ai fait en sorte qu’elle ne manque de rien. Je lui ai même écrit une lettre. Mais, elle n’a jamais répondu. Je suppose qu’elle s’est fait une raison et qu’elle préfère garder l’image de celles qu’elle avait aimées et ne pas rencontrer la « chose » que je suis devenue.

Quand à votre lettre à Khaena, vous n’avez rien à regretter. Son coeur était tellement accaparé par son amour pour Kharya qu’elle n’arrivait plus à vous offrir ce que vous méritiez. Kharya a préféré Mulvaar et n’a pas fait un seul geste pour tenter de la sauver ou de les sauver pour séparer les deux esprits fusionnés…

Comme quoi, à quoi bon aimer puisque vous finissez par être abandonnée par ceux que vous aimez le plus au monde : Kely, Kharya, Bahar… Auriez vous été le prochain? Peut-être que les landes sont ainsi et qu’elles finissent par tout corrompre même l’amour.

Voilà pourquoi, je préfère quitter les îlots et découvrir un autre monde. J’y ai rencontré quelqu’un avec qui j’espère vivre ce que je n’ai pu vivre ici.

Je reviens parfois pour certaines de mes jeunes soeurs mais il me reste un goût amer et je n’arrive pas à y rester très longtemps.

Que Fenryos, le dieu loup des égarés et des oubliés veille sur vous.

Celle qui n’est plus ni Khaena, ni Killya. »

Je me rends compte que ma lettre était bien sombre… Parfois, j’ai des regrets : je m’en veux d’avoir abandonné mon peuple. Mais à vrai dire, est ce que je suis encore capable de lui apporter quelque chose? J’ai l’impression d’avoir tout donné pour au final tout perdre…
Je n’ai plus l’envie ni la force de continuer.

Sans doute qu’avec le temps, les blessures s’effaceront et que l’envie reviendra…

Inquiétudes pour mes soeurs

Jour 28 Nuona – Fingelien 384
Je m’inquiétais trop pour mes soeurs après avoir lu la lettre d’Iymril. Je me suis finalement décidée à écrire à Kharya sous l’oeil réprobateur de Shaael.

« Kharya,

Je suis revenue quelques jours sur les îlots à cause d’une lettre d’Iymril. Elle et Darkmon vivent assez mal les derniers changements au sein du peuple. J’ai tenté de les rassurer en leur parlant de Fenryos, le dieu loup, celui dont tu avais raconté l’histoire à Khaena.

Je crois que çà leur a fait du bien de savoir qu’un dieu les protégeait malgré leur différence. Elles ressemblent toutes deux à ce qu’était Khaena. Peut-être pourrais tu comme tu l’avais fait pour elle, les rassurer? Elles sont perdues, je crois comme elle l’était. Moi, je ne suis plus vraiment là même si j’essaie d’être présente parfois pour elles.

Ne leur dis pas que je t’ai parlé.

Que Khala veille sur toi.

Khaena (puisqu’il faut bien avoir un nom).

P.S. : J’espère que le tutoiement que j’ai employé dans cette lettre ne t’a pas perturbée. Je crois qu’il est inutile de continuer à se vouvoyer et garder cette distance verbale alors que la distance réelle qui nous sépare est si grande. »

Je savais qu’elle ne resterait pas insensible. Et elle m’a répondue quelques jours plus tard.

« Echk Khaena,

Taknea pour ta lettre. Je sais que le retour de Polgarath pose quelques inquiétudes. J’avais espéré qu’elle se serait adoucie avec cette longue mise à l’écart. Je vais essayer de voir à développer les Cultes mineurs en espérant que cela ne sera pas vu comme une division mais un moyen pour chacun de trouver sa place parmi nous. Je ne sais pas encore comment la Haute Prêtresse verra ma décision.

Je sais que Khaena et Killya n’ont pas été vraiment favorable à la rigidité de certaines, pourtant, les faits sont là : nos soeurs laissent les mâles prendre toutes les places à responsabilité. Je ne peux pas constamment être là pour les tirer de l’ombre où elles préfèrent se cacher. Si elles ne sont pas volontaires, à la moindre difficulté ou contrariété, elles s’enfuiront. Tu comprendras donc aussi que les critiques disant que certains mâles sont trop ambitieux me font doucement grincer des dents. Si nos soeurs avaient l’autorité qui sied à leur rang, ces problèmes ne seraient pas pointés. J’ai toujours donné leur chance aux mâles car j’ai toujours vu en eux plus que de simples serviteurs. Concilier traditions et évolution n’a jamais été simple.

Si nos soeurs ne veulent pas de la méthode Polgarath, elles doivent s’affirmer et faire pencher la balance dans leur sens. Je te l’ai déjà dit, ma vision du Culte n’est pas la même que la sienne. Je suis à l’écoute de mon peuple, encore faut-il qu’il ne reste pas muet. Je suis là pour écouter mais trop occupée pour aller chercher ceux qui n’osent pas parler. Je les contacterai, je ne peux pas les laisser dans le doute, en espérant qu’elles comprendront mes décisions. Mais ce serait plus simple d’aborder le sujet si elles savent que tu m’en as parlé. Je respecterai ta volonté, cela dit.

Je suppose que tu auras les échos de leur part. J’espère qu’ils seront positifs. Je ne te demande pas de m’en rendre compte si tu estimes qu’il vaut mieux que je n’en saches rien.

Puisse le Loup veiller sur tes pas dans cette contrée si éloignée.

Kharya. »

Je n’aimais pas les reproches voilés sur l’autorité que certaines femelles n’avaient pas. Je dois dire que je les ai prises pour moi ou du moins la partie Khaena qui est en moi. Je ne vois d’ailleurs toujours pas pourquoi une femelle devrait avoir plus d’autorité qu’un mâle ou inversement… Kharya ne voit peut-être pas les mâles comme de « simples serviteurs » mais pourtant ses paroles montrent qu’elle les considère quand même comme inférieurs aux femelles puisqu’elle fustige les femelles de ne pas avoir « l’autorité qu’il sied à leur rang ». L’équilibre n’est donc pas possible? Pourquoi les uns devrait être les inférieurs des autres?

J’ai laissé là ces réflexions sans lui en faire part dans ma lettre, préférant qu’elle s’occupe de mes soeurs plutôt que de mes états d’âmes.

« Echk Kharya,

Je suis heureuse pour mes soeurs si tu parviens à ouvrir les cultes mineurs. J’espère qu’elles y trouveront un peu de réconfort.

Quand aux mâles qui ont pris les postes séridiens, pour ma part, çà ne me dérange pas. J’étais au conseil et j’ai bien vu comme toi qu’aucune femelle ne s’est proposée. Elles n’ont pas à critiquer le fait que les mâles aient donc pris les postes dont elles n’ont pas voulu…

Pour Iymril et Darkmon, si cela est plus simple pour toi, fait leur part de ma lettre. Je les ai toujours poussé à aller à ta rencontre plutôt que de s’enfermer dans la solitude et l’exclusion. Mais leur timidité les retient je pense. Celle qui est le plus au bord du gouffre est Iymril. Je vois passer des éclairs sombres dans ses yeux. J’ai peur qu’elle bascule dans la folie ou la violence aveugle… Darkmon est plus douce mais elle a une histoire douloureuse.

Taknéa de prendre soin d’elles.

Que Khala éclaire ta route dans la nuit.

Khaena. »

Je n’avais pas répondu à Iymril : sa lettre était restée en suspend en attendant de connaître la réaction de Kharya. Rassurée par ses déclarations, j’ai répondu à ma jeune soeur.

« Ma soeur,

Effectivement, l’annonce de Polgarath me fait craindre le pire. Je me demande comment cette jeune soeur va s’en sortir… J’espère que vous avez abandonné l’idée de rejoindre son apprentissage…

J’ai correspondu avec Kharya. Elle m’a déclaré vouloir autoriser les cultes mineurs comme celui de Fenryos quitte à rentrer en conflit avec Polgarath. Cela permettra peut-être de rassembler ceux qui ne se reconnaissent pas dans le culte de Lith.

Peut-être vous en parlera t’elle?

Prenez soin de vous ma soeur, ne basculez pas dans la destruction.

Que Fenryos guide vos pas.

Khaena. »

J’espère que tout ce que je tente de faire pour mon peuple même à distance portera ses fruits… Je suppose qu’il faudrait que je revienne voir moi même…

Echanges épistolaires avec Kharya

Jour 6 Thyllion – Fingelien 384
J’ai enfin reçu des nouvelles de Kharya. Je commençais à m’inquiéter pour elle. Il y a eu deux lettres à quelques jours d’intervalle .

La première est arrivée abîmée. Elle était cachetée de cire noire par un sceau représentant un clair de lune barré d’une dague.

« Khaena,

J’ai enfin pu atteindre le continent. Une fois de plus le voyage a été mouvementé, la mer intérieure est toujours aussi mauvaise. Le navire a mouillé dans un port Galdur tout à l’est des îlots. Je n’ai pas encore pu repérer la route pour le village où devraient m’attendre Oscarhamel et Arahda. La dernière fois, le bateau avait fait naufrage et je m’étais retrouvée plus au nord.

Le port n’est pas d’une grande allure. Un ponton et un ensemble de hameaux de bois et de terre plus ou moins bien assortis les uns aux autres. L’air flair le poisson fumé et est agité des rires rauques des marins. Je passe plus ou moins inaperçue. Ma carrure ne leur fait pas craindre de danger, je pense.

J’ai pris une chambre dans ce qui leur sert d’auberge le temps d’organiser plus précisément mon voyage. Je ne tiens pas à partir à l’aventure sans une direction et une bonne carte. J’ai eu quelques questions sur les îlots mais je n’avais pas le cœur à raconter grand chose. Il faut que je me concentre sur ce que j’ai à faire pour revenir au plus vite.

J’espère que tout se passe bien pour les sombres, qu’ils t’écoutent et qu’ils ne te donnent pas trop de mal.

Que Fenryos te soutienne.

Je t’embrasse,

Kharya. »

Et la deuxième est arrivée, à un moment où je doutais en ma capacité à servir efficacement mon peuple. Le coursier était furieux et me hurlait qu’il ne transmettrait plus jamais de lettre venant de moi…

« Khaena,

J’ai reçu ta lettre et la rose. Par contre, j’ai l’impression que tu n’as pas eu la mienne. C’est assez difficile de trouver des volontaires pour rejoindre les « ilots maudits » juste pour livrer une lettre. J’espère que le tien est fiable. Je dois dire que je l’ai un peu impressionné.

Je me sentais suivie depuis quelques temps dans la forêt que je devais traverser et j’avais décidé de m’en débarrasser en sachant ce qu’il me voulait au préalable. J’ai préparé un piège pour ce pauvre coursier. Rien de bien méchant, il est resté indemne. J’ai pu apercevoir une missive tomber de sa besace à temps pour ne rien lui faire de regrettable.

J’avoue que je suis très méfiante, plus qu’à l’habitude, maintenant que je sais que je n’ai plus d’immortalité pour me préserver des mauvaises surprises.

J’ai récupéré assez d’informations pour retrouver le village natal d’Arahda. Cela fait un bon mois maintenant que je voyage. Je me rends compte que mes expériences sur les îlots m’ont bien servit pour chasser efficacement. Je n’ai pas de soucis de vivre au moins.

Ce qui est le plus gênant est le froid et la neige qui rend difficile le repérage dans cette immensité blanche. Je suppose que tu dois connaître ce genre de soucis avec Bordeciel. Mais j’ai bon espoir d’arriver d’ici un mois à destination.

Tu as très bien agit avec Seliane et Melany. Pour Elzeberith, écoute ce qu’elle a à dire, pèse le pour et le contre, et ne courbe jamais l’échine devant elle, défend tes positions. Elle n’agira jamais contre toi même si elle peut être des plus désagréable. Elle sait qu’elle n’est pas en position de force, tu as trop de soutiens, les même que les miens.

Pour Alak et Mulvaar, je préfère que tu ne les traites pas différemment des autres sombres. Leur lien privilégié avec moi est déjà perçut comme du favoritisme, je ne tiens pas à ce que cette impression erronée perdure en mon absence.

J’ai confiance en tes compétences. Quand à ceux à qui je manque, dis leur que je vais bien et que je n’oublie pas notre peuple.

Puisse Fenryos te soutenir dans la tâche que je t’ai confiée.

Je t’embrasse,

Kharya. »

Sa lettre m’a fait du bien et lui ai raconté ce qu’il s’était passé dernièrement.

« Ma très chère amie,

J’ai bien reçu tes deux lettres à quelques jours d’intervalle. Effectivement, le coursier était des plus traumatisés quand il m’a remis ta lettre. Il m’a hurlé dessus et m’a assuré que plus jamais il ne ferait de course pour moi. J’ai bien ri. Mais évite quand même de leur faire trop peur, je vais finir par ne plus trouver de coursiers pour t’envoyer des lettres.

Je dois dire que ces derniers jours ont été particulièrement durs pour moi. Je pensais que j’avais fait le plus dur en maîtrisant Elzeberith, Polgarath et Fharath. Je ne pensais vraiment pas que le coup de poignard dans le dos viendrait de mon âme soeur Rhiordan.

Il y a actuellement une histoire à propos d’une cérémonie à laquelle nous avait invité Angdar avec les sinans. Le but est de rendre au temple de Pierre-blanche son utilisation originelle : un temple dédié à la nécromancie. Quelques jours plus tard, un esprit est apparu défendant le temple des « mécréants ». Il attaquait tous ceux qui n’étaient ni sinans, ni sombres. Il disait défendre le temple. Malheureusement, il a attaqué quelques natifs également.

La doge sinane voulait que nous fassions un déclaration commune mais elle affirmait que nous avions été contraints à venir à cette réunion. Elle dénonçait Angdar. Je dois dire que j’ai été choquée comme d’autres sombres. Il était hors de question de signer cette déclaration. Nous étions encore en train de discuter si nous faisions une déclaration autre ou pas du tout quand Rhiordan est allé apposer un parchemin dénonçant Angdar.

Elle est allé contre l’avis du conseil. Je ne sais pas quoi faire d’elle maintenant. Nous avons du faire une déclaration dans l’urgence. J’espère qu’Alak l’apposera, il était contre toute déclaration….

Enfin, tu es loin de tout çà maintenant et quand tu me parles d’étendues neigeuses, Bordeciel me manque… Je me sens si seule parfois.

Que Khala guide tes pas vers ton fils et ton mâle.

Khaena. »

Powered by WordPress | Theme: Motion by 85ideas.